Question de M. RAVIER Stéphane (Bouches-du-Rhône - NI) publiée le 16/02/2023

Question posée en séance publique le 15/02/2023

M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour la réunion administrative des sénateurs n'appartenant à aucun groupe.

M. Stéphane Ravier. Ma question s'adresse à Mme le ministre de la censure… pardon, de la culture, mais c'est à s'y méprendre ! (Marques d'agacement sur plusieurs travées.)

Madame le ministre, le 9 février dernier, vous avez clairement menacé de ne pas renouveler les fréquences de chaînes d'information privées depuis les studios d'un média public.

Ces propos choquants représentent une atteinte à l'indépendance de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), chargée de réguler la communication audiovisuelle. Ils constituent aussi une atteinte au pluralisme porté, notamment, par le travail des équipes de C8 et CNews, chaînes suivies quotidiennement par plus de 11 millions de téléspectateurs. Ils sont enfin une menace pour la liberté d'expression et le débat démocratique.

Madame le ministre, si vos propos portent les valeurs de la République, ce sont celles d'une République soviétique ou d'une République bananière ! (Vives protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.) Dois-je vous rappeler que nous sommes à Paris, pas à Pyongyang ni à La Havane ?

Votre atteinte à la liberté d'expression et au débat démocratique est aggravée par un « deux poids, deux mesures » : samedi encore, la chaîne publique France 2, incapable d'égard pour les élus d'opposition, accueillait en vedette un tueur en série, sans réaction de l'Arcom ni de votre part ! Vous avez une conception et une application très sélective du rappel du cadre de la loi…

La chaîne C8 collectionne, elle, près de 6,7 millions d'euros d'amende depuis six ans pour, disons-le, « non-respect de l'idéologie dominante ».

Mémona Hintermann et Françoise Laborde, toutes deux anciens membres du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), devenu aujourd'hui l'Arcom, n'ont pas manqué de dénoncer votre insupportable pression. L'essence même de l'Arcom est – ou devrait être – sa totale indépendance à l'égard du pouvoir politique. En appelant l'Arcom à agir, vous êtes déjà dans l'ingérence et la pression.

La vérité, c'est qu'en 2025 nous serons à deux ans de l'élection présidentielle et que vous ne supportez plus que l'opposition puisse s'exprimer sur une chaîne qui, pourtant, fait preuve, elle, d'une véritable pluralité en invitant toutes les opinions à s'exprimer ! (Vives exclamations sur les travées des groupes SER, GEST CRCE.)

Madame le ministre, alors que le renouvellement des fréquences de la télévision numérique terrestre (TNT) a lieu en 2025, plutôt que des bravades ou des fanfaronnades,…

M. le président. Il faut conclure !

M. Stéphane Ravier. … quelles garanties pouvez-vous nous apporter pour assurer le pluralisme ainsi que la liberté de l'information et du débat dans l'audiovisuel français ?


Réponse du Ministère de la culture publiée le 16/02/2023

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2023

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Monsieur le sénateur Ravier, on termine en beauté ! La première fois que vous vous êtes adressé à moi, vous m'avez qualifiée de ministre de la « déculture » : on monte d'un cran ! (Mme Marie-Pierre Monier applaudit.)

M. Stéphane Ravier. Vous régressez !

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Chaque fois, je rappelle le cadre de la loi. Au fond, ce que vous contestez, ce sont les obligations posées par la loi de 1986.

Vous contestez, visiblement, le fait qu'il faille respecter la dignité des personnes sur les chaînes de la TNT, qui bénéficient de fréquences gratuites.

Vous contestez également le fait qu'il ne faille pas insulter, par exemple, un parlementaire.

Vous contestez aussi l'interdiction d'inciter à la haine, l'Arcom ayant, en toute indépendance, rendu sa décision de sanctionner l'une des chaînes que vous mentionnez pour propos insultants à l'égard des mineurs étrangers, qualifiés de violeurs, d'agresseurs et d'assassins. Si je vous comprends bien, vous contestez tout simplement la loi !

Je suis pourtant ici face à des législateurs, tous attachés à cette loi qui est le fondement de notre démocratie, du pluralisme et de l'indépendance de l'information dans notre pays. J'y suis moi-même viscéralement attachée.

Je m'étonne d'autant plus de vous entendre aujourd'hui défendre la liberté de la presse que, il n'y a pas si longtemps, le candidat que vous défendiez à l'élection présidentielle faisait huer les journalistes dans ses meetings ; certains d'entre eux y ont même été agressés.

Nous n'avons donc pas de leçons à recevoir de vous. Respectons la loi, rien que la loi ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, GEST, SER et CRCE, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Bruno Sido applaudit également.)

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