Question de M. LECONTE Jean-Yves (Français établis hors de France - SER) publiée le 11/05/2023
M. Jean-Yves Leconte attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'application des règles relatives à la passation des marchés publics par les administrations publiques, leurs agences, les établissements publics administratifs et les établissements publics industriels et commerciaux, lorsqu'ils engagent la passation d'un marché dont la réalisation est prévue hors de France.
En effet, si les principes généraux de passage des marchés publics sont précisés par la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics, il apparait que les administrations ne font pas la même interprétation des règles fixées, dès lors que le marché public n'est pas réalisé en France.
Bien entendu, hors de France, des règles et normes différentes peuvent avoir à être retenues. Toutefois, dans les pays membres de l'Union européenne, ces règles nationales ne sauraient être en contradiction avec la directive européenne relative au passage des marchés publics et ne peuvent constituer un moyen d'éviter le respect de la réglementation prévue par ladite directive.
Hors de l'Union européenne, les règles et normes qui peuvent être appliquées lors du passage d'un marché et, le cas échéant lorsque le marché est relatif à une construction, relèvent le plus souvent de normes de sécurité et d'exigences qui restent compatibles avec les règles de passation des marchés qui s'appliquent aux opérateurs publics européens. L'existence de telles exigences émises par le pays de résidence n'apparait donc pas, a priori, comme une raison générale et suffisante pour s'affranchir des règles européennes.
Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser le cadre juridique qui s'applique à l'ensemble des opérateurs publics lors de la passation de marchés hors de France, que la réalisation soit prévue au sein de l'Union européenne ou dans un pays tiers.
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 06/07/2023
Les principes généraux du droit de la commande publique que sont la liberté d'accès à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats et la transparence des procédures ont valeur constitutionnelle (CC, 2003-473 DC du 26 juin 2003, loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit). Toutefois, s'ils gouvernent la passation des marchés publics par l'État et les opérateurs en France et à l'étranger, les modalités de leur mise en oeuvre diffèrent selon que le marché est passé dans un pays étranger situé dans l'Union européenne (UE) ou en dehors de cette zone. S'agissant des marchés publics passés dans les États membres de l'UE, le cadre juridique est constitué des directives européennes du 26 février 2014 (2014/24/UE sur la passation des marchés publics et 2014/25/UE relative aux secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux) transposées dans le code de la commande publique, qui s'applique aux pouvoirs et entités adjudicateurs en France et au sein de l'UE. Ce cadre juridique pose des règles de publicité et de mise en concurrence définies par catégories de marchés publics et montant du contrats. Ces règles n'excluent cependant pas l'application de règles de droit local au sein de l'UE dès lors qu'elles ne contreviennent pas aux directives communautaires ou ne compromettent pas leur application. Ainsi, seules des règles de publicité et/ou de mise en concurrence de droit local plus strictes ou des règles complémentaires sont également susceptibles de recevoir application. S'agissant des contrats de la commande publique exécutés à l'étranger en dehors de la zone UE, le cadre général est fixé par la circulaire du 3 mai 1988 relative à la passation des marchés publics à l'étranger, dite « circulaire Chirac », et la jurisprudence du Conseil d'État. Ainsi, si le contrat est passé en France, la circulaire prévoit que celui-ci relève du droit français et des règles de la commande publique, sans préjudice de l'application de dispositions d'ordre public local (par exemple, la réglementation du droit du travail). S'agissant des contrats conclus et exécutés à l'étranger, la jurisprudence administrative juge que lorsque ces contrats sont soumis à la loi française, la liberté d'accès à la commande publique, l'égalité de traitement des candidats et la transparence des procédures leur sont applicables (Conseil d'État, 29 juin 2012, Sté Pro 2C, n° 357976, en A). Le code de la commande publique ne s'applique, quant à lui, pas de plein droit en dehors de toute volonté de la personne publique qui peut toutefois décider de s'y référer dans le contrat (Conseil d'État, 3 juillet 1968, n° 68333, en B ; Conseil d'Etat, 4 juillet 2008, n° 316028, en B). Enfin, si un service de l'État à l'étranger doit recourir à un marché pour satisfaire ses besoins locaux, celui-ci peut, par exception, se soumettre au droit local. La circulaire rappelle néanmoins qu'en pareille situation, les services doivent s'attacher à « mettre en oeuvre l'esprit de concurrence et d'équilibre qui anime la règlementation française ». Elle rappelle également que la « référence dans le marché au droit français et surtout à la compétence du juge administratif » restent par principe souhaitables.
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