Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UC) publiée le 09/07/2020

Mme Françoise Férat attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la réelle application de la possibilité d'établir un bulletin de paie unique pour les contrats courts à cheval sur deux mois.
D'une part, le Parlement a voté, lors de la loi n° 2018-727 pour un État au service d'une société de confiance du 10 août 2018, la possibilité pour les employeurs de main-d'œuvre occasionnelle d'émettre un bulletin de paie unique lorsque le contrat de travail qui s'y rattache est établi pour une durée inférieure à un mois et réparti sur deux mois civils. Aujourd'hui, seul l'outil de paie proposé par la mutualité sociale agricole (MSA), le titre emploi service agricole (TESA) simplifié, permet la réalisation d'un bulletin de paie dit « à cheval », du fait qu'il ne soit pas éligible à la déclaration sociale nominative (DSN). Or, pour les employeurs de main-d'œuvre occasionnelle qui utilisent une autre solution paie (Tesa +, logiciels de paie), cette possibilité ne leur est pas permise car cela entraînerait des difficultés concernant les droits des salariés au titre de l'assurance maladie (signalements d'événements comme les arrêts maladie, accidents de travail, maternités…), ainsi qu'au titre de l'emploi (signalements de fin de contrat de travail, reprises de travail…). De ce fait, les employeurs de main-d'œuvre n'auraient pas d'autre choix que de générer un bulletin de paie par période, entraînant une surcharge administrative et des coûts supplémentaires pour un nombre limité de jours de travail.
D'autre part, la réalisation de deux bulletins de paie pour dix jours de travail pourrait entraîner dans certains cas la suppression mécanique d'exonération de cotisations patronales liées au dispositif travailleur occasionnel-demandeur d'emploi (TODE).
Le cahier technique de la DSN doit impérativement évoluer pour permettre le retour à cette simplification administrative lors de l'embauche de saisonniers.
Elle lui demande de bien vouloir veiller à une stricte application de ce texte en vigueur depuis le 10 août 2018 et de bien vouloir assurer que la réalisation d'une DSN avec un bulletin de paie unique à cheval sur deux mois civils sera techniquement et règlementairement possible et figurera à ce stade dans le cahier des charges de la DSN pour la vendange prochaine.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles publiée le 06/11/2020

Réponse apportée en séance publique le 05/11/2020

Mme le président. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 1250, transmise à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Françoise Férat. Le Parlement a voté en août 2018, dans la loi Essoc, la possibilité pour les employeurs de main-d'œuvre occasionnelle d'émettre un bulletin de paie unique lorsque le contrat de travail qui s'y rattache est établi à cheval sur deux mois civils. Par exemple, dans mon département, en Champagne, les vendanges ont débuté le 24 août et se sont terminées début septembre, soit deux bulletins de paie pour moins d'un mois de travail.

Deux ans plus tard, où en sommes-nous ? Seul l'outil de paie proposé par la MSA permet la réalisation d'un bulletin de paie unique. Pour les autres employeurs, c'est impossible ! Il faut que le pouvoir réglementaire et l'administration trouvent une solution simple et efficace. Inculquons du bon sens à l'ordinateur, simplifions la charge administrative des employeurs, réduisons les surcoûts de paperasse : la loi vous y oblige depuis deux ans maintenant !

Peut-on trouver une solution technique simple pour les prochains saisonniers ? Leurs employeurs vous en seront reconnaissants. Somme toute, il suffirait simplement d'appliquer la loi…

Mettons en place le bulletin de paie unique pour les contrats de courte durée étalés sur deux mois civils.

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Madame la sénatrice Françoise Férat, nous partageons votre souci de rationalisation et de simplification de l'ensemble des démarches pour nos administrés, qu'ils soient particuliers ou employeurs. Tel est le sens d'un certain nombre de lois et de dispositions qui ont été prises par le Gouvernement et par des gouvernements précédents.

Plus précisément, depuis la généralisation de la déclaration sociale nominative, la DSN, chaque employeur, quelle que soit la taille de l'entreprise, doit effectuer cette déclaration unique en matière de données sociales et la transmettre après l'établissement de la paie de chaque mois. Ce principe structurant est l'aboutissement des travaux de simplification et de rationalisation des démarches sociales des employeurs.

Soucieux de poursuivre cette rationalisation de la gestion par les entreprises de leurs obligations sociales, le Gouvernement a apporté certaines simplifications. À cet égard, la remise d'un bulletin de paie unique pour les contrats inframensuels à cheval sur deux mois civils que vous évoquiez est effectivement permise depuis la loi Essoc.

Toutefois, cette loi n'autorise pas à déroger à la périodicité de versement des salaires non plus qu'à celle de déclaration des droits des salariés aux organismes sociaux.

En effet, les données de la DSN doivent être transmises chaque mois à chaque organisme susceptible de verser des prestations aux assurés sociaux, que ce soit au titre du risque maladie, de la vieillesse, de la retraite ou du chômage, et ce, afin de mettre à jour les droits.

Autoriser à payer une seule fois le salarié ou à déclarer une seule fois les droits à la fin du contrat aurait par conséquent des répercussions défavorables très concrètes pour ces derniers. C'est la raison pour laquelle la loi n'a pas permis une telle dérogation.

Aussi, afin de garantir les droits des salariés, d'éviter toute rupture des droits et de permettre un calcul des prestations dues dans des délais brefs, il reste nécessaire, madame la sénatrice, de transmettre une DSN chaque mois civil. C'est pourquoi il est impossible de modifier le cahier des charges de la DSN sur ce point.

Mme le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour la réplique.

Mme Françoise Férat. Il n'est pas question de déroger à la loi. Les Champenois connaissent parfaitement la DSN. La MSA peut faire ce genre de bulletin de paie : c'est bien la preuve que ce n'est pas une prouesse technique.

Je sais bien que ce n'est pas votre domaine d'expertise, monsieur le secrétaire d'État, mais soyez mon porte-parole. Dans la mesure où l'on réussit à mettre en place de tels bulletins de paie dans une administration, je ne peux pas croire ce qui vient d'être dit, et je suis réellement désolée qu'on ne puisse pas aller au-delà dans notre pays. De fait, la loi n'est pas respectée.

Soyez assuré que je reviendrai inlassablement sur ce point, car votre réponse n'est vraiment pas convaincante : il n'est pas question de déroger à la déclaration.

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