Question de Mme CORBIÈRE NAMINZO Evelyne (La Réunion - CRCE-K) publiée le 25/07/2024

Mme Evelyne Corbière Naminzo attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la non-application en France de la directive du Parlement européen exhortant les États à ne pas reconnaître le syndrome d'aliénation parentale (SAP) dans leurs pratiques judiciaires.

Théorisé dans les années 1970 par le pédopsychiatre américain Richard Gardner, et non reconnu par la communauté scientifique, le SAP est une construction controversée par laquelle ledit parent aliénant amènerait son enfant à partager des idées fausses sur l'autre parent.

Ainsi, dans les cas d'inceste, il est fréquent que le parent agresseur tienne le parent protecteur pour responsable des plaintes de l'enfant. Souvent, la diffusion de ce concept détourne la responsabilité en dirigeant l'attention contre le parent protecteur, suspecté de manipuler son enfant. Ce concept permet au parent agresseur de discréditer la parole de l'enfant qui révèle l'inceste qu'il subit, et de renverser la culpabilité au détriment du parent protecteur.

Le SAP est dénoncé par plusieurs magistrats, psychiatres et chercheurs, mais aussi par la commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVISE). Dans l'ouvrage collectif « Violences sexuelles, en finir avec l'impunité », le juge pour enfants et ancien président de la CIIVISE souligne que ce concept contribue à occulter les violences dénoncées par les enfants, à l'heure où 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles tous les ans en France.

Dans sa résolution du 6 octobre 2021 sur les conséquences des violences conjugales et des droits de garde sur les femmes et les enfants, le Parlement européen exhorte les États de l'Union européenne « à ne pas reconnaître le SAP dans leur pratique judiciaire et leur droit », avec l'argumentation suivante : « deux des institutions les plus prestigieuses en matière de santé mentale, à savoir l'organisation mondiale de la santé et l'association américaine de psychologie, rejettent le recours à la notion de syndrome d'aliénation parentale et à d'autres notions et expressions du même ordre, car elles peuvent être employées au détriment des victimes de violence pour remettre en cause leurs aptitudes parentales, écarter leurs propos et faire abstraction de la violence à laquelle les enfants sont exposés; (...) les services et acteurs étatiques, y compris par ceux qui décident de la garde des enfants, doivent considérer les accusations d'aliénation parentale portées par des pères abusifs à l'encontre des mères comme la continuation du pouvoir et du contrôle de ces derniers ».

Cependant, cette résolution n'est pas toujours appliquée en France. Pour protéger les enfants victimes d'inceste, elle demande donc au Garde des Sceaux d'en garantir l'application en diffusant une circulaire à ce sujet.

- page 3084

Transmise au Ministère de la justice


La question est caduque

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