Question de M. DARNAUD Mathieu (Ardèche - Les Républicains) publiée le 09/12/2021
M. Mathieu Darnaud attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conditions de vente, à un particulier, de parcelles forestières appartenant à des collectivités.
Il rappelle que les communes souhaitant vendre à un particulier des parcelles forestières gérées par l'office national des forêts (ONF) sont confrontées à de nombreux obstacles.
En effet, selon les dispositions des articles L. 211-1, L. 214-3 et R. 214-2 du code forestier, la cession à un particulier d'une parcelle relevant du régime forestier, ne peut intervenir que lorsque l'autorité compétente - à savoir le préfet - en cas d'accord de l'ONF et de la collectivité ou personne morale intéressée, ou le ministre en charge des forêts à défaut d'un tel accord, a distrait cette parcelle dudit régime. Il n'est donc pas possible, pour une collectivité, de réaliser la vente d'une parcelle forestière à un particulier tant que la distraction du régime forestier n'est pas intervenue.
Afin de l'obtenir, l'avis technique de l'ONF est sollicité par la direction départementale des territoires (DDT) pour instruire le dossier. Or, cet avis n'est favorable que s'il existe une continuité du régime forestier, impliquant donc que les parcelles concernées ne puissent être vendues qu'au bénéfice d'une collectivité, d'un établissement public ou de l'État, mais quasiment jamais à un particulier.
À la demande des communes propriétaires de forêts, les règles du régime forestier pourraient être assouplies en autorisant la vente de leurs parcelles à un particulier lorsque ni l'État ni aucune collectivité ne souhaitent les acquérir.
Il demande donc au Gouvernement s'il entend faire évoluer le droit en vigueur en ce sens.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/02/2022
Conformément à l'article L. 211-1 du code forestier, les bois et forêts susceptibles d'aménagement, d'exploitation régulière ou de reconstitution qui appartiennent aux collectivités et auxquels ce régime a été rendu applicable relèvent du régime forestier. L'article L. 121-3 du code forestier précise que le régime forestier vise à satisfaire de manière spécifique à des besoins d'intérêt général : « Les bois et forêts relevant du régime forestier satisfont de manière spécifique à des besoins d'intérêt général soit par l'accomplissement des obligations particulières prévues par ce régime, soit par une promotion d'activités telles que l'accueil du public, la conservation des milieux, la prise en compte de la biodiversité et la recherche scientifique. » Le Conseil d'État a rappelé dans l'arrêt « Soubielle » du 30 avril 2009 que la cession d'une forêt relevant du régime forestier suppose préalablement sa distraction. Toute vente en méconnaissance de cette distraction préalable est nulle. Sur le plan de la procédure, conformément au principe du parallélisme des compétences et des procédures dans le silence des textes, la distraction du régime forestier est prononcée dans les mêmes formes que la décision par laquelle est prononcée l'application du régime forestier, comme l'a admis la jurisprudence (arrêt n° 380768 du Conseil d'État du 23 décembre 2015, comité de défense du bois de Rochottes). L'application du régime forestier est régie par les articles L. 214-3 et R. 214-2 du code forestier. Ceux-ci prévoient que l'application du régime forestier est prononcée sur proposition de l'office national des forêts (ONF) par l'autorité administrative compétente de l'État, après avis de la personne morale intéressée. En cas de désaccord entre la personne morale intéressée et l'ONF, l'application est prononcée par le ministre chargé des forêts. Par parallélisme, lorsqu'il y a accord de l'ONF sur la demande de distraction, la décision est prise localement par le préfet à l'échelon départemental. Lorsqu'il y a désaccord de l'ONF sur la demande de distraction, la décision est prise par le ministre chargé des forêts. L'avis de la direction départementale des territoires est également recueilli. La distraction du régime forestier prend en compte les caractéristiques des bois et forêts qui appartiennent à la collectivité. Lorsque les bois et forêts sont « susceptibles d'aménagement, d'exploitation régulière ou de reconstitution », un refus d'abrogation est légal. Comme l'a indiqué la rapporteure publique du Conseil d'État sur l'affaire CE, Sect., 21 décembre 2018, Commune de St Jean de Marsacq, n° 404912 « dès lors que les textes prévoient l'application du régime forestier pour tous les bois et forêts qui répondent aux conditions posées à l'article L. 211-1 du code forestier, il nous semble également que l'État pourrait légalement refuser la distraction du régime au motif que les bois en question remplissent les conditions de fond pour y être soumis ». Ceci n'exclut néanmoins pas la prise en compte des cas dans lesquels l'intérêt général s'attachant au maintien du régime forestier, dès lors que les conditions en sont remplies, puisse être contrebalancé par d'autres intérêts publics ou privés. La prise en compte, dans la procédure d'application du régime, de l'avis de la collectivité intéressée, va dans le sens d'une mise en balance des intérêts en présence. Ainsi, la décision de distraire une forêt est prise en fonction de ses caractéristiques et des intérêts généraux en présence et en aucun cas et de façon automatique, du seul fait que l'acquéreur éventuel est un propriétaire privé non mentionné au titre de l'article L. 211-1 du code forestier.
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