Question de M. BOCQUET Éric (Nord - CRCE) publiée le 19/11/2020
M. Éric Bocquet attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le mouvement de révolte au Nigéria.
Depuis plusieurs semaines maintenant, des manifestations agitent le pays. Elles font suite à la diffusion d'une vidéo montrant des agents d'une brigade spéciale de la police nigériane (la SARS) tuant un homme à Ughelli. Cette brigade est connue pour son extrême brutalité et, cette fois, le crime commis a fait déborder le vase bien plein des nombreuses violences et exactions perpétrées par la police et l'armée.
Le Nigéria voit ainsi sa jeunesse se soulever. Ce mouvement pacifique est d'ailleurs devenu, au-delà des seules violences policières, une contestation plus globale du pouvoir.
En effet, le Nigéria, qui compte 200 millions d'habitants, est la première puissance économique du continent africain. Et pour autant les inégalités sont abyssales. Le revenu moyen est de 5 dollars par jour et 90 millions de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour. L'espérance de vie plafonne à 52 ans. Selon l'UNESCO, le Nigéria compte la population d'enfants non scolarisés la plus importante au monde et le taux d'alphabétisation est particulièrement faible.
C'est dans ce sens que la jeunesse nigériane réclame la justice, la fin de l'arbitraire et la redistribution des richesses.
Mais ce mouvement pacifique est réprimé avec force par le pouvoir qui met ainsi de l'huile sur le feu, faisant du Nigéria une véritable poudrière. Pour exemple, le 20 octobre 2020, plus de mille manifestants rassemblés à un péage à Lagos ont été dispersés par des tirs à balles réelles. Amnesty International relèvera 12 morts et des dizaines de blessés. D'autres exactions ont été commises depuis, un couvre-feu a été instauré pour tenter de stopper la révolte et les comptes bancaires d'une vingtaine de figures du mouvement ont été gelés sur décision de la Banque centrale nigériane.
Cette posture des dirigeants nigérians est particulièrement inquiétante à tel point que l'ONU a appelé à « la fin des brutalités et des abus policiers au Nigéria » et de nombreux observateurs estiment que la situation est explosive.
C'est pourquoi il lui demande quelle est la position du Gouvernement face à cette situation au Nigéria.
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 04/03/2021
Compte tenu de son poids démographique, économique, culturel et politique, le Nigéria est un partenaire incontournable de la France sur le continent africain. Outre le soutien apporté par notre pays à la lutte contre le terrorisme dans la région du lac Tchad, les relations bilatérales franco-nigérianes s'intensifient, en particulier dans les domaines économique, de l'entrepreneuriat, de la culture, de l'éducation, ou encore du soutien à la jeunesse. Le Président de la République s'est ainsi rendu au Nigéria en juillet 2018, et le Président de la République du Nigéria, M. Muhammadu Buhari, effectuera une visite en France au printemps prochain. Dans ce contexte, le 22 octobre 2020, la France a exprimé sa vive préoccupation après les violences qui ont eu lieu à Lagos et dans d'autres villes du Nigeria. Elle a alors appelé les forces de sécurité nigérianes à faire preuve de la plus grande retenue et les manifestants à s'exprimer par des voies pacifiques. Elle a également affirmé que seul le retour au calme permettrait de répondre aux aspirations de justice exprimées par le peuple nigérian. La France continue de suivre avec attention les suites de ces événements, et en particulier le travail des commissions judiciaires qui ont été mises en place dans plusieurs États fédérés pour enquêter sur les violences policières. Ces enquêtes devront permettre de faire toute la lumière sur les violences perpétrées au péage de Lekki, à Lagos, le 20 octobre dernier.
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