Question de M. DHERSIN Franck (Nord - UC-A) publiée le 22/02/2024

M. Franck Dhersin interroge M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité au sujet de l'interdiction de la pêche dans 13 zones britanniques, soit sur quelques 4 000 kilomètres carrés.
A partir 22 mars 2024 au motif de la préservation d'espèces protégées, l'organisation de gestion marine britannique (marine management organization) a décidé l'interdiction de la pêche professionnelle au moyen d'engins remorqués dans 13 zones au sein des eaux britanniques dans la Manche. Entré en vigueur le 1er janvier 2021, l'accord de commerce et de coopération conclu entre le Royaume-Uni et l'Union européenne prévoit pourtant la garantie de l'accès des eaux britanniques aux pêcheurs professionnels européens avec réduction de leurs captures de 25 % d'ici à 2026, en contrepartie de l'accès des pêcheurs britanniques au marché européen.
Par ailleurs et en dépit des interventions de la Commission européenne auprès du Royaume-Uni, un certain nombre de pêcheurs professionnels français n'ont toujours pas obtenu leur licence de pêche de la part du Royaume-Uni. Il est vrai que lors des négociations sur le Brexit, les pêcheurs britanniques ambitionnaient d'obtenir l'interdiction de la pêche dans les eaux britanniques de la part de pêcheurs d'autres pays.
Cette interdiction de pêche dans 13 zones britanniques à partir du 22 mars 2024 ne semble pas relever de la seule préoccupation de la biodiversité. Selon l'Ifremer, en 2022, 63 % de la pêche française en mer Manche et en mer du Nord est issue d'une pêche durable. En revanche, cette interdiction hypothèquera gravement la vitalité du port de Boulogne-sur-Mer, premier port de pêche français, en particulier la pêche à l'encornet.
A l'heure où la France importe les deux tiers du poisson qu'elle consomme, la pérennité d'une filière halieutique française est une question de souveraineté alimentaire.
Il l'interroge sur l'intervention du Gouvernement auprès de l'Union européenne, afin d'obtenir des autorités britanniques l'autorisation pour la pêche professionnelle française artisanale de continuer à exercer leur métier, dans le respect de la biodiversité.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité publiée le 06/06/2024

En tant qu'Etat côtier indépendant de l'UE, le Royaume-Uni entreprend depuis 2020 de consolider son réseau d'aires marines protégées en limitant dans certaines zones l'activité des navires de pêche, quel que soit leur pavillon. Ces mesures vont dans le sens des engagements internationaux pris par le Royaume-Uni comme par la France pour une meilleure protection des océans. Cependant, elles doivent se faire en pleine conformité avec l'Accord de Commerce et de Coopération (ACC) issu du Brexit qui dispose que les mesures mises en oeuvre doivent être non discriminatoires et proportionnées. Récemment, les autorités britanniques ont adopté un décret interdisant la pêche avec engins traînants de fonds dans 13 aires marines protégées (AMP) à compter du 22 mars 2024. Ces restrictions ont fait l'objet d'une analyse minutieuse par les services administratifs, en lien avec les scientifiques et le professionnel concernés. Les conclusions de ces travaux ont été transmises à la Commission européenne, seule compétente en la matière pour juger de la conformité de ces mesures avec l'Accord de Commerce et de Coopération (ACC). A ce stade, la Commission reconnaît la portée significative de ces restrictions sur les navires européens et français. Toutefois, les impacts socio-économiques de ces mesures ne sont, selon la Commission, pas suffisants pour caractériser une discrimination au sens de l'ACC. Il convient d'indiquer que la France reste pleinement mobilisée sur ce sujet : associée à d'autres mesures du même type, la dynamique britannique fait craindre une restriction progressive de l'accès des navires de l'UE aux eaux et aux ressources de pêche britanniques, en dépit de l'Accord de commerce et de coopération (ACC). Dans ce contexte, la France a multiplié les actions diplomatiques pour faire part de sa profonde préoccupation quant aux mesures britanniques en vigueur ou à venir, et rappelé que la désignation de sites protégés, et l'adoption de mesures à leur échelle, nécessitaient une réflexion commune avec l'ensemble des acteurs concernés. Soutenue par plusieurs délégations dont le Danemark et l'Irlande, la France a par ailleurs demandé à la Commission européenne, lors du Conseil des affaires générales le 19 mars et lors du Conseil informel des ministres de la pêche le 25 mars, de présenter une analyse technique de l'effet de l'ensemble de ces mesures sur les flottes européennes et françaises, ainsi qu'une analyse juridique individuelle et au global de leur conformité à l'ACC. Suite à cette demande, un courrier des Ministres européens compétents, à l'initiative de la France, a été adressé au Commission Sinkevicius pour enjoindre la Commission a engager des échanges techniques sur ce volet avec le Royaume-Uni. A la suite de cela, un échange technique entre les deux parties s'est opéré lors du Comité Spécialisé des Pêches des 20-23 mai 2024. Enfin, concernant l'attribution des licences de pêche pour les navires français dans les 6-12 miles britanniques, il convient d'indiquer que l'ensemble de navires éligibles, et en ayant fait la demande, ont à ce jour obtenu leur licence.

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