Question de M. RIETMANN Olivier (Haute-Saône - Les Républicains) publiée le 03/12/2020

M. Olivier Rietmann attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur l'opération de réorganisation nouveau réseau de proximité (NRP) lancée en 2019 et sur ses effets sur la direction générale des finances publiques (DGFIP).

Le Gouvernement affiche un triple objectif : augmenter le nombre de communes dans lesquelles la DGFIP apportera un service de proximité aux usagers, notamment dans les espaces et maisons France services ; répondre de façon plus satisfaisante aux besoins de conseil des élus locaux par la spécialisation de conseiller aux décideurs locaux (CDL) ; opérer un rééquilibrage dans la localisation des services de la DGFIP et des transferts des grandes métropoles vers les territoires.

S'il partage l'objectif d'une adaptation des services publics, au même titre que pour toute organisation privée qui veut notamment tirer parti des évolutions technologiques, il s'inquiète toutefois des conséquences d'une nouvelle réforme ayant trait aux services publics qui ne sont pas des services marchands.

Il l'interroge en premier lieu sur ses motivations à défendre une dématérialisation continue qui tend progressivement vers une déshumanisation et qui expose encore davantage des millions de Français touchés par l'illectronisme ou peu mobiles au sein de territoires ruraux mal desservis par les transports publics.

En second lieu, il souhaite connaître les dispositifs mis en œuvre par le Gouvernement pour garantir la qualité du service rendu par l'administration. Nul ne peut en effet affirmer qu'un accueil téléphonique ou en visioconférence remplacera avantageusement un échange direct. Et si l'argument de la proximité est mis en avant, nul ne peut affirmer qu'un accueil par un employé d'une maison de service aux publics (MSAP) ou d'un établissements France services (EFS) sera à la hauteur du service rendu par un agent de la DDFIP dans un domaine fiscal par nature très complexe mais aussi évolutif, en dépit des efforts de simplification menés. Il l'interroge en particulier sur l'instance de proximité la plus adaptée pour répondre à un contribuable qui solliciterait le bénéfice d'un plan d'étalement d'une dette.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès des ministres de l'économie, des finances et de la relance, et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques publiée le 20/01/2021

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2021

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Rietmann, auteur de la question n° 1396, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.

M. Olivier Rietmann. Ma question est très proche de celle de ma collègue Apourceau-Poly, mais, comme le disait le philosophe, répétez, répétez, il en restera toujours quelque chose !

Depuis 2019, les finances publiques ont engagé à l'échelon national une vaste opération de réorganisation appelée NRP, pour nouveau réseau de proximité. Je connais et je partage en partie vos objectifs, monsieur le secrétaire d'État. Aucune administration ne peut rester figée, et nous devons exploiter les potentiels offerts par les nouvelles technologies. Pour autant, permettez-moi de vous faire part du constat des maires et des conseillers départementaux de la Haute-Saône et de relayer leur question.

Leur constat est d'ordre sociétal. Pour des millions de Français, déjà confrontés à la fracture numérique et dont les capacités en informatique sont inexistantes ou limitées, cette dématérialisation à marche forcée est un accélérateur du délitement des relations humaines.

Leur question est d'ordre très pratique. Elle porte sur la qualité du service rendu par notre administration.

Ce nouveau réseau fait la part belle aux maisons de services au public (MSAP) et aux établissements France Services. Or nul ne peut affirmer qu'un accueil par les employés de ces structures sera à la hauteur du service rendu par un agent de la DDFiP. À titre d'exemple, auprès de quelle instance de proximité un contribuable, souvent modeste, pourra-t-il argumenter afin de bénéficier d'un plan d'étalement d'une dette ?

Sur un autre plan, qui intéresse tout particulièrement les collectivités locales, la fermeture de trésoreries de proximité fragilisera les régies municipales dès lors que tous les paiements perçus ne peuvent être dématérialisés. Je pense aux forains sur les marchés et au nombre insuffisant de bureaux de poste pouvant recevoir des versements.

