Question de Mme JACQUEMET Annick (Doubs - UC) publiée le 10/10/2024

Question posée en séance publique le 09/10/2024

M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Annick Jacquemet. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail et de l'emploi. Elle porte sur les règles d'indemnisation des travailleurs frontaliers par l'assurance chômage, en particulier dans les départements de l'est de la France, de la Meurthe-et-Moselle à la Haute-Savoie.

Au Luxembourg et en Suisse, les salaires sont deux à trois fois plus élevés qu'en France. Pour un frontalier licencié, les allocations de chômage, que le droit européen laisse à la charge des pays de résidence, sont financées par l'Unédic, qui perçoit en contrepartie une maigre compensation des pays voisins. Ainsi, dans le département du Doubs, dont je suis élue, la Suisse n'a reversé que 23 % des dépenses assumées par l'Unédic entre 2012 et 2023.

L'effet est double pour nos territoires. D'une part, ces anciens salariés restent souvent longtemps au chômage, alors même que bon nombre d'entreprises et de services publics frontaliers peinent à recruter. D'autre part, compte tenu de leur niveau de vie, ils contribuent au renchérissement du coût du logement.

De surcroît, pour l'Unédic, le manque à gagner à l'échelle nationale est considérable : 800 millions d'euros, rien que pour l'année dernière ; depuis 2011, le surcoût cumulé atteint 9 milliards d'euros.

Mes collègues parlementaires ont, à maintes reprises, alerté les gouvernements successifs à ce sujet, sans succès ; je pense notamment à la question orale posée ici même par Loïc Hervé le 10 avril dernier.

Alors que l'État ponctionne, depuis 2023, une partie des excédents de l'Unédic, et à l'heure où Bercy cherche désespérément des recettes supplémentaires, ne croyez-vous pas, madame la ministre, qu'il est temps de rediscuter avec les pays voisins et, plus largement, avec nos amis européens des règles encadrant l'indemnisation du chômage des frontaliers ? Quand allez-vous sérieusement prendre ce dossier en main ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

- page 3978


Réponse du Ministère du travail et de l'emploi publiée le 10/10/2024

Réponse apportée en séance publique le 09/10/2024

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail et de l'emploi.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du travail et de l'emploi. Madame la sénatrice Annick Jacquemet, vous avez tout dit ! Il s'agit d'un vrai sujet de préoccupation.

La question de l'indemnisation du chômage des travailleurs transfrontaliers relève d'un règlement européen. C'est à ce niveau que nous souhaitons maintenant agir résolument, au regard des chiffres que vous avez cités.

Nous avons déjà pris contact avec la Pologne, qui assurera la présidence du Conseil européen au prochain semestre ; nos partenaires polonais se sont montrés plutôt intéressés, car il faut savoir que la France n'est pas le seul pays concerné par cette question.

Mais il y a des choses que l'on peut faire, d'ores et déjà, à l'échelle nationale.

Premièrement, on peut redéfinir ce qu'est une « offre raisonnable d'emploi ».

M. Loïc Hervé. Très bien !

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. En effet, aujourd'hui, bon nombre de transfrontaliers de retour en France et inscrits à France Travail sont en droit de refuser une offre d'emploi en France au motif qu'elle n'est pas raisonnable au regard des salaires offerts de l'autre côté de la frontière, que ce soit en Suisse ou au Luxembourg. Nous souhaitons revisiter cette question pour que la notion d'« offre raisonnable d'emploi » soit comprise dans le contexte du marché du travail français.

Deuxièmement, les agences France Travail peuvent offrir un accompagnement renforcé aux travailleurs transfrontaliers. Dix-neuf d'entre elles accueillent aujourd'hui l'essentiel des 77 000 travailleurs transfrontaliers. Depuis quelques semaines, elles leur fournissent un accueil spécifique et un accompagnement renforcé, dans un esprit d'incitation à un retour plus rapide sur le marché du travail.

Cela étant dit, madame la sénatrice, croyez à ma réelle détermination en la matière : dans le contexte actuel de nos finances publiques, ce genre de chiffre n'est tout simplement plus acceptable.

M. Loïc Hervé. Il faut y aller vraiment !

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je serai donc heureuse de revenir devant vous dans quelques mois à l'occasion d'une prochaine question pour vous dire où nous en sommes. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)

- page 3978

Page mise à jour le