Question de Mme VÉRIEN Dominique (Yonne - UC) publiée le 25/05/2023

Mme Dominique Vérien attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur les conditions de travail des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM). En effet, les MJPM sont un élément essentiel de notre justice, en protégeant et en accompagnant au quotidien des majeurs vulnérables. Pourtant, leur situation professionnelle est préoccupante à bien des égards.

Tout d'abord, leur rémunération est gelée depuis 2014, alors qu'elle devrait être a minima indexée sur un indice régulièrement révisé et que dans le même temps les charges des cabinets augmentent (frais postaux, frais de déplacements...). Il en résulte une baisse des revenus et une « course à la mesure », avec le risque évident d'une perte de qualité.

En outre, des inégalités de traitement dans la rémunération selon que la prise en charge soit effectuée par un MJPM individuel, en profession libérale, ou en association, quand bien même le MJPM individuel coûte trois fois moins cher qu'une structure associative par exemple.

Enfin, les modalités de paiement varient d'un territoire à l'autre. Certaines directions de l'emploi, du travail et des solidarités (DDETS) paient les prestations facturées chaque mois, tandis que d'autres le font chaque trimestre.

La profession de mandataire judiciaire à la protection des majeurs est un rouage essentiel de maintien de la dignité de nos populations vulnérables, de maintien de la cohésion sociale, une profession de l'ombre qui souffre d'un manque cruel de reconnaissance. En conséquence, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer les projets du Gouvernement à ce sujet.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 06/07/2023

Les principes guidant la rémunération des mandataires judiciaires à la protection des majeurs sont fixés aux articles 419 et 420 du code civil. Le code de l'action sociale et des familles en précise les modalités. Lorsque la mesure judiciaire de protection est exercée par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, son financement est à la charge totale ou partielle de la personne protégée, en fonction de ses ressources, avec de manière subsidiaire un financement de l'Etat. Le code de l'action sociale et des familles prévoit des modalités de financement différentes entre les services mandataires et les mandataires individuels. Les premiers sont financés sous forme de dotation globale et les seconds sur la base de tarifs mensuels. Ces différences se justifient par des modalités d'organisation et de fonctionnement différentes qui entraînent des charges (personnel, fonctionnement et structure) importantes pour les services. Pour autant, les tarifs des mandataires individuels ont également vocation à couvrir les frais de fonctionnement de ces intervenants. Par ailleurs, pour tenir compte des différences en terme de charge de travail, les tarifs perçus par les mandataires individuels varient en fonction de la nature de la mesure, du lieu de vie et du niveau de ressources de la personne protégée. Si les services mandataires sont financés sous la forme de dotation globale de financement, les mandataires individuels sont quant à eux tarifés à la mesure, la participation des personnes protégées intervenant pour eux en complément de rémunération. Ainsi, la part de la participation dans la rémunération des mandataires individuels atteint 40 %, alors qu'elle n'intervient que pour 15 % dans le budget des services. Des travaux sont en cours depuis plusieurs années en vue de réformer le financement du secteur de la protection juridique des majeurs, et cela quel que soit le mode d'exercice. Parmi les réflexions en cours, figure notamment la démarche initiée par la note méthodologique de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) d'octobre 2018 et par l'étude de coûts réalisée par le CGI-business consulting fin 2021. C'est également dans cette perspective globale que s'inscrivent les problématiques exposées par les mandataires individuels. Les fédérations représentant les mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) individuels et les services MJPM seront donc étroitement associées à la suite de ces travaux. Concernant la forme juridique d'exercice, à la différence du service mandataire, le mandataire exerçant à titre individuel est désigné à titre personnel, en tant que personne physique, pour l'exercice d'un mandat de protection. Il est placé à ce titre sur une liste départementale arrêtée par le préfet. L'exercice en tant que mandataire individuel ne peut donc s'effectuer dans le cadre d'une société, qui est juridiquement une personne morale. Le statut prévu pour cet exercice est le statut d'entrepreneur individuel. Les mandataires ayant commencé leur activité avant le 15 février 2022 peuvent également bénéficier du statut de l'Entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL). Par ailleurs, s'il n'est donc pas juridiquement possible pour les mandataires exerçant à titre individuel de constituer une Société d'exercice libéral (SEL) ou une Société civile professionnelle (SCP), ils peuvent constituer une Société Civile de Moyens et ainsi mettre notamment en commun des locaux et l'emploi d'un secrétaire spécialisé. En revanche, quelle que soit la forme choisie, la question des remplacements ne peut pas être résolue en l'état actuel du droit pour un mandataire individuel, puisque le mandat ne peut être délégué. Enfin, concernant la gouvernance de la profession MJPM, tous modes d'exercice confondus, plusieurs hypothèses doivent être travaillées. D'un côté, le rapport final des états généraux de la justice préconise, plutôt qu'un ordre professionnel, la création d'une Commission Nationale rattachée au Premier ministre, dotée d'attributions opérationnelles afin d'impulser une meilleure articulation des dispositifs. D'un autre côté, il est aujourd'hui essentiel d'intégrer la protection juridique des majeurs dans les réflexions actuelles autour des problématiques d'autonomie et de maintien à domicile des personnes âgées et handicapées, et plus généralement de positionner l'activité des mandataires comme l'une des dimensions essentielles de l'accompagnement des personnes majeures vulnérables.

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