Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 18/06/2020

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les inquiétudes de la filière betterave-sucre-éthanol à la suite de la diffusion récente d'un communiqué de la chambre syndicale française de la levure (CSFL).
Se plaignant de difficultés en matière d'approvisionnement en coproduits sucriers, indispensables à la fabrication de la levure, la CSFL demande au Gouvernement que les biocarburants ne se développent pas « au détriment de notre souveraineté alimentaire ». Cette levure, dont la boulangerie reste le débouché principal, est fabriquée à partir de la mélasse, un jus issu de la betterave.
Les professionnels, mis en cause, affirment au contraire qu'il n'y a aucun problème de disponibilité de mélasse et autres substrats sucrés en France et qu'ils livrent régulièrement les volumes demandés par l'industrie de la levure et les autres industries de la fermentation.
Ils précisent que la production d'éthanol à partir des mêmes substrats reste inchangée depuis plus de dix ans tout comme la production globale d'alcool agricole en France : 80 % de la mélasse est utilisée pour fabriquer des biocarburants et 20 % pour la levure. Pour répondre aux besoins croissants de biocarburants, la filière a choisi de faire évoluer la destination des productions françaises d'éthanol en réduisant ses exportations.
Si les prix demandés par la CSFL étaient pratiqués en France, les betteraves seraient alors payées très en dessous des prix de revient des agriculteurs français, alors que le secteur est déjà fortement impacté par la crise du sucre, la fin des quotas sucriers en octobre 2017 et la baisse des débouchés de l'éthanol-carburant du fait du confinement.
Il souhaite lui rappeler que le bioéthanol est une filière stratégique intégrée avec la production agricole et alimentaire française. Elle offre des solutions de lutte contre le réchauffement climatique et la réduction de la pollution de l'air. Enfin, elle a su être solidaire en assurant un approvisionnement local en matière sanitaire pour la production de gel hydroalcoolique grâce à sa production d'alcool nationale.
En n'utilisant que des betteraves et céréales cultivées en France et une partie des résidus de leur transformation en produits alimentaires, la filière française du bioéthanol, la première en Europe, représente 8 900 emplois en équivalent temps plein auxquels s'ajoutent les emplois liés à la production d'alcool traditionnel et ceux des sucreries et amidonneries associées.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir intervenir dans ce conflit commercial opposant producteurs français de levures et filière betterave-sucre-éthanol qui risque, finalement, de pénaliser un secteur français stratégique pour les années à venir.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 22/10/2020

Les filières betterave-sucre-éthanol et levures sont des filières complémentaires qu'il convient de ne pas opposer. La compétitivité du secteur sucrier constitue un élément fondamental pour assurer l'approvisionnement régulier de résidus sucriers au secteur de la fermentation et aux industries de la levure. Par ailleurs, le développement des biocarburants constitue un axe important de la transition écologique en contribuant à répondre à l'obligation communautaire d'atteindre 14 % d'énergies renouvelables dans les transports en 2030. Le Gouvernement a travaillé en étroite concertation avec les acteurs de la filière sucrière et levurière pour déterminer un cadre fiscal d'incitation à l'utilisation de bioéthanol dans les transports, qui tienne compte à la fois des engagements climatiques, ainsi que des besoins de l'industrie de la levure soumise à une forte concurrence internationale. Afin de répondre à l'obligation communautaire d'atteindre 14 % d'énergies renouvelables dans les transports en 2030, le Gouvernement a mis en place un dispositif fiscal visant à développer l'incorporation de bioéthanol dans l'essence. La taxe incitative relative à l'incorporation des biocarburants (TIRIB) constitue un levier majeur d'incorporation du bioéthanol dans l'essence. Les trajectoires sont désormais fixées sur une durée de deux ans, afin de donner davantage de visibilité aux professionnels. La part de l'incorporation du bioéthanol dans l'essence augmente régulièrement (de 7 % en 2016 à 8,6 % prévus en 2021). Cette progression significative a notamment été permise par l'intégration des résidus sucriers dans les matières premières éligibles à la TIRIB, dont la part est passée de 0,2 % en 2019 à 0,4 % en 2020, puis 0,8 % en 2021. Les discussions conduites dans le cadre du projet de loi des finances 2021 devraient permettre d'augmenter cette part de résidus sucriers au-delà de 0,8 % en 2022, tout en assurant un approvisionnement à la hauteur des besoins des industries de la levure. Le Gouvernement reste pleinement mobilisé au côté des régions, des élus et des acteurs de la filière pour garantir la compétitivité et la viabilité de la filière betterave-sucre française, au travers notamment du développement du bioéthanol au sein des énergies renouvelables dans les transports.

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