Question de M. PLA Sebastien (Aude - SER) publiée le 10/11/2022
M. Sebastien Pla alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les fortes inquiétudes des organisations professionnelles suite aux précisions d'application du plan stratégique national de la politique agricole commune, qui leur ont été communiquées, lesquelles écartent les surfaces en estives collectives de la mise en œuvre de l'« éco-régime » ; prévoient l'ouverture à certains gestionnaires d'estives, reconnus agriculteurs actifs et détenant des droits à paiement de base, de l'accès à l'« éco-régime » (s'ils en respectent les critères) ; et introduisent un critère de chargement minimum à 0,2 unité de grand bétail par hectare parmi les critères d'entretien minimal pour la définition de l'activité agricole.
Il lui rappelle que les surfaces collectives représentent 430 700 ha dans les Pyrénées soit le quart de la superficie du massif, ce qui correspond à 40 000 emplois pyrénéens directement et indirectement liés à ce secteur d'activité générant, chaque année, un milliard d'euros de revenus et 360 millions d'euros de services non marchands induits.
Il s'étonne donc, aux côtés des représentants des chambres d'agriculture du massif pyrénéen, de tels arbitrages qui méconnaissent l'intérêt des territoires pastoraux collectifs, pourtant très vertueux en termes de maintien de pâturages permanents, et qualifiés d'écrins de services environnementaux, pleinement reconnus par les zonages haute valeur naturelle et Natura 2000.
Pire, ses interlocuteurs estiment que ces modalités d'application augurent des pertes financières colossales pour les 4 000 éleveurs transhumants pyrénéens, déjà évaluées à environ 20 millions d'euros ; et risquent de générer, en chaine, une inégalité de traitement entre les estives collectives et les estives individuelles ; tout en venant à exclure les gestionnaires coopératifs et syndicaux du versement des aides du premier pilier, occasionnant ainsi une source de discrimination incompréhensible entre les transhumants.
Il lui demande donc de justifier les raisons pour lesquelles ce dispositif initial en faveur de la protection des sols, du maintien de la biodiversité et du maintien des prairies permanentes, ne prend pas en compte des surfaces les plus vertueuses à cet égard.
Il lui rappelle en effet que l'« éco-régime » prévoit une approche systémique visant « l'ensemble [des] surfaces éligibles » de chaque exploitation et que, à ce titre, les surfaces pastorales utilisées collectivement sont des espaces de production vitaux, indissociables de l'exploitation dont ils constituent le prolongement, et qui, par leur mode de gestion, correspondent parfaitement aux objectifs de l'« éco-régime ».
Ainsi souhaite-t-il une révision rapide visant à la reconnaissance de la continuité des pratiques entre exploitations et estives de façon à ce que les surfaces collectives, qui font partie intégrante des exploitations, soient retenues et que l'« éco-régime » bénéficie directement aux éleveurs.
Il réclame en outre, des seuils de chargement planchers pour les critères d'entretien des terres adaptés à la réalité géographique et climatique de des territoires pastoraux pyrénéens.
