Question de M. DUPLOMB Laurent (Haute-Loire - Les Républicains) publiée le 31/10/2024
Question posée en séance publique le 30/10/2024
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. C'est sans doute une première dans l'histoire du Sénat, mais l'actualité et la menace sans précédent qui pèse sur les agriculteurs français la justifient : cette question s'adresse non pas au Gouvernement, mais au Président de la République. (Exclamations.)
Je m'adresse donc aujourd'hui directement à Emmanuel Macron. (Murmures sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. Rachid Temal. Il n'est pas là pour vous répondre...
M. Laurent Duplomb. En effet, au début de cette année, au beau milieu des manifestations agricoles et avant les élections européennes, c'est lui qui assurait que les négociations avec le Mercosur étaient suspendues.
C'est encore lui qui s'engageait à ce que cet accord ne soit pas conclu sans clauses miroirs, ces dispositions dont on parle tant, mais qui n'existent toujours pas. (M. Rachid Temal s'exclame.) Elles n'existent pas plus dans cet accord, d'ailleurs, que dans le Ceta (accord économique et commercial global) que nous avons rejeté sur ces travées pour cette même raison, mais aussi parce qu'il ouvrait la voie à la validation de l'accord avec le Mercosur, comme nous le dénoncions déjà.
C'est enfin lui qui détient aujourd'hui le pouvoir de bloquer l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur.
En effet, malgré une large désinformation sur ce sujet, la France détient encore à ce jour un droit de veto pour faire tomber cet accord. Comme l'a confirmé dans la presse Mme la ministre Primas le 22 octobre dernier, les textes sont clairs : les accords d'association comme celui qui a été négocié avec le Mercosur sont des accords mixtes, qui nécessitent une approbation à l'unanimité des États membres au Conseil de l'Union européenne.
M. Fabien Gay. Et au Parlement !
M. Laurent Duplomb. Si nous savons bien que la Commission européenne entend contourner ce veto en scindant l'accord pour isoler son volet commercial, aucune décision officielle n'a été prise à ce jour. La France est donc parfaitement légitime pour s'opposer à une telle manoeuvre, faire valoir ses droits et conserver sa capacité de blocage.
Pourquoi donc, monsieur le Président de la République (Exclamations.), ne réagissez-vous pas face à l'attitude méprisante de la Commission européenne envers les agriculteurs, mais aussi envers la France ?
Pourquoi n'exercez-vous pas le veto qui vous revient de plein droit ?
M. le président. Il faut conclure !
M. Laurent Duplomb. Enfin, combien de temps encore allez-vous nous contraindre, nous, représentants élus du peuple français, à regarder périr nos agriculteurs et nos entreprises, en acceptant que cette Commission européenne outrepasse ses droits et piétine la démocratie ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, GEST et CRCE-K.)
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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger publiée le 31/10/2024
Réponse apportée en séance publique le 30/10/2024
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce extérieur et des Français de l'étranger.
Mme Sophie Primas, ministre déléguée auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée du commerce extérieur et des Français de l'étranger. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, cher Laurent Duplomb, comme vous le voyez, je ne suis pas le Président de la République, en tout cas pas encore ! (Rires.)
Je vous remercie de cette question : elle m'offre l'occasion de vous dire à quel point le Premier ministre et le Gouvernement tout entier sont mobilisés pour démentir les bruits qui courent sur un accord potentiel avec le Mercosur.
Depuis 2019, les négociations entre l'Union européenne et les pays du Mercosur n'ont pas beaucoup évolué. Nous nous opposons à cet accord.
Tout d'abord, nous tenons à ce que l'accord de Paris en constitue un élément essentiel. Cela signifie que, en cas de violation de l'accord de Paris, l'accord pourrait être suspendu, et cela par chacune des deux parties, de chaque côté de l'Atlantique.
Ensuite, nous souhaitons que cet accord d'association soit pleinement aligné avec les compétences des États membres. Il ne doit pas être scindé en deux et les Parlements doivent être consultés à son sujet.
Enfin, nous souhaitons que cet accord soit en phase avec la nouvelle politique de l'Union européenne, qui concilie commerce et développement durable. À cet égard, les normes vétérinaires et phytosanitaires devront être alignées.
Nous connaissons les raisons de la colère des agriculteurs, et cet accord avec le Mercosur en est probablement l'étendard. C'est la raison pour laquelle nous n'accepterons pas, en l'état, sa conclusion.
J'en appelle d'ailleurs, comme je viens de le faire à l'Assemblée nationale, à la mobilisation de tous : nous avons besoin de chacun d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour convaincre nos collègues députés européens, les associations environnementales (M. Yannick Jadot s'exclame.) et les agriculteurs des pays concernés qu'un autre accord est possible avec le Mercosur.
Je vous remercie par avance de votre soutien. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes RDPI et INDEP.)
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