Question de Mme de CIDRAC Marta (Yvelines - Les Républicains) publiée le 27/07/2023
Mme Marta de Cidrac interroge M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer concernant les nuisances sonores sous-marines. En 1956, le commandant Jacques-Yves Cousteau réalisait un documentaire intitulé « Le monde du silence », ayant pour objet l'observation du monde sous-marin. Ce temps semble aujourd'hui révolu, car nos mers et nos océans sont touchés par une pollution bien connue du monde terrestre : le bruit. La cause principale : l'augmentation du trafic maritime mondial, à laquelle s'ajoute l'augmentation des tonnages et de la vitesse, véritables facteurs aggravants. Durant les cinq dernières décennies, les émissions sous-marines basse fréquence ont donc été multipliées par 32, rendant la vie sous-marine infernale. Les conséquences sur la biodiversité sont majeures et ont déjà un impact significatif sur les zones de pêche et la préservation de certains écosystèmes. Deuxième domaine maritime mondial, la France doit prendre sa place dans le règlement de ce problème. Elle aimerait savoir si des mesures sont d'ores et déjà envisagées, et si oui lesquelles. De la même façon, elle lui demande si la France demandera à faire évoluer la directive 2008/56/CE dite « Stratégie pour le milieu marin ».
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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer publiée le 16/11/2023
La vitesse des navires professionnels affectés à des activités de transport de passagers ou de marchandises est un sujet relevant à la fois de la sécurité maritime, de la prévention des rejets dans l'air et de la préservation de la biodiversité marine. À ce titre, la réglementation susceptible de s'appliquer en la matière est diverse. S'agissant de la sécurité maritime, les autorités administratives en mer et dans les ports fixent des limites de vitesse d'application stricte lorsque les lieux ou des circonstances particulières l'exigent. Des limites particulières de vitesse existent donc déjà en de nombreux endroits, elles sont locales et répondent à des impératifs de sécurité. S'agissant de la prévention des rejets dans l'air, la France a soumis une proposition au groupe de travail intersessions sur la réduction des gaz à effet de serre par les navires de l'Organisation maritime internationale (OMI) tendant à adopter un schéma d'encadrement de la vitesse des navires marchands. Faute de soutien par un nombre suffisant de pays, ce projet n'a pas encore pu être suivi d'effet. Il n'en demeure pas moins que les mesures contraignantes que l'OMI adoptera d'ici 2025, tout comme celles issues du règlement européen Fuel EU Maritime, pourront conduire par effet induit à une baisse de la vitesse commerciale des navires. Enfin, la feuille de route de décarbonation du secteur maritime construite par la filière maritime considère une baisse de vitesse moyenne de 15% en 2050 comme atteignable et viable économiquement et servira de base à la poursuite des efforts communs du secteur. S'agissant de la préservation de la biodiversité marine, le 7 juillet 2023, l'OMI a adopté la création d'une zone maritime particulièrement vulnérable (ZMPV) en Méditerranée Nord-Occidentale. Une ZMPV est une zone qui, en raison de l'importance reconnue de ses caractéristiques écologiques, socio-économiques ou scientifiques et de son éventuelle vulnérabilité aux dommages causés par les activités des transports maritimes internationaux, bénéficie d'une protection internationale particulière. Cette ZMPV a vocation à améliorer la protection des grands et moyens cétacés (les rorquals communs et les cachalots) contre le risque de collisions avec les navires par la mise en place de mesures volontaires de protection. Les prescriptions qui en découlent sont applicables aux navires de commerce et yachts de plaisance d'une jauge brute égale ou supérieure à 300. Elles prévoient une limitation de la vitesse entre 10 et 13 noeuds à titre de mesure de réduction volontaire de la vitesse lorsque des grands ou moyens cétacés ont été détectés ou signalés. Aussi, à la suite de la détection de grands ou moyens cétacés, le maintien d'une distance de sécurité appropriée est proposé. Les navires pourront également signaler par les communications en ondes métriques ou tout autre moyen disponible dans la zone, l'emplacement des moyens et grands cétacés observés ou détectés et transmettre les renseignements et la position aux autorités côtières. Ces renseignements pourront ensuite être transmis à la base de données mondiale de la Commission baleinière internationale (CBI) sur les collisions entre cétacés et navires. La zone s'étend des eaux espagnoles (couvrant le couloir de migration des cétacés) aux eaux italiennes (mer de Ligurie), et incluant le littoral méditerranéen français et monégasque (englobant ainsi le sanctuaire Pelagos). Elle prend en compte la capacité des cétacés à couvrir de longues distances et leur forte concentration dans la région. Il est à noter que dans le cadre de la gouvernance du Sanctuaire Pelagos en Méditerranée, la présidence française a souhaité renforcer les mesures contre le bruit sous-marin. Cette adoption conclut un vaste cycle de travaux initié en 2020 par la France, l'Italie, Monaco et l'Espagne, à travers des consultations internationales et nationales avec les parties prenantes (États côtiers, associations et ONG environnementales, représentants du monde maritime) et au sein de l'OMI. Ces quatre États se sont accordés sur une mise en oeuvre par les États côtiers en début d'année 2024, à l'issue d'un délai de préparation de six mois après l'adoption de la résolution de l'OMI en session plénière durant lequel les armateurs seront sensibilisés, les procédures de signalements seront affinées et la coordination entre les États côtiers sera assurée. Par ailleurs, il est démontré que la pollution sonore sous-marine, dont la moitié est générée par le secteur de la navigation commerciale, est préjudiciable aux espèces marines. La France a activement participé cette année à l'adoption dans le cadre de l'OMI des recommandations révisées sur le bruit sous-marin provenant du transport maritime. Celles-ci développent un plan de gestion du bruit à l'attention des compagnies maritimes et de l'ensemble de la chaîne de production et d'exploitation des navires. Ce plan s'appuie sur une approche en quatre étapes : (1) définir le niveau de bruit individuel du navire, (2) fixer des objectifs de seuils de bruit à ne pas dépasser pour des vitesses données, (3) cibler les mesures de réduction applicables au navire et à son utilisation, (4) évaluer l'efficacité de ces mesures par modélisation et test réel puis ajuster au besoin. L'enjeu de cette révision réside dans sa mise en oeuvre pour l'ensemble des parties prenantes et une phase de renforcement de l'expérience a été lancée par l'OMI jusqu'en 2025 pour rendre le plan de gestion plus opérationnel. La France co-organisera, au mois de septembre 2023, un atelier avec le Canada et les États-Unis afin d'évaluer les avantages et les inconvénients potentiels des mesures visant à accroître l'efficacité énergétique d'un navire et à réduire le bruit sous-marin.
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