Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains-R) publiée le 09/12/2021
M. Olivier Paccaud attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur l'aggravation de la précarité alimentaire en France. Dans son rapport annuel sur l'état de la pauvreté en France, le Secours catholique dresse un constat alarmant, celui que notre pays ne réunit pas les conditions d'un accès digne, serein et universel à l'alimentation. Si les confinements et la crise sanitaire ont certes provoqué un choc budgétaire supplémentaire chez les familles les plus pauvres, c'est une tendance mesurée sur le temps long qui doit nous alerter, celle d'une insécurité alimentaire qui toucherait près de 10 % de la population, notamment chez de nombreux travailleurs, retraités et étudiants dont on ne doit ignorer ni la détresse sociale, ni les risques sanitaires que supposent de tels déficits d'alimentation.
En outre, le rapport de l'association rappelle que la situation est aggravée par le non-recours aux aides sociales auxquelles certaines familles pourraient prétendre. En effet, parmi l'ensemble du public accueilli par le Secours catholique, un tiers des personnes éligibles au revenu de solidarité active (RSA) n'en bénéficie pas, et un quart de ceux ayant droit à des allocations familiales n'y a pas recours. Simplifier l'accès à ces prestations sociales doit nous apparaître comme un impératif absolu dans la poursuite de cette lutte contre l'insécurité alimentaire.
Aussi, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour garantir un droit fondamental et reconnu internationalement, celui de l'accès de tous à l'alimentation.
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Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 15/12/2021
Réponse apportée en séance publique le 14/12/2021
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1979, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Paccaud. Madame la ministre, alors que la question du pouvoir d'achat se trouvera au cur de la campagne présidentielle, un récent rapport du Secours catholique sur l'état de la pauvreté en France rappelle à l'ordre le Gouvernement. Outre les préoccupations des ménages en matière de coût de l'énergie et des carburants, plusieurs millions de nos concitoyens souffrent encore de la faim.
Le constat est alarmant : la direction générale de la cohésion sociale estime qu'entre 5 et 7 millions de Français ont eu recours à l'aide alimentaire en 2020, contre 5,5 millions en 2017 et 2,6 millions en 2006.
Les confinements et la crise sanitaire ont, certes, provoqué un choc budgétaire supplémentaire chez les familles les plus pauvres ; pourtant, c'est la tendance mesurée sur le temps long qui doit nous alerter, soit une insécurité alimentaire qui toucherait près de 10 % de la population.
Loin de ne concerner que les sans-abri ou les étrangers en situation irrégulière, le besoin d'aide alimentaire est aussi massivement exprimé par des travailleurs, des retraités et des étudiants. On ne saurait ignorer ni leur détresse sociale ni les risques sanitaires qui pèsent sur eux.
À ces tristes observations s'ajoute le fait que l'aide alimentaire repose essentiellement sur la redistribution de produits invendus. Comment se satisfaire, dans un pays reconnu pour sa gastronomie et la qualité de ses productions agricoles, de ne céder aux plus vulnérables d'entre nous que les « restes » d'une société surconsommatrice, rendue malade par ses inégalités ?
Aucune « indemnité inflation », aucun semblable expédient palliatif ne saurait soulager durablement ces milliers de familles éprouvées par la précarité alimentaire.
Aussi ma question est-elle simple : quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour faire advenir les conditions d'un accès digne, serein et universel à l'alimentation ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Je vous remercie, monsieur le sénateur Olivier Paccaud, de poser la question en ces termes.
Je travaille depuis très longtemps sur le sujet à titre bénévole et je considère en effet que nous devons produire notre aide alimentaire et ne pas nous contenter de récupération. Je vous rejoins donc sur ce point ; j'ai d'ailleurs créé deux associations en ce sens.
Il est indéniable que le nombre des bénéficiaires de l'aide alimentaire a augmenté au cours des deux dernières décennies. C'est un motif d'inquiétude récurrent depuis plus de vingt-cinq ans quant à la réponse développée par tous les acteurs mobilisés pour sécuriser, quantitativement et surtout qualitativement, l'accès aux denrées des personnes en situation de vulnérabilité sociale.
La réponse à ces situations s'appuie sur un maillage associatif dense sur tous les territoires, qui s'est progressivement développé, mais aussi sur les collectivités. Dans ce cadre, l'État finance l'approvisionnement en denrées de bonne qualité nutritionnelle et accompagne les associations dans l'amélioration du service rendu.
Alors que le Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD) disposait d'une enveloppe de 587 millions d'euros pour la période allant de 2014 à 2020, l'enveloppe financière définitive allouée au programme « aide alimentaire » du Fonds social européen (FSE+) français est de 647 millions d'euros de 2021 à 2027.
Quelque 100 millions d'euros supplémentaires sont, en outre, mobilisés entre 2021 et 2022 grâce au plan de relance, via un appel à projets, pour répondre aux enjeux de la lutte contre la précarité alimentaire. Quelque 741 projets ont été retenus, dont la majorité vise cet objectif. Les projets retenus témoignent de l'engagement et de l'innovation du monde associatif face à un contexte exacerbé par la crise sanitaire.
Vous mentionnez également le poids du non-recours aux droits sociaux, qui est réel, mais qui recule grâce à notre action déterminée. Ainsi, à la fin de 2017, quelque 2,8 millions de foyers bénéficiaient de la prime d'activité, ils sont 4,6 millions à la fin de 2020. Les caisses d'allocations familiales (CAF) se mobilisent aussi : en 2020, tout le monde obtient des rendez-vous, lesquels donnent lieu à 72 000 ouvertures de droits nouveaux.
Il me semble également nécessaire de rappeler que nous avons instauré les petits-déjeuners à l'école, afin de lutter contre une certaine forme de précarité alimentaire des familles et des enfants.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je suis navrée, monsieur le président, mais je puis être très longue sur ce sujet !
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.
M. Olivier Paccaud. Je remercie les associations de tout ce qu'elles font, mais l'une des réponses à ce problème est peut-être de simplifier l'accès aux prestations sociales pour ceux qui doivent en bénéficier, mais qui, parfois, n'osent pas aller les chercher.
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