Question de M. PELLEVAT Cyril (Haute-Savoie - Les Républicains-R) publiée le 11/05/2023
M. Cyril Pellevat attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les dérives constatées dans certains groupes de gens du voyage.
S'il est possible de vivre paisiblement avec la majorité des membres de la communauté des gens du voyage, il apparaît que certains groupes, en particulier en Haute-Savoie, ne peuvent plus être considérés comme faisant partie de la République.
De nombreux élus font état d'incivilités incessantes, qu'il s'agisse d'une malpropreté telle qu'elle en devient dangereuse pour la salubrité publique, d'insultes, de dégradations des aires d'accueil ou des terrains où ils s'installent illégalement, de dépôts sauvages ou encore de raccordements sauvages à l'eau ou à l'électricité entraînant des risques d'inondation ou d'incendie, ce qui arrive d'ailleurs fréquemment. Ils rapportent des scènes irréalistes, avec des groupes qui s'installent devant des commerces et entravent l'activité économique des communes, ou encore devant des écoles, avec des individus qui défèquent en extérieur, à la vue des enfants. Certains maires en sont même venus à fermer leurs écoles ou reporter des rentrées scolaires.
Ces groupes de gens du voyage ne sont jamais en contact avec le reste de la société, les enfants ne sont pas scolarisés et des fillettes qui devraient encore être au collège ou au lycée deviennent mères et contribuent à une augmentation exponentielle de la population de ces groupes. Les délits y sont monnaie courante : outre ceux déjà cités précédemment, on dénombre notamment des vols et cambriolages, des détentions illégales d'armes, du travail dissimulé, du braconnage. La liste est sans fin.
Ces comportements interviennent en toute impunité, ces groupes devenant tellement importants et menaçants qu'il devient dangereux pour les maires, la police et même parfois la gendarmerie d'intervenir. L'obligation de respecter en toutes circonstances le sacro-saint schéma départemental d'accueil pour pouvoir les expulser ne fait en outre que renforcer leur sentiment d'impunité.
Aussi, il lui demande s'il considère que de tels comportements respectent les principes de la République, et s'ils ne peuvent pas s'apparenter à des dérives sectaires. À ce titre, il souhaiterait savoir si la Miviludes a déjà été saisie au sujet des pratiques de certaines communautés de gens du voyage. Enfin, il lui demande ce qu'il compte faire pour mettre fin à cette situation, et notamment s'il envisage de modifier la loi « Respect des principes de la République » pour mieux y inclure cette problématique mais aussi et surtout s'il compte mettre en place des dérogations à l'obligation de respect du schéma afin qu'il soit rendu possible de procéder à des expulsions administratives lorsque l'ordre public est menacé.
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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement publiée le 02/06/2023
Réponse apportée en séance publique le 01/06/2023
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, auteur de la question n° 680, adressée à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
M. Cyril Pellevat. La question porte sur les dérives constatées dans certaines communautés de gens du voyage. En effet, s'il est possible de vivre paisiblement avec la majorité de leurs membres, tel n'est pas le cas pour certains groupes, en particulier dans mon département de Haute-Savoie.
De nombreux élus font état d'incivilités incessantes - malpropreté telle qu'elle menace la salubrité publique, insultes ou encore dégradations commises sur les aires d'accueil et les terrains où ces communautés s'installent illégalement.
Les mêmes élus constatent des raccordements sauvages à l'eau ou à l'électricité, entraînant des risques d'inondation ou d'incendie qui se concrétisent d'ailleurs fréquemment. Ils rapportent des scènes invraisemblables : certains groupes s'installent devant des commerces et entravent l'activité économique des communes ; d'autres s'établissent devant des écoles et certains de ses membres poussent l'inconvenance jusqu'à déféquer à l'extérieur, à la vue des enfants... Certains maires en sont venus à fermer leurs écoles ou à reporter des rentrées scolaires.
Ces groupes de gens du voyage ne sont jamais en contact avec le reste de la société. Les enfants n'y sont pas scolarisés et de jeunes filles deviennent mères à l'âge où elles devraient encore fréquenter le collège ou le lycée, contribuant ainsi à l'augmentation exponentielle de cette population.
Au sein de ces communautés, les délits sont monnaie courante. À ceux que je viens de citer s'ajoutent des vols et cambriolages, des détentions illégales d'armes, du travail dissimulé, du braconnage... La liste est sans fin.
Ces groupes agissent en toute impunité : ils deviennent si larges et menaçants qu'il est désormais dangereux pour les maires, la police et même la gendarmerie d'intervenir. L'obligation de respecter en toutes circonstances le sacro-saint schéma départemental d'accueil des gens du voyage (SDAGV) pour les expulser ne fait que renforcer leur sentiment d'être au-dessus des lois.
Monsieur le ministre, estimez-vous que de tels comportements respectent les principes de la République ? Ne peuvent-ils pas s'apparenter à des dérives sectaires ?
La mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) a-t-elle déjà été saisie de ces problèmes ? Que comptez-vous faire pour y mettre un terme ? Envisagez-vous, en particulier, des dérogations à l'obligation de respect du schéma pour procéder à des expulsions administratives lorsque l'ordre public est menacé ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Klein, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement. Monsieur le sénateur Cyril Pellevat, comme vous le savez, le régime applicable en matière de stationnement des gens du voyage est fixé par la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage. Ce texte permet au maire ou au président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), ainsi qu'au propriétaire et au titulaire d'un droit d'usage sur le terrain, de demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux.
Une telle mise en demeure n'est possible que si la présence constatée viole les dispositions d'un arrêté interdisant le stationnement des résidences mobiles en dehors des aires et terrains dédiés.
Par ailleurs, l'édiction d'un arrêté d'interdiction de stationnement, alors même que la commune ou l'EPCI ne remplit pas les prescriptions du schéma départemental d'accueil des gens du voyage, est autorisée par la loi, notamment lorsque l'EPCI dispose d'un emplacement provisoire agréé par le préfet.
La loi du 7 novembre 2018 relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites a étendu le dispositif de l'amende forfaitaire au délit d'installation illicite et en réunion sur un terrain. Cette procédure a été expérimentée par plusieurs parquets, notamment ceux de Créteil, Foix et Lille, à compter du 19 octobre 2021. L'expérimentation se poursuit et, en lien avec les services du ministre de la justice, nous étudions l'opportunité de sa généralisation.
La commission des délits et incivilités cités par des personnes ayant un mode de vie itinérant ne constitue pas, en soi, une dérive sectaire. En revanche, il appartient aux maires qui constateraient de telles dérives de solliciter la Miviludes, que vous avez citée, pour qu'elle évalue la situation en lien avec le préfet. Si ces dérives sont confirmées, il convient de saisir le procureur de la République.
Pour ce qui concerne les délits dénoncés et les dangers potentiels encourus par les enfants, il revient aux élus de procéder à des signalements au procureur de la République ou aux cellules de recueil des informations préoccupantes, qui relèvent des conseils départementaux.
M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour la réplique.
M. Cyril Pellevat. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces informations, même si nous en disposions déjà...
Dans la pratique, les collectivités territoriales ont le plus grand mal à faire respecter la loi : la plupart du temps, le tribunal administratif annule les arrêtés pris.
J'insiste sur le cas de ces jeunes filles de 12 ans, 13 ans ou 14 ans. Elles ne sont pas scolarisées et, en matière éducative comme dans bien d'autres domaines, nous sommes face à une véritable bombe à retardement. J'ai eu l'occasion d'en parler au ministre de l'éducation nationale : il est conscient de cette difficulté. Il est désormais urgent que le Gouvernement intervienne.
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