Question de M. COZIC Thierry (Sarthe - SER) publiée le 07/10/2021

Question posée en séance publique le 06/10/2021

M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Thierry Cozic. Ma question s'adresse au ministre de l'économie, des finances et de la relance, représenté ici par M. le ministre Olivier Dussopt.

Le chiffre – 11 300 milliards de dollars – est si vertigineux qu'il ne représente plus rien dans l'imaginaire collectif, si ce n'est, mes chers collègues, qu'il pèse cinq fois le produit intérieur brut de la France ! Nul besoin d'être haut fonctionnaire pour comprendre que l'évasion fiscale nous coûte un « pognon de dingue ».

OffshoreLeaks, ChinaLeaks, Panama Papers, et j'en passe, qu'est-ce qui a changé depuis ? Pas grand-chose ! Sauf que de révélations en révélations, les chiffres sont chaque fois plus colossaux. Chacun de ces scandales vient révéler l'incapacité du Gouvernement à surveiller efficacement ces territoires opaques du monde financier.

Alors que d'aucuns dissertent doctement sur l'idée de travailler jusqu'à 67 ans – pourquoi pas 80, tant qu'on y est –, le Gouvernement sait parfaitement déployer toute l'énergie qui sied lorsqu'il s'agit de traquer de fantomatiques acheteurs d'écrans plats. Mais dès lors que l'on touche aux 1 % des plus riches, il est aux abonnés absents !

Nous devons sortir du mythe selon lequel le système offshore est un outil neutre, simplement mal utilisé par certains. En lui-même, ce système est porteur d'inégalités, car il permet de rompre le contrat social et pousse les plus riches à faire sécession.

Certains sur ces travées étaient bien plus prolixes quand il s'est agi d'aborder le séparatisme religieux ; leurs voix se font moins sonores lorsque ce séparatisme se fait financier. Je ne doute pas, mes chers collègues, que vous sortirez prochainement de ce silence assourdissant.

Pas d'« argent magique », donc, pour les services publics, mais beaucoup d'argent caché au service des plus riches.

M. David Assouline. Les écrans plats !

M. Thierry Cozic. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner clairement les mesures que vous comptez mettre en place afin d'arrêter cette hémorragie que constitue la fuite des capitaux français dans des paradis fiscaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Comptes publics publiée le 07/10/2021

Réponse apportée en séance publique le 06/10/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Comme je l'ai indiqué en réponse aux questions précédentes sur le même sujet, la direction générale des finances publiques (DGFiP) est pleinement mobilisée pour exploiter et analyser l'intégralité des données révélées par la presse dans le cadre de l'affaire Pandora Papers, et ce sur ma demande et celle de Bruno Le Maire.

Cette affaire, je tiens à le préciser, est une affaire internationale concernant 117 pays dans lesquels 600 journalistes ont mené des investigations. Les chiffres « énormissimes » qui viennent d'être rappelés ne concernent donc pas uniquement la France.

J'ai également eu l'occasion de souligner que, dans le cadre d'un autre scandale financier – les Panama Papers –, les investigations de la DGFiP ont permis de régulariser 657 dossiers, les autres dossiers ne concernant pas des contribuables français.

Que faire, me demandez-vous, monsieur le sénateur Cozic ? Nous appliquons la loi de 2018, avec la création d'une politique fiscale. Nos services, malgré le confinement et l'arrêt des contrôles sur pièces que celui-ci a entraîné en 2020, sont parvenus à encaisser près de 8 milliards d'euros de redressements et de sanctions, uniquement en France, dans le cadre de la lutte contre la fraude fiscale.

Au niveau européen, les échanges de données, portant sur 84 millions de comptes et concernant plusieurs milliers de milliards d'euros d'actifs, ont permis à l'Europe de détecter des fraudes et d'encaisser plus de 100 milliards d'euros de revenus complémentaires.

Nous avons mis en place des systèmes nouveaux, y compris d'information. Nous avons par exemple pérennisé le système de la rémunération des aviseurs, système proposé par votre collègue de l'Assemblée nationale, Christine Pires Beaune. Nous avons aussi développé des systèmes d'analyse de données – data mining, en mauvais français – et cette analyse de données, associée à l'intelligence artificielle, nous a permis de procéder à 800 millions d'euros de redressements l'année dernière.

C'est pourquoi, monsieur le sénateur Cozic, face à votre colère, je ne peux qu'exprimer un regret : vous auriez pu voter les outils et les crédits permettant à l'administration fiscale de développer cette analyse de données ; vous ne l'avez pas fait ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées du groupe SER.)

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