Question de M. LAHELLEC Gérard (Côtes-d'Armor - CRCE) publiée le 18/05/2023
M. Gérard Lahellec attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation préoccupante des exploitants engagés dans l'agriculture biologique.
Le développement de la filière biologique a été fortement encouragé ces dernières années par les politiques publiques française et européenne pour ses effets vertueux sur la préservation de l'environnement.
Seulement depuis l'année dernière, la filière connait un recul important avec une baisse d'environ 7,4 % de ses ventes en grandes surfaces en 2022.
La crise de l'agriculture biologique résulte de la combinaison de différents facteurs d'ordre conjoncturel et structurel, à savoir, la baisse de la consommation, l'augmentation des coûts de productions, les difficultés de trésorerie et le déclassement des productions. Ceux-ci génèrent des cessations d'activités en masse et des pertes économiques d'ampleur (plus de 10 millions d'euros de pertes pour les producteurs de fruits et de légumes, 30 millions d'eurs pour les éleveurs de porc, 70 millions d'euros pour les éleveurs de bovins allaitants...).
Face à cette situation, le Gouvernement a annoncé la création d'un fonds d'urgence doté de 10 millions d'euros, la mise en place d'un travail interministériel impliquant les collectivités locales pour aider la restauration collective publique à répondre à l'objectif de 20 % prévu par la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGalim) pour les produits alimentaires en agriculture biologique et la réforme de la gouvernance de l'Agence française pour le développement et la promotion de l'agriculture biologique (Agence BIO).
Toutefois, ces mesures ne répondent ni à la réalité des besoins de la filière biologique ni à l'urgence de la situation.
Le montant du fonds d'urgence est incontestablement dérisoire et perçu comme méprisant au regard de l'ampleur des pertes économiques des différentes filières biologiques. En effet, réparti entre les 60 000 exploitations, ce fonds revient à octroyer une somme de 166 euros par exploitation.
Par ailleurs, s'agissant des dispositions de la loi EGalim imposant de prévoir 20 % de produits biologiques pour les repas servis en restauration collective dans tous les établissements chargés d'une mission de service public, l'urgence impose leurs mises en place sans délai en donnant immédiatement les moyens financiers aux collectivités territoriales.
L'inaction actuelle menace à très court terme les 60 000 exploitations engagées dans l'agriculture biologique.
Aussi, il lui demande s'il entend établir un plan de soutien à l'agriculture biologique à la hauteur des besoins de la filière, des enjeux du maintien de l'agriculture biologique française et de la souveraineté alimentaire de la France.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 24/08/2023
Le Gouvernement suit avec attention la situation des filières agricoles et notamment celle des filières biologiques. Suite à la période de croissance très soutenue de ces dernières années, le secteur biologique français arrive structurellement, dans une nouvelle étape de son développement. La production biologique a changé d'échelle et atteint un palier qui doit mener vers de nouveaux relais de croissance. Une attention particulière doit donc être portée à la consolidation et la pérennisation des filières biologiques et à la création de nouveaux débouchés, afin de poursuivre un développement harmonieux de l'offre et de la demande. De manière conjoncturelle, la pandémie de covid-19 et les conséquences de la guerre en Ukraine ont modifié la consommation alimentaire nationale avec des impacts directs sur la consommation des produits biologiques tandis que les hausses des charges des exploitations agricoles ont augmenté. Malgré ce contexte perturbé, l'objectif de développement de la production biologique sur le moyen terme, tel qu'inscrit au plan national dans le programme Ambition Bio et au plan européen dans le cadre de la stratégie « de la ferme à la table », reste pleinement d'actualité. En effet, le développement du secteur biologique répond aux enjeux sociétaux actuels tels que la souveraineté alimentaire, la préservation de l'environnement, la protection de la santé humaine et la juste répartition de la valeur. Dans cette