Question de Mme BONFANTI-DOSSAT Christine (Lot-et-Garonne - Les Républicains) publiée le 11/06/2020

Mme Christine Bonfanti-Dossat attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la souveraineté et l'indépendance sanitaires de la France. Trois semaines après le début de la phase de déconfinement, au moment où les terrasses des cafés et des restaurants reprennent vie en renouant avec cet esprit si français de convivialité, plusieurs secteurs fondamentaux de l'économie ont l'esprit moins festif et le cœur moins léger. La situation tristement emblématique du laboratoire pharmaceutique UPSA implanté à Agen au cœur du Lot-et-Garonne en est une illustration.

UPSA, ce sont 300 millions de boîtes de médicaments vendues chaque année dans plus de 60 pays, dont 98 % de la production est réalisée et conditionnée en Lot-et-Garonne. Ce sont 1 400 emplois directs et 3 600 emplois indirects dans ce département. C'est une entreprise qui, au cœur du cyclone du covid-19, a pu faire face à la demande exceptionnelle en produisant et distribuant un million de boîtes de paracétamol par jour.

Mais c'est aussi la triste illustration des politiques publiques industrielles contemporaines : baisse structurelle de la production (400 millions de boites en 2011, 300 millions de boites en 2019), tentation de délocalisation au regard des difficultés rencontrées sur le sol français (car oui, la France est toujours championne pour saborder ce qui marche) et concurrence étrangère défavorable pour ne pas dire déloyale.

Dans cette période d'incertitudes qui bouleverse les vieilles recettes et les conceptions passéistes d'une mondialisation heureuse, elle lui demande s'il compte poursuivre les trajectoires envisagées sans remettre en cause la technostructure qui a fait du concept de « politique industrielle » un oxymore.

Dans l'ère post-crise qui se dessine, il est primordial que la France intègre la nouvelle donne d'un patriotisme économique aigu, au risque d'un déclassement irréversible. En ce qui concerne l'industrie pharmaceutique, chaque acteur est en droit d'attendre un pilotage stratégique et une politique avantageuse du prix des médicaments « made in France » afin de créer un climat de confiance pour encourager la relocalisation de la production partout dans les territoires.

Il faut enrayer la machine infernale qui fait du déclin une fatalité : en 2005, la France était le premier pays producteur de médicaments en Europe ; quinze ans plus tard, elle est reléguée au quatrième rang.

Or, la crise du covid-19 a mis en lumière la nécessité absolue de produire en France.

Pour ce qui est d'UPSA, au regard de la forte capacité de ce fleuron industriel de répondre présent en temps de crise, des mesures de régulation économique (baisse de prix, générification) sont susceptibles de fragiliser et pénaliser sa production en menaçant par conséquent l'avenir du site industriel lot-et-garonnais.

Il n'est pas possible de tolérer de façon passive de telles décisions qui mettent notre pays en danger en rendant impossibles les conditions d'une indépendance sanitaire pourtant nécessaire.

Elle lui demande ce qu'il envisage pour éviter des tentations de délocalisation tout en favorisant le tissu industriel qui garantira à la France une réelle autonomie sanitaire.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé publiée le 17/06/2020

Réponse apportée en séance publique le 16/06/2020

M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, auteur de la question n° 1214, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Christine Bonfanti-Dossat. Un mois après le début de la phase de déconfinement, au moment où les terrasses de café et de restaurant renouent avec un esprit français si convivial, plusieurs secteurs, piliers fondamentaux de notre économie, ont l'esprit moins festif et le cœur moins léger. Je veux parler de notre souveraineté sanitaire et de la situation tristement emblématique du laboratoire pharmaceutique UPSA, implanté à Agen, au cœur du Lot-et-Garonne, c'est-à-dire non loin de la Gironde, madame la secrétaire d'État.