Il le remercie de bien vouloir lui faire connaître ses intentions sur les différents points soulevés.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 05/01/2023
Une attention particulière a été portée tout au long de l'élaboration du plan stratégique national (PSN) sur les dispositions applicables aux surfaces pastorales, compte tenu de l'enjeu qu'elles revêtent pour l'agriculture pastorale et les territoires. En particulier, alors qu'ils ont été régulièrement remis en cause dans le cadre des audits sur la programmation actuelle, les coefficients d'admissibilité de ces surfaces ont pu être maintenus à un niveau inchangé dans la version finale du PSN adopté par la Commission européenne en date du 31 août 2022. Pour autant, des évolutions étaient nécessaires par rapport au cadre actuel, pour permettre la mise en uvre des nouveaux dispositifs tels que l'écorégime ou de nouvelles modalités de vérification des surfaces admissibles à travers notamment le système de suivi des surfaces en temps réel. Les modalités d'application suivantes du plan stratégique national (PSN) ont ainsi été retenues. Les griefs de la Commission sur l'actuelle programmation, les difficultés rencontrées lors des contrôles quant à la vérification des indices de pâturage et l'évolution vers des modalités automatisées d'évaluation de l'admissibilité ont conduit à décider de la mise en place d'un critère de chargement pour la détermination de l'admissibilité de ces surfaces, dont l'entretien est principalement assuré par les animaux, en particulier celle des surfaces à forte proportion de ligneux. Ce critère de taux de chargement concernera uniquement les prairies composées majoritairement de ligneux, arbres, arbustes ou buissons dans 38 départements du Sud de la France, ainsi que les surfaces en chênaies et châtaigneraies dans la zone Causses-Cévennes et en Corse, et s'appliquera aux exploitations déclarant ce type de surfaces (qu'il s'agisse d'exploitations individuelles, en société ou de gestionnaires d'estives). La valeur minimale de ce taux de chargement sera fixée à 0,2 unité de gros bétail (UGB) par hectare (ha) admissible ce qui caractérise un type d'élevage extensif et permet d'assurer un entretien minimal de ces surfaces. Il ne s'agit pas en l'espèce d'évaluer la capacité « fourragère » de ces surfaces mais de s'assurer que l'exploitation dispose d'un nombre d'animaux suffisant pour maintenir ces milieux ouverts et exploitables, avec par ailleurs la vérification de l'absence d'enfrichement. Ce taux sera calculé sur la base des surfaces admissibles ce qui permettra de mieux reconnaître l'activité pastorale sur ces surfaces spécifiques. En effet, à la différence des surfaces graphiques utilisées pour calculer le taux de chargement de l'indemnité compensatrice de handicaps naturels, les surfaces admissibles tiennent compte de la diversité des territoires en appliquant des coefficients d'admissibilités (proratas) différenciés selon la disponibilité en ressources fourragères. Dans le cas où le seuil de chargement ne serait pas atteint, les surfaces seront plafonnées de manière à atteindre le seuil de 0,2 UGB/ha. Ce plafonnement ne concernera que les surfaces pastorales composées majoritairement de ligneux et ne sera pas susceptible de remettre en cause l'admissibilité des autres types de pâturages, vérifiée selon d'autres critères. L'éco-régime doit par ailleurs permettre de valoriser les services environnementaux rendus par l'élevage extensif. C'est pourquoi il a été décidé d'étendre à l'éco-régime le mécanisme de rapatriement des surfaces d'estives gérées en commun aux éleveurs bénéficiaires de cette aide, au prorata de leur utilisation au cours de l'année, mécanisme déjà mobilisé dans le cadre du versement de l'aide de base pour un développement durable. L'objectif est de pouvoir verser l'éco-régime sur toutes les surfaces utilisées par l'exploitant, y compris les pâturages en commun au prorata de leur utilisation, sous réserve du respect des critères d'accès à l'aide. À cet égard, et compte tenu de la typicité des surfaces pastorales, le respect des critères conditionnant le versement de l'éco-régime sera vérifié distinctement, d'une part, sur les surfaces de l'exploitation « du bas » (surfaces déclarées par l'exploitant dans son dossier de politique agricole commune) conformément à la voie d'accès choisie par le demandeur, et d'autre part, sur les surfaces rapatriées d'estive conformément à la voie d'accès s'appliquant à ces surfaces utilisées en commun. Le gestionnaire d'estives pourra selon le même principe faire une demande d'aide et obtenir le versement de l'éco-régime à due concurrence des surfaces lui permettant d'activer des droits à paiement de base, dont il dispose. Ces dispositions permettront de soutenir l'élevage extensif et de reconnaître l'importance des territoires pastoraux dans leur diversité tout en s'assurant de la valorisation des surfaces concernées par un pâturage effectif des animaux, nécessaire à leur entretien en l'absence de possibilité de fauche ou broyage et, seule, susceptible de justifier l'octroi de soutiens publics aux termes du PSN.
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