Question de Mme JACQUEMET Annick (Doubs - UC) publiée le 03/10/2024

Mme Annick Jacquemet attire l'attention de Mme la ministre de la santé et de l'accès aux soins sur l'opportunité d'élargir le dépistage néonatal.

Alors qu'en France, 3 millions de personnes sont concernées par une maladie rare, notre pays a été pionnier en matière de dépistage néonatal, mis en place il y a près de 50 ans, initialement, pour la phénylcétonurie.

Spécifiquement axé sur les maladies rares et s'adressant à l'ensemble de la population, le dépistage néonatal concerne tous les nouveau-nés, soit environ 700 000 bébés chaque année. Depuis les années 1970, ce sont plus de 36 500 enfants qui ont été dépistés, en permettant parfois d'éviter les conséquences dramatiques d'un défaut de diagnostic précoce.

Si actuellement, 13 pathologies sont dépistées, avec des avancées notables en 2022 et 2023 pour des maladies similaires à la phénylcétonurie, notre pays continue d'accuser un retard par rapport à nombre de ses voisins. Sur 30 nations européennes, dont certaines diagnostiquent jusqu'à 20, 30, voire 40 maladies pendant la période néonatale, la France n'occupe en effet que le 15e rang.

Si le dépistage néonatal est principalement effectué peu avant la sortie de la maternité, en prélevant quelques gouttes de sang sur des buvards, le dépistage génétique des maladies se réalise principalement à travers des programmes pilotes financés par la recherche. C'est notamment le cas du programme de dépistage de l'amyotrophie spinale infantile, dit « DESPIMA », mis en place dans les régions du Grand Est et de la Nouvelle-Aquitaine. Cette expérimentation crée une inégalité territoriale, puisque, malgré son efficacité pour diagnostiquer précocement cette maladie grave, touchant 120 bébés par an, soit un cas sur 7 000 naissances, les enfants nés en dehors de ces territoires ne peuvent pas bénéficier du traitement dans des délais suffisants pour limiter, voire prévenir, certaines conséquences irréversibles de la pathologie. Rappelons que tous les ans, 60 enfants sont atteints de la forme la plus sévère de l'amyotrophie spinale infantile, qui les tue entre 18 et 24 mois.

Sans ignorer la dimension éthique et sociétale du passage d'un diagnostic biochimique à un diagnostic génétique, ni la réorganisation et le développement de l'organisation et des ressources qu'une telle évolution suppose, l'accélération et l'élargissement du dépistage génétique pour inclure plusieurs maladies simultanément, sachant que certaines d'entre elles doivent être dépistées dans les 10 premiers jours de vie, méritent d'être envisagés dans le cadre du nouveau plan national maladies rares, dit « PNMR4 ». Certes, pour ce faire, les besoins financiers sont importants mais ceux-ci demeurent nettement inférieurs aux économies potentielles en matière de santé.

Ainsi, elle souhaite savoir dans quelles mesures le Gouvernement envisage d'élargir le dépistage néonatal dans le cadre du PNMR4 pour inclure davantage de maladies, comme par exemple le déficit immunitaire combiné sévère (DICS), conformément à la proposition formulée par la Haute autorité de santé à la suite d'une étude pilote réalisée entre 2014 et 2017. Elle demande si, et sous quelles conditions, le dépistage génétique est amené à être accéléré dans les prochaines années, notamment pour l'amyotrophie spinale infantile, alors que des traitements innovants aujourd'hui disponibles permettent de transformer le destin des bébés concernés, voire de sauver des vies, s'il n'y a pas de retard dans la prise en charge.

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Transmise au Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins


Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins publiée le 06/02/2025

Le dépistage néonatal est une des premières mesures de santé publique mises en place en France depuis 1972, avec la détection de la phénylcétonurie. Ce programme national permet de dépister de nombreuses maladies graves et de sauver la vie de nombreux enfants. En 2023 notamment, 1 192 enfants présentant une maladie grave et rare ont été diagnostiqués précocement grâce à ce programme et ont pu être traités rapidement. Depuis 2020, le Gouvernement a lancé une dynamique d'extension de ce programme afin de rattraper notre retard par rapport à nos voisins européens. Ainsi, depuis 2018, 8 maladies ont été ajoutées au programme. Le déficit en acyl-CoA déshydrogénase des acides gras à chaîne moyenne (MCAD) a été intégré à compter du 1er décembre 2020, puis les 7 erreurs innées du métabolisme (déficit primaire en carnitine, l'acidurie glutarique de Type 1, le déficit en 3-hydroxyacyl-coenzyme A déshydrogénase des acides gras à chaîne longue, la tyrosinémie de Type 1, l'acidurie isovalérique, l'homocystinurie et la leucinose) depuis le 1er janvier 2023. L'élargissement du programme de dépistage se poursuit avec le dépistage de la drépanocytose, jusqu'ici réalisé principalement selon l'origine géographique des parents, et qui est généralisé depuis le 1er novembre 2024 à tous les nouveau-nés en France. Des travaux sont en cours pour mettre en oeuvre en 2025 le dépistage de trois nouvelles maladies pour lesquelles la haute autorité de santé a rendu un avis favorable à leur inscription au programme national : - le Déficit immunitaire combiné sévère (DICS) dont l'incidence est estimée à 1/30 000 naissances. Cette maladie est caractérisée par un déficit de l'immunité qui engage le pronostic vital. Une prise en charge précoce par greffe de moelle dans les deux mois qui suivent la naissance de l'enfant en transforme le pronostic ; - le déficit en acyl-coenzyme A déshydrogénase des acides gras à chaîne très longue dont l'incidence s'échelonne entre 1/20 440 (au Japon) et 1/250 000 (en Allemagne) : cette maladie est un trouble de l'oxydation des acides gras. La forme néonatale est très sévère avec une mortalité élevée. Une prise en charge précoce repose sur un apport nutritionnel adapté ; - l'Amyotrophie spinale (SMA) : il s'agit d'une maladie neuromusculaire évolutive et invalidante (incidence estimée à environ 1/7 000 naissances) qui conduit au décès et voit son pronostic transformé grâce aux nouvelles thérapies géniques. Avec le DICS et la SMA, le programme de dépistage néonatal se modernise et entre dans l'ère du dépistage de la génétique, ce qui implique des travaux de préparation à la mise en oeuvre de ces dépistages. Il s'agit notamment de la concertation avec les laboratoires réalisant les dépistages (les centres régionaux de dépistage néonatal) pour connaitre leur besoin en équipement, de la formation et de l'agrément des professionnels pour la réalisation des analyses génétiques. Les filières santé maladies rares s'organisent pour la prise en charge des nouveau-nés atteints de pathologies et l'information des parents. Ce programme national, piloté par la direction générale de la santé et la direction générale de l'offre de soins, s'appuie sur une coordination nationale et des centres de dépistage régionaux pour organiser au mieux les extensions, afin de maintenir une organisation efficace et homogène sur l'ensemble de notre territoire.

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