UPSA, ce sont 300 millions de boîtes de médicaments vendues chaque année dans plus de 60 pays, dont 98 % de la production est réalisée et conditionnée dans le Lot-et-Garonne. UPSA, ce sont aussi 1 400 emplois directs et 3 600 emplois indirects dans mon département. UPSA, c'est une entreprise qui, au cœur même du cyclone lié au Covid-19, a pu faire face à la demande exceptionnelle en produisant et en distribuant 1 million de boîtes de paracétamol par jour. Mais UPSA, c'est aussi la triste illustration des politiques publiques industrielles contemporaines : baisse structurelle de la production, tentation de délocalisation et concurrence étrangère déloyale.

S'agissant de l'industrie pharmaceutique, chaque acteur est en droit d'attendre un pilotage stratégique et une politique avantageuse en ce qui concerne le prix des médicaments « made in France », afin de créer un climat de confiance.

En 2005, la France était le premier producteur de médicaments en Europe. Quinze ans après, nous sommes relégués au quatrième rang. La crise du Covid-19 a mis en lumière la nécessité absolue de produire en France.

Pourtant, malgré la capacité avérée de ce fleuron industriel de répondre présent en temps de crise, des mesures de régulation économique, comme la baisse des prix ou la générification, sont susceptibles de pénaliser sa production en menaçant cruellement l'avenir du site situé dans le Lot-et-Garonne.

Madame la secrétaire d'État, qu'envisagez-vous pour éviter des tentations de délocalisation, tout en favorisant le tissu industriel qui garantira à la France une réelle souveraineté sanitaire ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Les ruptures de stock de médicaments sont une préoccupation majeure des pouvoirs publics. À ce titre, tout levier incitatif permettant de développer l'investissement dans les capacités de production de principes actifs, de matières premières et de médicaments sur le territoire de l'Union européenne est examiné.

Afin d'améliorer la situation, Agnès Buzyn a présenté le 8 juillet 2019 une feuille de route pour mieux prévenir, gérer et informer les patients et les professionnels de santé. Celle-ci est construite autour de vingt-huit actions et regroupée en quatre axes : promouvoir la transparence et la qualité de l'information, afin de rétablir la confiance et la fluidité entre tous les acteurs, du professionnel de santé au patient ; lutter contre la pénurie de médicaments par de nouvelles actions de prévention et de gestion au niveau de l'ensemble du circuit du médicament ; renforcer la coordination nationale et la coopération européenne pour mieux prévenir les pénuries de médicaments ; enfin, mettre en place une nouvelle gouvernance nationale en instaurant un comité de pilotage chargé de la stratégie de prévention et de lutte contre les pénuries de médicaments.

La crise du Covid-19 a confirmé le diagnostic posé et les mesures clés identifiées dans cette feuille de route. La France et, plus globalement, l'Union européenne ont vécu de manière forte la perte d'indépendance stratégique résultant de la délocalisation de la production pharmaceutique et des matières premières. La France doit rétablir ses capacités en matière de production industrielle, comme l'a rappelé le Président de la République.

Produire plus, produire mieux, produire différemment sont des impératifs absolus.

La France demeure très attachée à la continuité de la production de médicaments thérapeutiques aussi indispensables que le paracétamol, en particulier dans le contexte de la crise sanitaire du Covid-19. Toutes les modalités en faveur de l'indépendance sanitaire française, de la production de la matière première aux produits finis, sont à l'étude pour garantir la continuité des traitements indispensables à l'ensemble des Français.

Enfin, notre pays promeut et soutient la relocalisation, l'harmonisation et le renforcement de la coopération entre États membres pour retrouver la souveraineté européenne. Il souhaite donner un nouvel élan au travers de la mise en place d'une stratégie industrielle pharmaceutique européenne.

M. le président. La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour la réplique.

Mme Christine Bonfanti-Dossat. Madame la secrétaire d'État, je vous pose une question, et vous me faites un exposé ! La souveraineté n'est pas un gros mot : elle est au contraire l'ambition des hommes politiques dignes de ce nom. Les Français vous la demandent, vous la leur devez ! (Mme Florence Lassarade applaudit.)

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