Question de M. BOUAD Denis (Gard - SER) publiée le 25/04/2024

M. Denis Bouad attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées concernant la situation financière des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
Alors que selon l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), en 2050 la France comptera 4 millions de seniors en perte d'autonomie, la situation financière des EHPAD publics est aujourd'hui préoccupante. Entre 2019 et 2022, leur déficit a été multiplié par 20. En 2023, ce sont ainsi 75 % des EHPAD publics qui étaient en déficit. Ce contexte budgétaire ne leur permet pas de répondre à l'évolution nécessaire des besoins en personnel soignant et pourrait donc générer une détérioration de la prise en charge des patients.
Aussi, il l'interroge sur une possible aide exceptionnelle à la trésorerie au cours de l'exercice 2024 afin de faire face à l'urgence et, de manière plus générale, à l'ambition que porte le Gouvernement pour le grand âge et le service public de l'autonomie.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé des personnes âgées et des personnes handicapées publiée le 05/06/2024

Réponse apportée en séance publique le 04/06/2024

M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, auteur de la question n° 1249, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées.

M. Denis Bouad. Madame la ministre, les efforts que l'on fournit pour financer l'accompagnement de nos aînés sont, d'une certaine façon, révélateurs de la société que l'on souhaite bâtir.

Alors que l'argument démographique a encore récemment été invoqué pour justifier la réforme des retraites, il semble beaucoup moins pris en compte lorsqu'il s'agit de fixer le montant des enveloppes budgétaires destinées à la prise en charge de la perte d'autonomie.

Selon l'Insee, en 2050, la France comptera 4 millions de seniors en perte d'autonomie. À ce jour, l'État ne semble pas avoir pris la mesure de ce phénomène et les Ehpad publics en subissent malheureusement les conséquences. Entre 2019 et 2022, leur déficit a ainsi été multiplié par vingt. Aujourd'hui, 75 % des Ehpad publics sont en déficit.

Face à une situation financière de plus en plus dégradée, l'ensemble de la profession tire donc la sonnette d'alarme.

Très concrètement, le risque est celui d'une détérioration de la prise en charge des patients. Ne nous trompons pas : vieillir est une chance. Il nous appartient donc collectivement de faire en sorte que cette chance ne se transforme pas en épreuve, voire en cauchemar. Madame la ministre déléguée, comment comptez-vous répondre à l'urgence budgétaire à laquelle doivent faire face les Ehpad publics ?

La semaine dernière, en répondant au député Jérôme Guedj à l'Assemblée nationale, la ministre Catherine Vautrin a finalement reconnu ne pas avoir saisi le Conseil d'État au sujet d'une loi de programmation sur le grand âge. Le Gouvernement s'était pourtant engagé à faire voter une telle loi, qui est essentielle tant pour les professionnels du secteur que pour l'ensemble des Français, chacun étant forcément confronté un jour ou l'autre à son propre vieillissement ou à celui de ses proches.

Madame la ministre, où en est ce projet de loi ? De manière plus générale, quelle est l'ambition du Gouvernement pour ce qui concerne le grand âge et le service public de l'autonomie ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées. Monsieur le sénateur, immédiatement après ma prise de fonction, je me suis attelée à bien comprendre les difficultés budgétaires que rencontrent les Ehpad publics et associatifs, dont les tarifs d'hébergement sont fixés par le département au titre de l'habilitation à l'aide sociale.

Je tiens à rappeler que l'État et les départements se partagent les compétences relatives au grand âge.

Tout d'abord, ces difficultés s'expliquent par un financement insuffisant de la section hébergement, c'est-à-dire la part qui est payée par les résidents, les tarifs n'ayant pas suivi l'inflation. Comme les fédérations, j'ai donc appelé les départements à augmenter les tarifs de l'hébergement, tout en instaurant des garde-fous pour préserver les plus modestes dans le cadre de la loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie, dite loi Bien Vieillir. Par ailleurs - je le rappelle, car c'est une réalité -, les pensions de retraite ont été revalorisées à hauteur de 5,3 % rien que pour l'année 2024, précisément pour répondre à l'inflation.

Ensuite, la section dépendance fait également face à des déficits importants. Là aussi, je soutiens l'appel des fédérations à augmenter les financements pour les aligner sur l'inflation. De très nombreux départements ont d'ailleurs pratiqué une telle hausse en 2024 et je tiens à saluer leur engagement et le courage politique dont ils ont fait preuve - il convient de le relever.

J'ai proposé aux départements d'aller encore plus loin en fusionnant les sections afin de simplifier et d'égaliser la prise en charge des résidents sur le territoire. Comme je l'ai dit précédemment, vingt-trois départements se sont portés volontaires et se partageront une enveloppe à cet effet.

Bien que les données confirment que la section soins, qui est à la charge de l'État, est équilibrée et même légèrement excédentaire, je sais que certains Ehpad rencontrent des difficultés. Celles-ci sont notamment liées à un recours forcé et récurrent à l'intérim, qui coûte cher aux établissements.

Aussi la loi visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels, dite loi Valletoux, interdit-elle à certains établissements de recourir à l'intérim en sortie d'école, ce qui permettra par ailleurs de fidéliser les équipes et d'améliorer la qualité de l'accompagnement.

M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour la réplique.

M. Denis Bouad. Madame la ministre, j'habite le septième département le plus pauvre de France. Ce n'est pas en revalorisant de 5 % des retraites de 800 euros que nous comblerons le déficit.

Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée. Ni en augmentant les aides sociales !

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