Question de Mme GACQUERRE Amel (Pas-de-Calais - UC) publiée le 15/06/2023
Mme Amel Gacquerre attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les risques liés à la consommation excessive de sucre chez l'enfant.
Ces derniers mois, plusieurs médias ont alerté sur la consommation de boissons sucrées au biberon par des enfants âgés entre 0 et 60 mois. En 2019, un rapport de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) indiquait dans ce sens que 75 % des enfants âgés de 4 à 7 ans avaient une consommation de sucre excessive.
Les conséquences de l'ingestion de sucre chez un jeune enfant sont dramatiques : développement de caries précoces, déminéralisation de l'émail, douleurs dentaires, dents cariées, absentes ou obturées. La carie précoce chez l'enfant a également des conséquences sociales et familiales qui peuvent être lourdes : retards de développement, baisse de la qualité de vie, difficultés à s'alimenter ou à dormir, difficultés d'élocution...
L'ingestion de boissons sucrées chez l'enfant est étroitement corrélée aux inégalités sociales et territoriales. Dans une thèse portant sur le service d'odontologie du centre hospitalier universitaire de Lille, une dentiste estime que 20 % de la population française concentre 80 % des problèmes de dentition. Dans la région des Hauts-de-France, notamment dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais, les professionnels de santé observent une forte prévalence de la maladie carieuse chez l'enfant. Une enquête du média local Médiacités illustre la prégnance de ce phénomène qui constitue un véritable problème de santé publique dans la région.
Aussi, elle lui demande quelles actions et quels moyens le Gouvernement entend déployer afin de lutter efficacement contre la consommation excessive de sucre chez l'enfant, notamment chez l'enfant de moins de trois ans.
Au regard des disparités géographiques sur ce sujet, il apparait indispensable de territorialiser la politique de santé et de donner à l'agence régionale de santé des Hauts-de-France les moyens adéquats de protéger nos enfants des dommages causés par la consommation excessive de sucre.
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Transmise au Ministère de la santé et de la prévention
Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 24/08/2023
D'après les données de l'étude individuelle nationale des consommations alimentaires (INCA 3) réalisée en 2015 par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), les sucres représentent près de la moitié des glucides consommés (57 %) chez les enfants dont 7 % apportés par les boissons sucrées. Le taux de consommateurs de boissons sucrées augmente avec l'âge : de 43 % chez les 1-3 ans, il passe à près de 64 % chez les 7-10 ans. L'étude ESTEBAN réalisée en 2015 par Santé publique France concluait également que la consommation de boissons sucrées chez les enfants reste élevée : plus d'un tiers en consommant au-delà de la recommandation d'un demi-verre par jour. Or, la consommation excessive de boissons sucrées contribue de façon importante à augmenter le risque de carie dentaire, la chute prématurée des dents, mais aussi l'apport énergétique quotidien et ainsi le risque de survenue de maladies chroniques (diabète de type 2, divers cancers, maladies cardio-vasculaires, etc.). Les comportements acquis dans l'enfance persistant le plus souvent à l'âge adulte, les enfants constituent une cible prioritaire des mesures de prévention du Programme national nutrition santé (PNNS). Diverses actions sont mises en oeuvre afin d'agir sur les comportements alimentaires d'une part, mais également sur l'environnement alimentaire pour faciliter les choix favorables à la santé d'autre part. En 2021, Santé publique France a publié les nouvelles recommandations nutritionnelles pour les enfants de moins de 3 ans sur la base des rapports d'expertise de l'ANSES et du Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Ainsi il est indiqué que « la seule boisson recommandée est l'eau » et « d'éviter toutes les boissons sucrées, dont tous les types de jus de fruits, tous les sodas et les sirops ». Dans son avis relatif à la révision des repères alimentaires pour les enfants de 4 à 17 ans publié en octobre 2020, le HCSP recommande de limiter la consommation de boissons sucrées et au goût sucré (dont les boissons édulcorées). Leur consommation doit rester exceptionnelle, et être limitée à 1/2 verre par jour avant 11 ans, en privilégiant dans cette catégorie les jus de fruits. Les nouvelles recommandations actualisées pour les enfants de 4 à 17 ans seront publiées en 2023 par Santé publique France. Il est également prévu dans le PNNS 4 d'étendre l'éducation à l'alimentation et à l'activité physique et sportive de la maternelle au lycée, afin de sensibiliser en milieu scolaire les enfants et les adolescents à l'adoption de comportements favorables à la santé. Parmi les autres stratégies mises en place, la loi de finances du 28 décembre 2011 a institué pour 2012 une taxe nutritionnelle sur les boissons contenant du sucre ajouté quelle que soit la quantité, ainsi que pour les boissons contenant des édulcorants de synthèse. En 2018, cette taxe a été modifiée dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, afin de moduler la taxe selon la teneur en sucres dans la boisson. Des travaux de recherche sont menés actuellement afin d'évaluer l'effet de cette taxe soda sur l'offre en boissons sucrées et édulcorées mais également sur la demande et les niveaux de consommation des ménages. Enfin, la loi du 20 décembre 2016, dite « Loi Gattolin », interdit la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique. Concernant les chaînes privées, les éditeurs, les annonceurs et les producteurs se sont engagés en 2009 dans une démarche d'autorégulation à travers la signature d'une charte visant à promouvoir une alimentation et une activité physique favorable à la santé dans les programmes et les publicités diffusés à la télévision, et dont les engagements ont été renouvelés en 2014 et 2020. Le Gouvernement sera particulièrement attentif aux résultats de l'évaluation de la charte alimentaire 2020-2024 concernant les objectifs de réduction de l'exposition des enfants à la publicité pour les aliments trop gras, trop sucrés, trop salés. A ce jour, les bilans de la charte publiés en 2021 et 2023 ont montré que les enfants restaient exposés majoritairement aux heures d'écoute conjointes à des publicités pour des produits Nutri-Score D et E. Enfin, concernant la santé buccodentaire des plus jeunes, le programme MT'dents de l'Assurance Maladie est un véritable levier de réduction des inégalités sociales. Il comprend une invitation à une consultation de prévention chez un dentiste et une prise en charge des soins sans avance de frais dans les 6 mois suivant la consultation. Cet examen buccodentaire est proposé tous les trois ans de 3 ans à 24 ans (3, 6, 9, 12, 15, 18, 21 et 24 ans). Ce dispositif permet l'adoption par la famille de comportements favorables à la santé et de limiter le renoncement aux soins par les jeunes, dans un objectif de réduction des inégalités sociales en matière de santé.
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