Question de M. JADOT Yannick (Paris - GEST) publiée le 14/12/2023
M. Yannick Jadot attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les risques sanitaires et environnementaux liés à l'installation d'une usine de roche de laine dans le Soissonnais.
La rénovation énergétique est une priorité pour atteindre nos objectifs climatiques et lutter contre la précarité énergétique. Mais s'il est urgent d'accélérer massivement la rénovation de nos bâtiments, cela doit se faire en cohérence avec les besoins de nos territoires et dans le respect absolu de la santé de nos concitoyens.
Il existe aujourd'hui un projet d'usine de laine de roche dans la commune de Courmelles, au coeur du territoire Soissonnais. Un projet industriel qui pose question quant à son impact sanitaire et environnemental. Lancé en 2018, il fait face à une vive opposition de la part d'habitants et d'élus locaux, qui se sont constitués en un collectif pour interpeller les décideurs publics. Ils sont mobilisés depuis septembre 2020 afin de trouver une alternative au projet d'usine de laine et des risques qui l'accompagnent, et ont déposé divers recours, souvent soutenus par des élus locaux, y compris de la majorité présidentielle.
La production de laine de roche est en effet loin d'être sans incidences pour le territoire et ses habitants. Plus de 900 tonnes de polluants atmosphériques, dont certains cancérigènes, pourraient contaminer chaque année les quelque 50 000 habitants de l'agglomération et les terres agricoles environnantes. Cela ferait de l'usine Rockwool une des 10 usines les plus polluantes de France (la 2ème pour le phénol, la 3ème pour le formaldéhyde, la 6ème pour l'ammoniac), selon les données du site officiel « Géorisques ». Dans ces rejets, on trouve 173 tonnes de « poussière », des particules fines de 2,5 à 10 microns, qui ont des effets majeurs sur la qualité de l'air et la santé humaine.
Une première enquête publique a rendu un avis défavorable, en raison notamment du principe de précaution. La direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) Hauts-de-France a pourtant donné par la suite un avis positif à la demande d'autorisation environnementale, en avril 2021. De nombreuses voix se désespèrent de voir la santé des habitants du Soissonnais sacrifiée sur l'autel d'un développement économique marginal (130 emplois directs, soit 3 emplois à l'hectare alors que la moyenne à l'hectare des entreprises déjà installées sur le plateau est de 20 à 25 emplois). Si le développement économique de l'agglomération est une priorité, le collectif Rockwool et les élus du territoire souhaiteraient qu'un projet économique alternatif puisse émerger.
Il lui demande quelle réponse entend donner le Gouvernement à l'inquiétude croissante et légitime des habitants du Soissonnais, et à la mobilisation du collectif Stop Rockwool et des élus locaux contre le projet d'usine Rockwool.
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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 02/02/2024
Réponse apportée en séance publique le 01/02/2024
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, auteur de la question n° 979, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Yannick Jadot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous savons combien la rénovation énergétique est une priorité pour nos objectifs climatiques, pour les enjeux de consommation d'électricité et d'énergie et de pouvoir d'achat et en général, et nous savons combien cette transition écologique peut être un très puissant vecteur de réindustrialisation.
Je veux évoquer le projet d'usine de laine de roche dans la commune de Courmelles, au coeur du territoire soissonnais, dans l'Aisne.
Ce projet industriel, lancé en 2018 par Rockwool, une entreprise connue par ailleurs à travers le monde pour ses pratiques peu vertueuses, pose de nombreuses questions du fait de son impact sanitaire et environnemental.
L'opposition locale est très forte : des citoyennes, des citoyens et des élus locaux se sont constitués en collectif d'associations, pour interpeller les décideurs et alerter sur les risques qui accompagnent le projet Rockwool. Depuis plusieurs années, ils se mobilisent pour porter un projet de substitution.
Ils ont déposé plusieurs recours, soutenus par les élus locaux, y compris par ceux de la majorité présidentielle, et par de nombreux agriculteurs, très inquiets pour leur production et la pollution de leurs terres.
On le sait, la laine de roche a des incidences parfois très lourdes. Ce n'est pas forcément un produit d'avenir, et certaines villes l'interdisent désormais. Son utilisation est potentiellement cancérigène, suscitant de grandes inquiétudes dans la cuvette du Soissonnais.
Selon les données officielles du site Géorisques, l'usine Rockwool deviendrait l'une des dix plus polluantes de France - la deuxième pour le phénol, la troisième pour le formaldéhyde et la sixième pour l'ammoniac. Elle rejetterait 173 tonnes de poussière, ce qui serait très dangereux pour la santé de l'ensemble des habitantes et des habitants de ce beau pays.
Une première enquête publique s'était montrée négative, mais, de fait, la préfecture de l'Aisne a autorisé ce projet.
Monsieur le ministre, nous vous demandons d'écouter les habitantes et les habitants, les acteurs économiques, les agriculteurs et les élus de ce territoire, qui appellent de leurs voeux une solution de rechange. Au demeurant, celle-ci serait bien plus créatrice d'emplois que ce très dangereux projet Rockwool !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Jadot, vous évoquez un sujet complexe.
Tout d'abord, notre pays importe des isolants en laine de verre. À cet égard, l'idée qu'il vaut mieux produire qu'importer revêt une certaine logique, sur le plan tant économique qu'écologique.
Ensuite, vous faites état d'une contestation locale, ce qui correspond à une réalité, mais la validation de ce projet, à l'issue d'une procédure longue et pour laquelle je ne suis d'ailleurs pas totalement certain que l'intégralité des recours et des procédures ait d'ores et déjà été évoquée, est également avérée.
Avec ce projet, on doit respecter des procédures relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), des interventions de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), des suivis à divers niveaux, des évaluations techniques, des avis de conformité, des évaluations de risques sanitaires, de valeur limite de rejets et de consommation d'eau. Or, sur tous ces éléments, à chaque fois, il y a eu, in fine, des avis de conformité ou des décisions favorables.
Dans le même temps, comme vous l'avez dit, le lien avec la rénovation énergétique est évident. Nous avons besoin d'avancer sur ce sujet, donc de disposer des moyens d'isolation thermique qui nous permettront de respecter nos objectifs de baisse d'émissions de gaz à effet de serre sur le territoire.
J'entends votre question, monsieur le sénateur. Elle rejoint d'autres courriers que j'ai reçus au cours de ces derniers jours et que je suis en train d'étudier. Voilà ce que je peux vous dire ce matin.
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