Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE-K) publiée le 07/12/2023
M. Fabien Gay attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement, sur l'interdiction faite aux préfets d'attribuer aux personnes bénéficiant du droit au logement opposable un logement social dans les quartiers prioritaires de la ville.
Le 27 octobre 2023, la Première ministre annonçait son intention de donner comme consigne aux préfets l'impossibilité d'attribuer des logements aux ménages reconnus éligibles au droit au logement opposable (DALO) dans les quartiers prioritaires, et l'interdiction d'y créer de nouvelles places d'hébergement.
En 2022, ce sont près de 35 000 personnes qui ont obtenu la reconnaissance de ce droit, s'ajoutant à une file active de 93 000 personnes qui restent toujours en attente d'un relogement, en grande majorité en région parisienne.
Cette mesure concernerait uniquement les bénéficiaires du DALO les plus démunis, par exemple ceux qui sont sans emploi. Cette annonce, en réaction aux émeutes qui se sont déroulées sur l'année 2023, a été présentée comme une mesure tendant à favoriser la mixité sociale.
Dans un contexte d'explosion des demandes de logements sociaux, et alors que le nombre de personnes sans-abri n'a de cesse d'augmenter, cette décision inquiète élus et représentants associatifs.
En Seine-Saint-Denis, notamment, cette mesure risque d'empêcher de nombreux ménages de s'installer sur le territoire, seules 7 villes sur 40 ne comportant pas de quartiers classés en politique de la ville. Pour des villes comme Aubervilliers ou La Courneuve, ces quartiers recouvrent une majeure partie de la commune.
Afin de favoriser la mixité sociale de manière effective, de nombreux autres leviers pouvaient être actionnés.
La Première ministre n'a en particulier rien annoncé quant au renforcement des obligations de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, alors que près de 1 100 communes ne s'y conforment toujours pas. En Seine-Saint-Denis, 8 villes sur 40 se trouvent dans cette situation.
Plus encore, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté dispose qu'au moins un quart des logements sociaux hors quartier prioritaire de la ville doivent être consacrés aux 25 % des demandeurs disposant des ressources les plus faibles. D'après une étude de l'agence nationale de contrôle du logement social de juin 2021, ces attributions n'atteignaient que 15,5 % au niveau national et seules 8 % des intercommunalités concernées par la réforme atteignent le seuil fixé par la loi (ce chiffre tombant même à 4 % sur les territoires en zones tendues).
Enfin, le relogement des ménages bénéficiant du DALO ne doit pas reposer sur le seul contingent de logements sociaux de l'État. Les communes, et les bailleurs sociaux notamment sont aussi tenus de consacrer un quart de leurs attributions aux ménages prioritaires, mais cette obligation reste encore très largement non respectée.
Ainsi, comme le soulignait le directeur des études pour la fondation Abbé Pierre, cette mesure, seule, risque d'emporter des effets très négatifs à l'égard des bénéficiaires du DALO avec une restriction d'accès des plus précaires aux logements en quartiers pauvres, au lieu de favoriser leur accès aux quartiers plus aisés.
Il souhaiterait donc savoir si le Gouvernement entend modifier cette consigne donnée aux autorités préfectorales, et s'il est prévu de demander aux préfets un renforcement du contrôle des obligations nées de la loi SRU et de la loi « égalité et citoyenneté ».
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Transmise au Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement
Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement publiée le 18/04/2024
Le Gouvernement souhaite favoriser la mixité sociale dans les quartiers politiques de la ville. Partant du constat qu'une majorité de ménages fragiles se voient attribuer un logement social dans ces quartiers, la Première ministre a annoncé son intention d'y diversifier l'offre de logements pour y accueillir d'autres populations. Il s'agit ainsi d'éviter de concentrer les ménages les plus pauvres dans ces quartiers dont les ménages bénéficiaires du droit au logement opposable (DALO) les plus en difficulté. Ces ménages doivent se voir proposer un logement correspondant à leurs ressources en dehors des quartiers prioritaires de la ville (QPV) et ainsi favoriser les objectifs de mixité sociale. Il n'est pas question pour le Gouvernement de revenir sur cette consigne. En outre, consigne a été donnée aux préfets de rééquilibrer la structure des loyers du parc social notamment par l'adaptation des loyers issus de la convention APL grâce à la nouvelle politique des loyers (NPL) et la politique de loyers dérogatoires (PLD). Ces mécanismes permettent de modifier la structure des loyers dans le parc social ainsi que l'offre nouvelle en logements de type PLUS pour laquelle 30% au moins de ces logements sociaux doivent être réservés aux ménages sous plafonds PLAI. Cette nouvelle politique des loyers doit permettre notamment d'atteindre l'objectif de 25% des demandeurs du premier quartile en dehors des quartiers de la politique de la ville. De plus, le cadre de la loi SRU est appliqué, avec la carence des communes n'ayant pas atteint leurs objectifs.
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