Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 20/10/2022

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conséquences des obligations en matière de produits durables et de qualité servis dans la restauration collective.

Ce faisant, il lui rappelle les termes de la question écrite n° 27159 publiée au Journal officiel des questions du Sénat le 10 mars 2022 (p. 1236) qui, n'ayant pas obtenu de réponse malgré la question de rappel n° 28075, est devenue caduque du fait du changement de législature.

La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous fixe un objectif de 50 % de produits durables et de qualité dans l'approvisionnement de la restauration collective, dont 20 % de produits durables.
Si cet objectif est louable, l'approvisionnement en produits durables et de qualité visé par la loi conduit à un enchérissement important du prix des denrées (entre 20 % et 50 % selon les estimations). L'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) indique ainsi dans son rapport « Freins et leviers pour une restauration collective scolaire plus durable » qu'un renchérissement semble inéluctable à court terme.
Ce dispositif a des effets pervers. En effet, pour respecter ces objectifs, les gestionnaires de restauration collective, et notamment les collectivités locales, qui ne sont pas en mesure de faire face à ces augmentations, sauf à les répercuter sur les usagers, n'ont d'autres choix que de diminuer la qualité des autres aliments pour maintenir le budget constant. Cette situation est contraire à l'objectif recherché par la loi et conduit à des conséquences négatives.
Le contexte inflationniste qui impacte l'ensemble des produits alimentaires (qui pourrait atteindre 12 % en 2022 selon l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE)) accentue cette problématique. Pour faire face à ces surcoûts, un certain nombre de collectivités ont fait le choix, avec l'accord du nutritionniste, de retirer une composante du menu.
Aussi, il lui demande les mesures qu'il compte prendre pour aider ces collectivités à faire face à ces surcoûts.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 23/02/2023

La loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi « EGALIM », a introduit, dans son article 24, l'obligation d'atteindre au 1er janvier 2022 une part au moins égale, en valeur, à 50 % de produits durables et de qualité dans les repas servis dans les restaurants collectifs, les produits biologiques devant représenter une part au moins égale, en valeur, à 20 %. La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « Climat et résilience », a modifié ces dispositions en ajoutant, à compter du 1er janvier 2024, l'objectif de 60 % de viandes et produits de la pêche de qualité et durables et en étendant ces objectifs à tous les restaurants collectifs dont des personnes morales de droit privé ont la charge. Elle a également introduit deux nouvelles catégories de produits entrant dans le décompte des produits durables et de qualité (les produits issus du commerce équitable et les produits acquis principalement sur les performances en matière de protection de l'environnement et de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture) et réduit la période de prise en compte des produits issus d'exploitations bénéficiant de la certification environnementales de niveau 2 qui prendra fin au 1er janvier 2027. Conformément à l'article 25 de la loi EGALIM, le Gouvernement a remis au Parlement, en octobre 2019, un rapport évaluant, par catégorie et taille d'établissements, les impacts budgétaires induits par l'application de ces règles et les leviers permettant de compenser ces impacts budgétaires. Ce rapport avait permis de constater un coût supplémentaire variable selon les types d'établissements et les stratégies mises en œuvre de l'ordre de 0,14 à 0,42 centimes d'euro par repas. Le rapport soulignait que ces coûts supplémentaires pouvaient être compensés pour tout ou partie par des changements de pratiques tels que des progrès dans la lutte contre le gaspillage alimentaire ou encore le recours accru aux protéines végétales. L'article 25 de la loi EGALIM prévoit que ce rapport soit actualisé au plus tard le 1er janvier 2023, dans les mêmes formes, sur la base des données recueillies auprès d'un échantillon représentatif des gestionnaires des établissements visés. C'est pourquoi dans la continuité de la mission réalisée en 2019, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a confié au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), par lettre de mission du 27 avril 2022, l'actualisation de ce rapport. Ce rapport prendra en compte les impacts conjoncturels et structurels de l'inflation sur le secteur de la restauration collective générée par la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19 et la situation en Ukraine. Par ailleurs, dans le contexte de hausse du coût des matières premières, lié au retour de l'inflation, qui affecte durablement le secteur de la restauration collective, le Gouvernement a pris plusieurs dispositions d'urgence pour accompagner les acteurs de la restauration collective. Un groupe de travail économique du conseil national de la restauration collective a été installé le 8 juin 2022 à la demande des acteurs de la restauration collective. Dans ce cadre, le Conseil d'État a été saisi pour préciser les possibilités et modalités de modification des marchés publics en cours dans le contexte d'imprévision. Son avis rendu le 15 septembre 2022 a conduit à la publication d'une nouvelle circulaire de la Première ministre le 29 septembre 2022 et à la diffusion d'une fiche technique du ministère chargé de l'économie et des finances qui donne des précisions sur les modalités de modifications des contrats dans le cadre de l'imprévision. En outre, des outils ont été élaborés dans le cadre de ce groupe de travail pour faciliter l'exécution des marchés (référentiel d'indices de prix, référentiel commun fournisseurs/acheteurs pour apprécier les demandes, guide pratique pour les acheteurs). Ils sont mis en ligne sur la plateforme gouvernementale « ma cantine ». Par ailleurs, face à la hausse des prix des denrées due à l'inflation, dans le cadre de la loi de finances rectificative 2022, un filet de sécurité est mis en place pour certaines communes ou groupements de communes (sous conditions d'éligibilité), et une dotation complémentaire au titre de l'année 2022 pourra être versée au premier trimestre 2023. Enfin, des dispositifs existants peuvent accompagner financièrement les restaurations scolaires pour permettre des approvisionnements durables et de qualité, tout en préservant les tarifs aux familles. C'est notamment le cas de l'aide à la tarification sociale pour les communes éligibles à la dotation de solidarité rurale « péréquation », permettant une tarification à 1 euro maximum pour les familles les plus modestes et une aide de 3 euros par repas, versée par l'État à la commune qui peut compenser le différentiel de tarification mais aussi une partie du coût de fabrication et de distribution du repas. En outre, le programme européen Fruits et Lait à l'école, accessible à toutes les restaurations scolaires de la maternelle au lycée, permet le remboursement d'un forfait correspondant à l'écart de prix entre un produit biologique ou sous signe de qualité (SIQO) et un produit standard (pour les fruits, légumes, lait, produits laitiers, sous condition de préparation et distribution lors du repas de midi). Ce programme a été simplifié pour être accessible au plus grand nombre de restaurants scolaires, sachant qu'une enveloppe de 35 millions d'euro est réservée à la France.

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