Question de Mme SOLLOGOUB Nadia (Nièvre - UC) publiée le 17/10/2024

Mme Nadia Sollogoub attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les difficultés rencontrées par les déplacés ukrainiens en France concernant la reconnaissance et l'échange de leur permis de conduire. Actuellement, les permis de conduire ukrainiens ne sont pas reconnus en France.
Un permis de conduire non européen n'est valable en France qu'un an à partir de l'acquisition d'une résidence normale. La procédure d'échange du permis d'origine contre un permis de conduire français n'est possible qu'à l'issue de cette période d'un an et uniquement si le pays d'origine figure sur une liste des États et autorités susceptibles de faire l'objet d'un tel échange en vertu d'accords bilatéraux et de pratiques réciproques. Actuellement, aucun accord d'échange de permis de conduire n'existe entre l'Ukraine et la France, contrairement à ce qui est prévu en particulier pour les ressortissants russes.
Cette situation prive les ressortissants ukrainiens en France de la possibilité d'échanger leur permis de conduire ukrainien contre un permis de conduire français ce qui pénalise bien souvent leur insertion professionnelle.
Elle souhaite savoir si le Gouvernement envisage de négocier un accord bilatéral avec l'Ukraine pour permettre l'échange des permis de conduire ukrainiens contre des permis français, facilitant ainsi la mobilité et l'intégration des déplacés ukrainiens en France.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'intérieur, chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations publiée le 04/12/2024

Réponse apportée en séance publique le 03/12/2024

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, auteur de la question n° 095, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le secrétaire d'État, en tant que présidente du groupe interparlementaire d'amitié France-Ukraine au Sénat, je suis sollicitée pratiquement tous les jours - je ne suis pas la seule parmi mes collègues - sur la reconnaissance du permis de conduire ukrainien en France.

Nous avons accueilli beaucoup de ressortissants de ce pays depuis 2022 : certains sont repartis, d'autres, disposant de beaucoup de compétences et souhaitant retourner chez eux le moment venu, sont restés et veulent travailler. Pour le pouvoir, dans bien des cas, il faut le permis de conduire.

Où en sont les négociations sur ce dossier qui est réellement prioritaire ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Othman Nasrou, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur, chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations. Madame la sénatrice Sollogoub, depuis le début du conflit, le nombre de déplacés ukrainiens s'élève à près de 10 millions, dont plus de 2,5 millions d'enfants. Ces personnes se sont rendues à la fois dans les pays limitrophes et dans le nôtre.

Dans ce contexte, le Conseil de l'Union européenne a décidé en 2022 d'activer la protection temporaire prévue à l'article 5 de la directive du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil. Ce dispositif, qui permet de donner un cadre légal à la présence de ces déplacés sur notre territoire, a été complété par un règlement du 18 juillet 2022 sur le droit à conduire des personnes placées sous pareil régime.

En vertu de ce texte, les déplacés bénéficiant de protection temporaire voient la validité de leur permis de conduire fourni par l'Ukraine parfaitement reconnue, jusqu'à un an après un éventuel changement de statut juridique relatif à leur droit au séjour.

Il n'est donc pas nécessaire, sous ce régime, d'échanger son permis pour conduire en toute légalité sur notre territoire. Ainsi, il n'est actuellement pas envisagé d'engager de démarche de négociation d'un accord bilatéral sur le sujet dans le contexte compliqué que vous connaissez. Elle nécessiterait d'importants travaux préparatoires et délais, qui ne sont pas juridiquement nécessaires pour l'insertion professionnelle de ces personnes.

Croyez, madame la sénatrice, que le Gouvernement, en particulier le ministère de l'intérieur, partage l'attention que vous portez à un meilleur accueil possible de ces réfugiés.

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour la réplique.

Mme Nadia Sollogoub. Le conflit - hélas ! - est bien plus long que ce que nous avions imaginé. Alors qu'ils sont en train de réellement s'insérer et qu'ils réussissent à travailler grâce à leur acquisition de quelques notions linguistiques, certains Ukrainiens doivent repasser le permis de conduire au bout d'un an. Il est extrêmement compliqué de repasser le code, à plus forte raison pour des personnes qui maîtrisent à peine la langue. Même moi, si je devais le repasser, je ne sais pas si je l'aurais ! (Mme Cathy Apourceau-Poly sourit.)

Ne pas avoir le permis de conduire représente un réel blocage, d'autant que le permis russe est, lui, valide en France... Le consul ukrainien fait face à de grandes difficultés. Il faut absolument régler ce dossier, un parmi d'autres. Par exemple, les jeunes qui sont arrivés en France à 17 ans et qui sont sous le régime de la protection temporaire ne sont pas considérés comme disposant d'une résidence permanente. Cette condition est pourtant nécessaire pour passer le permis.

Monsieur le ministre, je vous prie de reprendre ce dossier de façon urgente parce que nous nous privons de compétences. Ayons les moyens d'héberger ces personnes : tout le monde souhaite dans l'idéal qu'elles soient autonomes et puissent travailler. Ce point de blocage est complètement ridicule ! (M. Serge Mérillou applaudit.)

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