Question de M. PATIENT Georges (Guyane - RDPI) publiée le 24/10/2024
Question posée en séance publique le 23/10/2024
M. le président. La parole est à M. Georges Patient, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Georges Patient. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Après Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et la Martinique, la Guyane sera-t-elle le prochain « brûlot de l'Empire » ? Tout y concourt : une insécurité exponentielle s'ajoute à la cherté de la vie, dans un contexte d'extrême pauvreté.
La Guyane a enregistré son quarante-deuxième homicide de l'année. Le taux d'homicide y est de 20 pour 100 000 habitants, cinq fois plus que dans les Bouches-du-Rhône - un record !
C'est à Saint-Laurent-du-Maroni que la situation se dégrade le plus. L'usage d'armes à feu y est devenu la norme. En 2023-2024, 25 % des vols à main armée recensés en France en zone gendarmerie ont été commis dans cette ville, qui, officiellement, ne compte que 50 000 habitants.
Facteur aggravant, le Maroni, fleuve frontière avec le Suriname, n'est, dans les faits, pas une frontière. Actuellement, le point de contrôle policier se trouve quelques kilomètres après la sortie de Saint-Laurent-du-Maroni, sur la route de Cayenne. La ville est ainsi livrée à tous les trafics, qu'il s'agisse d'armes, de drogues ou encore d'immigration illégale. Une telle situation est indigne de notre République.
En avril dernier, l'opération « place nette » avait montré un début d'efficacité ; elle a été interrompue à la suite du départ de deux escadrons de gendarmerie pour les jeux Olympiques de Paris.
Hier, le préfet de la Guyane a annoncé l'arrivée de la garde républicaine. Quant aux Guyanais, ils réclament en priorité et de toute urgence le retour des deux escadrons de gendarmerie et souhaitent que d'autres leur soient adjoints. S'y ajoutent deux demandes, elles aussi prioritaires : premièrement, faire du Maroni une véritable frontière, ce qui suppose d'y surveiller la navigation vingt-quatre heures sur vingt-quatre, en mobilisant l'armée si besoin ; deuxièmement, donner à la ville les moyens d'éradiquer les quartiers informels qui servent de refuges aux criminels.
Monsieur le ministre, saurez-vous répondre aux attentes de nos concitoyens et leur permettre de retrouver une vie paisible ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe SER.)
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 24/10/2024
Réponse apportée en séance publique le 23/10/2024
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bruno Retailleau, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Georges Patient, vous m'alertez sur la gravité de la situation en Guyane, et singulièrement à Saint-Laurent-du-Maroni.
Selon les statistiques que vous avez à juste titre citées, nous en sommes, sur ce petit bout du territoire français, à quarante-deux homicides depuis le début de l'année. J'ajoute que le mouvement s'accélère : sur place, on dénombre désormais deux à trois tentatives d'homicide par jour et, depuis le début de l'année, les vols à main armée ont augmenté de 37 %. Bref, la situation s'aggrave.
Un pic de violence a eu lieu le 3 octobre dernier : ce jour-là, nos gendarmes ont été pris à partie. Lors d'une opération de rétablissement de l'ordre, ils ont même essuyé plus de quarante tirs à balles réelles.
Je tiens à saluer devant la représentation nationale le courage des forces de l'ordre présentes sur place. Elles accomplissent un travail extraordinaire dans des conditions très difficiles : bravo à elles, vraiment. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, INDEP, RDPI et RDSE et sur des travées du groupe SER.)
Soyez assuré que nos enquêteurs sont mobilisés. Ils ont interpellé et déféré à la justice plusieurs individus présumés responsables des désordres du 3 octobre dernier : notre main ne tremble pas.
Vous m'interrogez au sujet des renforts. Que faire ? Avec le Premier ministre, j'ai décidé d'envoyer sur place, en renfort, les escadrons de gendarmerie que vous réclamez. Des renforts déployés sur mon initiative sont d'ores et déjà arrivés, pour certains pas plus tard qu'hier : tel est le cas du peloton d'intervention de la garde républicaine que vous évoquiez. De même, nous avons renforcé l'antenne du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), qui est précisément engagée à Saint-Laurent-du-Maroni.
Les renforts sont donc là. Ils s'ajoutent aux 1 525 policiers et gendarmes territoriaux déjà présents sur place, mais cela ne suffira pas. En parallèle, nous allons mieux contrôler la frontière, qui, pour l'heure, n'est en effet qu'une passoire.
Vous avez raison : le Maroni est devenu l'autoroute de la délinquance, de gens ultraviolents. Pour contrôler ce fleuve, comment allons-nous faire ? Nous allons tout simplement rétablir le contrôle de l'accostage des bateaux dans le port, avec - je l'espère - le soutien des collectivités territoriales. En outre, nous allons déployer des drones pour assurer une surveillance permanente de la frontière.
Comptez sur nous, monsieur le sénateur, pour ne pas laisser dériver la violence dans votre beau territoire : la République, c'est non seulement la métropole, mais aussi l'ensemble des territoires ultramarins français. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC, INDEP et RDPI.)
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