Comment entendez-vous assurer la qualité du service rendu aux administrés et quelles bornes allez-vous mettre à la démarche de dématérialisation continue, qui nous entraîne progressivement vers une déshumanisation et qui, de mon point de vue, est insupportable ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Olivier Rietmann, le maillage de la DGFiP, l'un des plus denses de l'État, reflète la diversité de ses missions, mais également une organisation qui ne correspond plus aux besoins actuels, comme vous l'avez d'ailleurs souligné dans votre question. Le nouveau réseau de proximité vise précisément à rapprocher les services publics de nos concitoyens, en ligne et hors ligne, et à tenir compte des besoins spécifiques de nos différents publics, en offrant aux élus et à nos concitoyens un service modernisé, plus proche et répondant mieux à leurs demandes.

Le NRP se traduira ainsi par une augmentation du nombre d'accueils de proximité de plus de 40 %, aussi bien dans les maisons France Services que dans les mairies, notamment dans les communes les plus reculées. Il s'agit tout particulièrement de se rapprocher des usagers les moins mobiles et les moins à l'aise avec le numérique afin de garantir l'accès de tous à nos services, notamment dans les communes les plus éloignées des centres urbains.

La DGFiP veille à ne pas imposer la dématérialisation à ses usagers. La déclaration en ligne n'est d'ailleurs obligatoire, je le rappelle, que pour ceux qui sont en mesure de la réaliser. Les services en ligne et les services téléphoniques, tout comme les échanges en visioconférence qui commencent à être proposés, viennent donc en complément et non en remplacement des accueils physiques. Ils répondent d'ailleurs à une attente très forte d'une grande majorité des usagers, qu'il faut également prendre en compte et qui souhaitent, lorsque c'est possible, réaliser leurs démarches en toute autonomie ou être assistés à distance afin d'éviter de se déplacer.

Par ailleurs, afin d'accompagner les usagers qui le désirent dans leurs premières démarches en ligne, la DGFiP met à leur disposition, dans les halls de ses centres des finances publiques, mais aussi dans les relais externes, notamment les structures France Services, des ordinateurs et une offre d'accompagnement pédagogique.

L'enjeu est donc de permettre à chacun d'utiliser les différents canaux de contact proposés, en favorisant l'autonomie, mais en accompagnant et en renforçant en parallèle la présence de proximité.

La DGFiP porte une grande attention à la qualité du service offert dans les accueils de proximité, aussi bien dans les maisons France Services que dans les permanences en mairie.

Il convient de rappeler que les structures France Services doivent répondre à des critères exigeants pour obtenir ce label et que tous leurs animateurs suivent un cycle de formation très complet. Les usagers bénéficient ainsi d'un accueil dédié, par des agents aux compétences élargies, qui prennent en charge toute demande de premier niveau et tout souhait d'accompagnement dans la réalisation d'une démarche, qu'elle soit réalisée sur papier ou en ligne.

Par ailleurs, les agents des finances publiques seront disponibles pour répondre aux questions plus complexes, soit à distance, soit lors des permanences organisées notamment en mairie.

Enfin, la DGFiP s'est engagée à assurer, conjointement avec les élus, un suivi de cette nouvelle organisation pour s'assurer que celle-ci répond bien aux besoins des usagers et aux attentes des élus.

En complément, je le rappelle, la possibilité de payer chez les buralistes agréés, implantés dans les villages, se déploie progressivement et offre aux usagers une amplitude horaire plus large que celle des services de la DGFiP.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour la réplique.

M. Olivier Rietmann. Monsieur le secrétaire d'État, ne vous faites pas d'illusion : ces restructurations et ces fermetures de services éloignent toujours plus les usagers des services de la DGFiP. Ne niez pas l'évidence !

Il faut que le Gouvernement rompe avec l'hypocrisie et assume le fait que la fermeture des trésoreries provoquera un affaiblissement de la qualité de l'accueil et du conseil fiscal. Elle accentuera inexorablement le sentiment d'abandon, bien légitime, de nos territoires ruraux par l'État. La France n'est pas uniforme, vous semblez l'oublier !

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