Question de Mme DARCOS Laure (Essonne - Les Républicains) publiée le 05/10/2023
Mme Laure Darcos appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l'enseignement et de la formation professionnels sur les conséquences particulièrement graves de la régulation renforcée du montant des niveaux de prise en charge des formations professionnelles en apprentissage. Une nouvelle étape de la révision à la baisse des coûts-contrats s'inscrivant dans le cadre général de la politique de réduction des dépenses de l'opérateur France compétences est intervenue le 8 septembre 2023, mettant en péril l'existence même des centres de formation d'apprentis. La faculté des métiers de l'Essonne, plus grand centre de formation en alternance du sud francilien, verra son financement se rétracter de 1,5 M euros en année pleine. Or, cette réduction de financement intervient alors que les charges liées aux formations des domaines de l'alimentaire, de l'industrie et du bâtiment, très consommatrices de ressources (énergies, consommables, matières premières...) croissent de manière exponentielle. Elle aura pour conséquence de générer des résultats d'exploitation déficitaires, d'obérer les capacités d'investissement et de rénovation des plateaux techniques et de diminuer la capacité d'accompagner les jeunes, notamment les plus fragiles, issus des quartiers de la politique de la ville et décrocheurs. Le centre de formation d'apprentis dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP CFA) Île-de-France de Brétigny-sur-Orge subit également une diminution significative de son financement. Alors que l'État a fait de l'apprentissage une voie d'excellence pour l'insertion professionnelle des jeunes, elle l'alerte sur la menace pesant à court terme sur l'offre de formation et sur le risque de ne pouvoir atteindre l'objectif d'un million de nouveaux contrats annuels d'ici la fin du quinquennat. Aussi, elle lui demande de bien vouloir considérer l'inquiétude des acteurs de terrain et prendre les mesures correctrices qui s'imposent.
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Réponse du Ministère auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargé de l'enseignement et de la formation professionnels publiée le 06/12/2023
Réponse apportée en séance publique le 05/12/2023
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, auteure de la question n° 826, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l'enseignement et de la formation professionnels.
Mme Laure Darcos. Madame la ministre, l'apprentissage connaît des moments très difficiles. La régulation du montant des niveaux de prise en charge des formations professionnelles en apprentissage menace l'existence même de nos centres de formation d'apprentis (CFA), alors que le Gouvernement souhaite atteindre 1 million de contrats en 2027. Quel paradoxe !
En Essonne, la faculté des métiers gère le plus grand centre de formation en alternance du sud francilien. Elle forme chaque année 2 900 apprentis dans huit filières relevant du commerce, de l'industrie et de l'artisanat.
Cinquante-trois formations sur soixante-neuf et 90 % des effectifs vont être affectés par la baisse des niveaux de prise en charge avec une perte sèche de financement de 1,5 million d'euros en année pleine.
Pour la faculté des métiers, les résultats d'exploitation s'annoncent donc déficitaires. C'est aussi pour elle une moindre capacité à investir et à rénover les plateaux techniques, sans parler des conséquences sur l'accompagnement des jeunes, notamment les plus fragiles, issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville, qui seront nécessairement pénalisés.
Tous nos CFA, notamment celui du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) de Brétigny-sur-Orge, subiront les conséquences de cette politique d'économies alors que les charges liées aux formations sont souvent très consommatrices de ressources énergétiques et de matières premières, dont le coût a crû de manière exponentielle.
Il est urgent de tenir compte des réalités du terrain, faute de quoi, au moment où de nombreux pans de l'économie manquent de compétences, une part importante de l'offre de formation prisée par les entreprises disparaîtra des territoires, et les pénuries de main-d'oeuvre, dont l'appareil productif du pays a tant besoin, s'aggraveront.
Quels engagements le Gouvernement est-il prêt à prendre pour un juste financement de l'apprentissage ? Le prélèvement sur les recettes de l'Unédic au profit de France Compétences permettra-t-il de faire revenir vers l'apprentissage les ressources qui lui font actuellement tant défaut ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l'enseignement et de la formation professionnels. Madame la sénatrice Darcos, la politique volontariste de soutien à l'apprentissage a permis de multiplier par 2,5 le nombre d'apprentis dans l'Essonne, et par près de 3 en France. L'Île-de-France est motrice pour la formation par l'apprentissage, puisqu'un quart des contrats d'apprentissage sont conclus dans cette seule région.
Nous devons ce succès croissant depuis 2018 à un niveau d'investissement inédit dans l'apprentissage et, plus largement, dans la formation de nos jeunes. Il est également inédit d'avoir apporté une telle modalité de financement : gratuité de la formation et aide de 6 000 euros pour les entreprises ; j'ai souhaité que cette aide soit simple et lisible pour toutes les entreprises.
Les résultats sont là, puisque sept apprentis sur dix réussissent à s'insérer dans l'emploi ; c'est pour nous une boussole importante de notre politique. Dans certains métiers en tension, notamment ceux de l'artisanat, le taux d'insertion va jusqu'à 80 % ; c'est dire à quel point l'apprentissage est une réussite.
Notre objectif est simple : garantir aux CFA un juste niveau de financement pour fonctionner correctement, tout en prévenant les marges excessives. Or, à ce jour, le taux de marge est en moyenne de 15 %. C'est pourquoi nous travaillons à faire baisser le niveau de prise en charge des contrats.
La fixation du niveau de financement n'est - je tiens à le rappeler - ni arbitraire ni politique. Elle dépend d'une méthode fondée sur l'observation des coûts réels engagés par les CFA, que France Compétences analyse chaque année ligne par ligne. En 2022 et 2023, nous avons ainsi mis au jour des écarts qui étaient encore importants dans certaines formations entre le niveau de subventionnement et le coût réel de la formation.
Nous visons un objectif de juste prix dans le cadre de notre politique globale visant à atteindre un million d'apprentis par an.
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.
Mme Laure Darcos. Le Sénat examinera cet après-midi les crédits de la mission « Travail et emploi ». Le groupe Les Indépendants - République et Territoires appelle le Sénat à approuver le transfert de l'Unédic vers France Compétences. Nos CFA en ont besoin.
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