Question de Mme IMBERT Corinne (Charente-Maritime - Les Républicains-R) publiée le 29/10/2020

Mme Corinne Imbert attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur la question de l'avenir des moulins à eau. Le 30 juin 2020, le précédent Premier ministre a accéléré le processus de destruction des moulins en eau en autorisant par décret le passage d'un régime d'autorisation à un régime de déclaration concernant les démolitions des barrages des moulins. Cette démarche est censée favoriser la préservation de certaines espèces aquatiques et ainsi présenter des vertus en matière de biodiversité sur le long terme. Or, aucune étude d'impact n'a pour le moment démontré l'utilité de ce changement de paradigme sur l'ensemble du territoire. De la même manière, ces moulins à eau, pour beaucoup vestiges de l'époque médiévale, possèdent un potentiel non négligeable en matière d'hydroélectricité. De plus, les aménagements demandés pour leur maintien sont particulièrement onéreux pour les propriétaires et les subventions accordées insuffisantes. Enfin, les moulins à eau ont un rôle prépondérant en matière d'irrigation des plans d'eau. Il conviendrait alors de s'intéresser aux véritables raisons qui menacent aujourd'hui notre faune aquatique et non de pénaliser les propriétaires de moulins à eau, acteurs séculaires de l'équilibre entre l'activité humaine et la préservation de l'environnement. Aussi lui demande-t-elle si le Gouvernement entend revenir sur cette décision et entreprendre une concertation visant à déboucher sur une solution respectueuse de l'environnement, de nos traditions et de notre patrimoine historique.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Transports publiée le 20/01/2021

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2021

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, auteure de la question n° 1337, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.

Mme Corinne Imbert. Ma question porte sur les difficultés rencontrées par les propriétaires de moulins à eau.

Le 30 juin 2020, le Premier ministre de l'époque, Édouard Philippe, a accéléré le processus de destruction des moulins en eau, en autorisant par décret le passage d'un régime d'autorisation à un régime de déclaration concernant la démolition des barrages des moulins.

Cette démarche serait censée favoriser la préservation de certaines espèces aquatiques et ainsi présenter des vertus en matière de biodiversité et de continuité écologique sur le long terme.

Ces moulins à eau, pour beaucoup vestiges de l'époque médiévale, possèdent un potentiel non négligeable en matière d'hydroélectricité. De plus, les aménagements demandés pour leur maintien sont particulièrement onéreux pour les propriétaires. Enfin, les moulins à eau ont un rôle prépondérant en matière d'irrigation des plans d'eau.

Il conviendrait alors de s'intéresser aux véritables raisons qui menacent notre faune aquatique et non pénaliser les propriétaires de moulins à eau, acteurs séculaires de l'équilibre entre l'activité humaine et la préservation de l'environnement.

Entre 10 000 et 20 000 seuils et barrages pourraient être concernés à terme par ces destructions.

Monsieur le ministre, j'aimerais savoir si le Gouvernement entend revenir sur cette décision et entreprendre une concertation visant à déboucher sur une solution respectueuse de l'environnement, de nos traditions et de notre patrimoine historique. N'est-ce pas, une nouvelle fois, une surinterprétation de directive européenne ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports. Madame la sénatrice, vous interrogez Mme Barbara Pompili, qui, ne pouvant être présente, m'a chargé de vous répondre.

La restauration de la continuité écologique des cours d'eau nécessite de concilier plusieurs enjeux qui semblent parfois contradictoires. Le Gouvernement a lancé en juin 2018 un plan d'action pour une mise en œuvre apaisée, après une large concertation de toutes les parties prenantes. Priorisation des ouvrages, meilleure prise en compte des enjeux patrimoniaux et sportifs, concertation renforcée, implication des collectivités locales, financements : de nombreuses actions sont en cours de déploiement.

Dans un contexte de réchauffement des eaux et d'état critique pour la biodiversité aquatique, cette politique reste une priorité – elle a d'ailleurs été réaffirmée lors des assises de l'eau en 2019, avec l'objectif de restaurer 25 000 kilomètres de cours d'eau d'ici à 2022. À l'échelon européen, c'est l'une des mesures phares de la stratégie en faveur de la biodiversité à l'horizon 2030.

Le décret du 30 juin 2020, auquel vous faites référence, n'est pas un décret anti-moulins : il permet de simplifier les procédures de travaux, en améliorant la qualité des cours d'eau et des écosystèmes dans une logique d'accélération attendue par nos concitoyens.

Tous les petits barrages, dont les seuils de moulins, peuvent avoir un impact significatif sur la migration des poissons et des sédiments et les écosystèmes d'eau douce. Il n'y a donc aucune raison objective d'exclure les seuils de moulins des obligations de réduction de leurs impacts.

Cependant, il n'y a pas d'incompatibilité entre cette ambition et la sauvegarde de notre patrimoine local lié à l'eau. Différentes possibilités de restauration de la continuité écologique existent ; la concertation locale permet d'identifier la meilleure solution au cas par cas, en prenant en compte les contraintes et les opportunités locales, qu'il s'agisse de la valeur historique, touristique ou énergétique ou des usages de loisir de l'ouvrage considéré.

S'agissant plus particulièrement de la petite hydroélectricité, le soutien à cette filière fait partie des objectifs de la politique énergétique. Afin de réduire les impacts environnementaux, la programmation pluriannuelle de l'énergie affiche une priorité à l'équipement de seuils existants, dans le respect de la restauration des milieux aquatiques, plutôt qu'à la création de nouveaux seuils.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.

Mme Corinne Imbert. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Vous l'avez dit vous-même, cette question soulève plusieurs enjeux contradictoires.

Concernant la migration des poissons, la localisation des moulins à eau ne permet pas toujours la mise en place d'un contournement de la rivière pour, à la fois, maintenir le barrage du moulin et faciliter la migration des poissons.

En général, je suis plutôt favorable à la simplification, mais je me pose toujours la question de savoir ce qui est essentiel – c'est d'ailleurs une question que nous devrions nous poser pour toutes les politiques publiques !

Le décret de simplification de juin 2020 est une décision politique qui va contribuer à détruire des paysages et un patrimoine séculaire. Il donne les pleins pouvoirs aux agences de l'eau, lesquelles pourront se passer d'une enquête publique et d'une étude d'impact pour araser ces barrages – c'est ce qui me dérange.

Je partage évidemment votre remarque sur la concertation locale. Les acteurs locaux, qu'ils soient politiques ou administratifs, sont certainement les mieux à même de déterminer ce qui doit être détruit et ce qui doit être conservé, ainsi que les aménagements à réaliser.

Sachez en tout cas, monsieur le ministre, que nous serons très attentifs à ce sujet en Charente-Maritime !

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