perspective, le Gouvernement a annoncé le 1er mars 2023, lors du salon international de l'agriculture, un plan pour l'agriculture biologique contenant des mesures de soutien d'urgence ainsi que des mesures structurelles de long terme visant à atteindre les objectifs fixés de développement de l'agriculture biologique. Ce plan a ensuite été renforcé le 17 mai 2023 avec un appui financier additionnel. Ainsi, le Gouvernement a tout d'abord annoncé en mars, la mise en place d'un fonds d'urgence de 10 millions d'euros (M) afin d'apporter une aide immédiate aux exploitations en agriculture biologique les plus en difficulté. En mai, le Gouvernement a annoncé une aide complémentaire de 60 M pour soutenir les exploitations agricoles biologiques ayant subi des pertes économiques importantes. Concernant les mesures structurelles de ce plan de soutien, le Gouvernement s'engage à atteindre, d'ici à la fin 2023, l'objectif d'introduction de 50 % de produits durables, dont 20 % de produits biologiques, dans les établissements de restauration collective de l'État, tel que prévu par la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (loi dite EGALIM 1). Cet objectif d'exemplarité représente un soutien financier du Gouvernement d'environ 120 M via l'augmentation des achats des produits biologiques destinés aux restaurants collectifs publics. En outre, le Gouvernement continuera à accompagner les gestionnaires des établissements de la restauration collective à la fois publique et privée dans l'application de ces objectifs, qui constituent un relais de croissance important pour les filières biologiques. Enfin, en cohérence avec ces objectifs pour le secteur des fruits et légumes, le programme européen de distribution des fruits et légumes et de produits laitiers dans les écoles sera davantage mobilisé en France afin de développer la distribution des fruits et légumes issus de productions biologiques dans les écoles du primaire et du secondaire. Afin de relancer la consommation des produits biologiques à domicile, le Gouvernement a renforcé les moyens alloués à l'Agence Bio pour poursuivre la campagne de communication « Bioréflexe », menée depuis mai 2022. Au total, 1,25 M sont destinés à cette campagne, élaborée avec 8 interprofessions, qui vise à stimuler le « Bioréflexe » chez les consommateurs en rappelant les garanties associées au mode de production biologique. Cette campagne a déjà prouvé son efficacité auprès des consommateurs. En outre, afin de poursuivre l'effort de communication sur les produits biologiques sur le moyen terme, 3 M supplémentaires serviront à financer une nouvelle campagne de promotion des produits biologiques auprès du grand public. En dehors des aides apportées dans le cadre du plan de soutien à l'agriculture biologique, le Gouvernement a mis en place plusieurs leviers afin de soutenir le développement de l'agriculture biologique. Ainsi, le fonds dédié au financement de projets structurants pour les filières biologiques, le fonds Avenir Bio géré par l'Agence Bio, est augmenté de 5 M en 2023 pour un montant total de 13 M. Un financement spécifique de 2 M est également prévu pour la filière porcine biologique particulièrement affectée par le contexte perturbé évoqué ci-dessus. De plus, les services rendus par les agriculteurs convertis resteront reconnus par l'accès au niveau supérieur de l'éco-régime de la nouvelle politique agricole commune et par la revalorisation du crédit d'impôt bio porté à 4 500 euros par an à compter de 2023 et prolongé jusqu'en 2025. Enfin, le programme Ambition Bio 2022, adopté en 2018, soutient le développement des filières biologiques de l'amont à l'aval et l'identification des freins techniques et réglementaires au développement du secteur. Le programme contribue à développer l'offre du bio mais aussi les débouchés et la structuration de la filière. Ce programme est prolongé en 2023, année charnière consacrée à une réflexion collective sur la situation de la filière, avec notamment la réalisation d'une étude prospective pour définir des scénarios de développement du secteur bio à l'horizon 2040 et identifier des leviers d'action pour parvenir aux objectifs retenus. Ces réflexions alimenteront la construction du programme Ambition Bio 2027.
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