Question de M. CABANEL Henri (Hérault - RDSE) publiée le 06/07/2023

M. Henri Cabanel attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique au sujet de la directive « corporate sustainability reporting directive » (CSRD) et de ses conséquences pour la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) en France et en Europe.

Les États membres de l'Union européenne sont actuellement invités à produire leurs commentaires sur la directive CSRD dont la Commission européenne adoptera une version détaillée sous la forme d'un acte délégué à la suite de cette consultation.

La directive CSRD assujettit les entreprises européennes à un reporting extra-financier exhaustif et normé, assis sur plusieurs indicateurs standardisés dits ESRS (european sustainability reporting directive).

Les déclarations doivent rendre compte de l'incidence des risques environnementaux, sociaux et sociétaux sur l'activité de l'entreprise, et d'autre part mesurer l'impact de l'activité de l'entreprise sur ces mêmes facteurs.

La Commission européenne a confié à l'EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group) l'élaboration des normes de reporting extra-financier qui seront exigées dans ce cadre. Or, confier cette tâche aux professions de la comptabilité risque de faire de la culture du chiffre le coeur du reporting, reléguant au second plan les questions de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), alors même que les normes volontaires ISO font déjà office de langage commun.

Les instances de normalisation volontaire, au premier rang desquelles AFNOR en France, ont en effet produit des référentiels internationalement définis et reconnus. Ces méthodes robustes constituent des leviers de performance responsables pour les entreprises.

Par ailleurs, l'EFRAG représente en Europe le système international de normalisation comptable, que les États-Unis ont imposé au reste du monde.

La directive CSRD constitue une étape importante dans le renforcement de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, sujet majeur au coeur des engagements européens de la France.

Il apparaît dès lors indispensable que la directive CSRD ne se réduise pas à un exercice comptable, basé sur une vision américaine à rebours de la souveraineté normative, là où elle pourrait offrir un cadre propice au rayonnement d'un modèle d'entreprise durable européen.

La France est invitée à produire ses commentaires sur les actes délégués de la directive CSRD, en amont des travaux de transposition.

C'est pourquoi il lui demande la position du Gouvernement à l'égard des travaux de l'EFRAG et des normes européennes de reporting extra-financier.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 11/01/2024

La directive UE 2022/2464 dite Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) a été transposée en droit français au travers d'une ordonnance publiée le 7 décembre 2023 au Journal officiel. Elle prévoit la publication obligatoire et normée d'états de durabilité par les entreprises européennes. Les grandes entreprises au sens de la directive comptable européenne de plus de 500 salariés seront tenues de publier des états de durabilité sur l'exercice 2024 à partir du 1er janvier 2025. Cette obligation concernera ensuite les entreprises de cette même catégorie, de plus de 250 salariés. Une norme obligatoire pour les PME cotées et une norme volontaire pour les PME sont en cours d'élaboration. Les informations publiées sont définies par les European Sustainability Reporting Standards (ESRS) proposés par la Commission européenne sur la base d'un avis technique de l'European Financial Reporting Advisory Group (EFRAG). Les normes trans-sectorielles ont été publiées le 31 juillet 2023 par la Commission européenne. Elles ont été approuvées par le Conseil de l'Union européenne et le Parlement européen. Ces normes, qui présentent plus de mille points de données soumis à analyse de matérialité, couvrent le champ du climat, de la pollution, des ressources marines et de l'eau, de la biodiversité, de l'économie circulaire, d'informations relatives aux travailleurs salariés et non-salariés, à la chaîne de valeur et aux groupes sociaux affectés par l'activité de l'entreprise. Elles présentent également les dispositions en matière de gouvernance de durabilité des entreprises. Avec l'obligation de publication des états de durabilité prévue par CSRD et la définition des ESRS, l'Union européenne s'est dotée d'un cadre d'information de durabilité obligatoire, couvrant l'ensemble des enjeux environnementaux et sociaux, selon une logique de double matérialité. Celui-ci constituera pour les entreprises un outil de gestion stratégique lié aux enjeux de transition et d'adaptation environnementale ainsi qu'un moyen pour les acteurs financiers d'évaluer précisément leur contribution au financement de la transition. La publication des états de durabilité permettra également aux pouvoirs publics et aux différentes parties prenantes de bénéficier d'informations normées, solides et comparables en matière de durabilité. La mise en place de ce cadre est le résultat d'un important travail. Pour préparer son avis technique, l'EFRAG a mobilisé l'ensemble des parties prenantes. La participation active des représentants des entreprises, auditeurs, régulateurs, syndicats et organisations non gouvernementales (ONG) a été une condition de la qualité du travail technique effectué. La Commission européenne s'est ensuite appuyée sur l'avis technique de l'EFRAG pour proposer les normes par acte délégué, associant à chaque étape les Etats membres et le Parlement qui les ont approuvées. Les obligations de la CSRD s'appliqueront à partir de 2028 aux entreprises de pays-tiers. Cette dimension d'extra-territorialité du cadre d'information de durabilité européen en fait un vecteur important de souveraineté européenne et assure à l'Union européenne de conserver une pleine capacité de normalisation en matière d'information de durabilité.

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