Question de Mme DELATTRE Nathalie (Gironde - RDSE) publiée le 11/03/2021

Mme Nathalie Delattre interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation concernant la réglementation opposable au statut d'aidant familial dans le cadre d'une aide apportée par un conjoint retraité à son conjoint exploitant.
Dans une réponse à la question n°21751 publiée dans le Journal officiel du 30 juin 2016, le ministre de l'agriculture de l'époque avait précisé que la notion de « coup de main » était « une activité ponctuelle d'échange de service gratuit entre personnes d'une même famille ». De fait, cette réponse semble ne pas exonérer un exploitant agricole, invoquant la notion de « coup de main » pour son conjoint, du respect des règles visant le travail illégal sur la base d'une circulaire de votre ministère de 1986.
En effet, le cadre actuel des contrôles effectués par les contrôleurs de la mutualité sociale agricole (MSA) ou par les services du ministère du travail, de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), ou des services de la gendarmerie concernant la pratique éventuelle d'un travail illégal sur l'exploitation du conjoint n'est pas clairement défini. À ce jour, le code du travail et ses articles L. 8221-3 et L. 8221-5, qui définissent ce qu'est le travail dissimulé ne se réfèrent ni à une durée précise, ni à une notion d'habitude ou de répétition pour qualifier ce dernier. De fait, les aidants familiaux sont donc confrontés à un flou juridique lorsqu'ils sont contrôlés par les personnes précédemment citées. Alors que cette circulaire est applicable au régime agricole, autorisant une activité ponctuelle de 10 à 15 heures par semaine, celle-ci n'est pas opposable aux agents de contrôle ainsi qu'au code du travail, qui n'y fait nullement référence. Il est de fait nécessaire de clarifier cette situation aux fins que les contrôles s'opèrent dans les meilleures conditions.
Pourtant, alors que dans la réponse à la question écrite n°21751, le ministre de l'agriculture de l'époque avait répondu que « la notion d'entraide familiale entre un agriculteur retraité et l'un des membres de sa famille qui a repris l'exploitation relève d'une tolérance, basée sur les usages et la jurisprudence », cette entraide entre ascendants et descendants n'est malheureusement dans les faits pas admise dans la pratique, et non reconnue par la MSA. Elle lui demande donc d'actualiser la directive de 1986 relative à la réglementation opposable au statut d'aidant familial, en intégrant les propos de son prédécesseur.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 09/12/2021

La notion d'entraide familiale entre un agriculteur retraité et l'un des membres de sa famille qui a repris l'exploitation relève d'une tolérance, fondée sur les usages et la jurisprudence. Elle se traduit par des situations d'entraide ponctuelle et occasionnelle qui relèvent d'un échange, volontaire et gratuit, de services entre des personnes ayant des liens de parenté. Le « coup de main occasionnel » donné ainsi par un exploitant retraité dans le cadre d'une transmission familiale, permet de faire profiter son successeur de son expérience, de son savoir-faire et de sa compétence. Une jurisprudence constante établit trois critères, cumulatifs, pour qualifier une situation d'entraide familiale. Celle-ci ne doit pas être durable ou régulière, ne doit en aucun cas établir un lien de subordination et ne peut se substituer à un poste de travail nécessaire au fonctionnement normal d'une entreprise ou d'une activité professionnelle. Le juge apprécie in concreto le respect de ces critères. Il prend en compte le contexte dans lequel s'inscrit l'entraide (Cour d'appel d'Angers, 17 décembre 2013, 12/01538). Ce sujet est particulièrement prégnant. En effet, une requalification en salariat de la relation de travail implique un changement de statut social des personnes concernées, des sanctions pénales ainsi que d'importants redressements s'agissant des cotisations et des contributions sociales. Ce point a été rappelé dans la convention nationale de partenariat relative à la lutte contre le travail illégal en agriculture (CNLTI-A) pour les années 2019 à 2021 (point 3-2) signée le 10 septembre 2020 par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, les principales organisations professionnelles d'employeurs et organisations syndicales de salariés et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA). Il faut toutefois souligner qu'il s'avère, après expertise menée auprès des services centraux du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, du ministère du travail, de l'emploi et de l'insertion et de la CCMSA que cette pratique du « coup de main occasionnel » est bien connue des services de contrôle et ne pose pas aujourd'hui de difficultés particulières d'application lors des contrôles effectués sur les exploitations. Aucune intervention de contrôle, ni aucun contentieux récent n'ont été recensés. Néanmoins, et compte tenu du caractère particulier de cette tolérance, il sera rappelé par la CCMSA aux caisses de mutualité sociale agricole quels sont les contours et les limites du « coup de main occasionnel » qu'un conjoint retraité agricole peut apporter dans le cadre de l'entraide familiale.

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