Question de Mme RICHER Marie-Pierre (Cher - Les Républicains-R) publiée le 03/10/2024
Mme Marie-Pierre Richer attire l'attention de Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation sur l'incidence financière que peut avoir pour les communes la mise en oeuvre de la procédure des édifices menaçant ruine. Beaucoup de maires se trouvent, en effet, confrontés à la présence, sur le territoire de leur commune, de bâtiments vétustes qui, faute de travaux de la part de leur propriétaire, deviennent dangereux et font ainsi courir un risque pour la sécurité tant des éventuels occupants que des tiers.
Certes, dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale relatifs aux immeubles menaçant ruine prévue à l'article L. 2213-24 du code général des collectivités territoriales, le maire peut intervenir pour mettre en demeure le propriétaire d'effectuer les travaux nécessaires. À défaut de leur réalisation dans le délai imparti, il peut faire procéder d'office à leur exécution, voire, sur décision du juge des référés à la démolition dudit immeuble. Dans ce cas, la commune est considérée comme agissant pour le compte des propriétaires et à leurs frais. Ceux-ci sont recouvrés comme en matière de contributions directes et un titre de recouvrement leur est adressé, conformément aux dispositions de l'article L 511-4 du code de la construction et de l'habitation.
Or la commune risque de se retrouver face à des propriétaires insolvables, laissant ainsi à la charge des contribuables le coût de l'opération qui, pour les petites communes en particulier, grèvera lourdement leur budget. Par ailleurs, l'article 2374 du code civil permet à la commune d'obtenir la vente forcée de l'immeuble et de faire valoir son privilège sur le produit de la vente pour recouvrer le montant de sa créance. Encore convient-il qu'elle trouve un acquéreur qui lui achète le bien à un prix recouvrant ce montant ! Devant ces difficultés, bon nombre d'élus hésitent à mettre en oeuvre ces procédures au risque de mettre en danger la sécurité des habitants qui, mal informés, leur reprochent leur inertie.
Aussi elle lui demande quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre afin d'aider les maires des petites communes, notamment, à faire face à cette situation.
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Transmise au Ministère de l'aménagement du territoire et de la décentralisation
Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire et de la décentralisation publiée le 27/03/2025
Les maires disposent de prérogatives élargies en matière de la lutte contre l'habitat indigne. En cas d'extrême urgence, le maire peut user de son pouvoir de police générale régi par l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) pour évacuer un immeuble, réaliser des travaux d'urgence et sécuriser le bâtiment. Le FARU (Fonds d'Aide au Relogement d'Urgence) peut être sollicité pour prendre en charge les frais d'hébergement des personnes évacuées, mais également les travaux d'urgence et de sécurisation. En outre, dans le cadre du pouvoir de police spéciale de mise en sécurité (ex péril) prévu à l'article L.511-1 du code de la construction et de l'habitation, en cas de défaillance du propriétaire suite à l'engagement d'une procédure de mise en sécurité, le maire a la responsabilité d'agir en ses lieu et place, et à ses frais. Afin de maîtriser la charge financière des travaux exécutés d'office, le maire peut solliciter une aide de l'Anah équivalente à 50 % du montant des travaux prescrits. En cas de recouvrement des frais de travaux avancés par la commune auprès du ou des propriétaires défaillants, le maire n'est pas tenu de restituer l'aide de l'Anah précitée. La procédure de recouvrement des créances est régi par l'article L.511-17 du code de la construction et de l'habitation qui dispose que « Les frais de toute nature, avancés par l'autorité compétente lorsqu'elle s'est substituée aux personnes mentionnées à l'article L. 511-10 ou lorsqu'elle exécute les mesures mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 511-11 visant à empêcher l'accès ou l'usage du logement, [...] sont recouvrés [...] comme en matière de contributions directes conformément aux dispositions de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales lorsque l'autorité compétente est le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale.[...] ». En outre, l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés a remplacé les privilèges immobiliers spéciaux par des hypothèques légales prévues à l'article 2402 et suivants du code civil. Désormais, une hypothèque légale spéciale peut permettre de garantir les créances des autorités de police ayant engagé des mesures et travaux d'office. Toutes les sûretés immobilières prennent rang à la date de leur inscription. L'autorité titulaire de la créance à garantir procède à la conservation de l'hypothèque par la double inscription au fichier immobilier de l'arrêté de police et du titre de recouvrement des créances. A noter que l'article 2405 du code civil prévoit que « Par dérogation à l'article 2404, l'hypothèque peut également être conservée par la seule inscription du titre de recouvrement, à concurrence de sa valeur. ». En cas de vente de l'immeuble, le notaire exigera l'état des dettes actualisées auprès du service ayant pris l'hypothèque. Grâce à l'hypothèque légale spéciale, la collectivité publique bénéficie également d'un droit de priorité sur les autres créanciers Enfin, l'ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l'harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations a institué la possibilité pour les maires de transférer leurs pouvoirs de police spéciale au président de l'Etablissement Public de Coopération Intercommunale. Cette disposition permet notamment aux maires des petites communes de mutualiser leurs moyens afin de pouvoir recourir aux travaux d'office.
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