Question de M. JOLY Patrice (Nièvre - SOCR) publiée le 30/04/2020

M. Patrice Joly attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la situation des personnes migrantes retenues dans les centres de rétention administrative (CRA) du territoire français.
La décision du Gouvernement de ne pas fermer les centres de rétention administrative, malgré les demandes successives des organisations professionnelles et associations exerçant dans les CRA, est incompréhensible puisqu'elle expose à un risque sanitaire majeur non seulement les personnes retenues mais aussi le personnel des CRA.

Tout d'abord, les mesures prises pour lutter contre l'épidémie de Covid-19 imposent notamment le respect de distances entre les personnes pour limiter le risque de contagion, la pratique rigoureuse de précautions sanitaires, parmi lesquelles la nécessité de se laver régulièrement les mains, d'user d'une solution hydroalcoolique, de porter un masque protecteur, et de distinguer les personnes malades ou potentiellement infectées tout en les prenant en charge médicalement.

Or il ressort que ces préconisations indispensables ne sont pas mises en œuvre ce qui a pour conséquence d'exposer gravement la santé tant des personnes retenues que celle des personnels travaillant dans ces centres.

De plus, dans un tribune en date du 23 mars 2020, la contrôleure générale des lieux de privation de liberté et le Défenseur des droits ont rappelé qu'au regard de la loi « une personne étrangère, n'ayant commis aucune infraction, ne peut être retenue qu'en vue d'une expulsion ». Or, depuis quelques semaines, les expulsions ne sont plus envisageables avec la fermeture de nos frontières (hors et dans l'espace Schengen) confirmée par le Président de la République. La possibilité de reconduite des personnes retenues, en plus de représenter un risque non négligeable de propagation du virus, est désormais inopérante. Le maintien de l'ouverture des CRA est donc une situation d'enfermement abusive.

Enfin, de nombreuses associations ont fait part de leur crainte d'être « muselées » à la suite de la suppression de plusieurs éléments dans l'accord qui doit encadrer leur intervention dans ces CRA entre 2021 et 2024 pour pouvoir apporter une « assistance juridique aux étrangers maintenus » dans les vingt-quatre centres en France. Garantir la liberté d'expression et de témoignage des associations intervenantes dans les centres de rétention administrative (CRA) est un droit fondamental garanti par la Constitution et la convention européenne des droits de l'homme. Les réduire au silence serait une atteinte grave à leurs droits et à la liberté d'expression.

Ainsi, il lui demande, comme l'a fait le Portugal, et comme l'a demandé la cour européenne des droits de l'homme, le temps de la pandémie, de permettre la fermeture des centres de rétention administrative, de régulariser provisoirement toutes les personnes migrantes sur notre territoire et enfin, le cas échéant, de mettre en place les conditions du relogement des retenus se trouvant actuellement en CRA. Il souhaite également que soient rétablis les éléments manquants dans l'accord qui doit encadrer l'intervention des associations dans ces CRA entre 2021 et 2024.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 01/04/2021

Depuis le début de la crise sanitaire, toutes les mesures nécessaires en ce qui concerne la rétention et les conditions des retenus placés en centre de rétention administrative (CRA) ont été prises, afin de les préserver d'une diffusion de la Covid-19. Des instructions relatives à l'application des gestes barrières ont été traduites en six langues et affichées dans tous les centres. La capacité d'accueil des centres a été fortement réduite afin de garantir à chaque personne retenue la possibilité de bénéficier d'un hébergement permettant d'assurer le respect des règles de distanciation, avec, chaque fois que possible, l'attribution d'une chambre individuelle. Le personnel des centres de rétention veille à ce que les mesures de distanciation sociale soient respectées dans les chambres lors de l'attribution des lits. Toutefois, les retenus étant libres dans les zones de vie, il est courant que certains ne s'installent pas dans la chambre qui leur a été attribuée, mais dans une de leur choix, afin de se regrouper par affinités. En outre, une visite médicale est obligatoire pour tout nouvel étranger admis en CRA. La prise en charge sanitaire des retenus atteints de la Covid-19 et de l'ensemble des personnes présentes dans les CRA où un retenu est testé positif est assurée : mise en quarantaine, traitement des cas contact, suspension des intégrations et des éloignements durant la quarantaine. Par ailleurs, chaque chef de centre a formalisé une procédure de décontamination des locaux et des surfaces et les prestataires ont renforcé leur procédure de nettoyage. Des instructions très fermes ont été adressées aux chefs de centre dès le mois de mars 2020, afin que les gestes barrières soient strictement respectés par les policiers, les intervenants en CRA et les prestataires. Dans les locaux de garde à vue comme dans l'ensemble des services de police, les instructions des autorités sanitaires sont scrupuleusement respectées, notamment concernant l'application des gestes barrières et le port d'équipements de protection. Plusieurs documents techniques, juridiques et opérationnels sont régulièrement mis en ligne sur le site intranet de la direction générale de la police nationale pour sensibiliser les agents aux mesures de sécurité sanitaire à respecter. Le protocole sanitaire du 17 mars 2020 révisé le 6 juillet 2020 précise que chaque centre doit mettre à disposition des personnes retenues des masques autant que nécessaire ainsi que du gel hydroalcoolique. Par conséquent, dans la mesure où le protocole sanitaire révisé est dûment respecté par les CRA et que les éloignements se poursuivent, il n'est pas envisagé une fermeture des centres de rétention administrative ni une baisse drastique de leur activité. Saisi en référé, le Conseil d'État a d'ailleurs rejeté le 27 mars 2020, une requête tendant à obtenir la fermeture des CRA, considérant que les conditions de rétention telles qu'organisées par l'administration étaient compatibles avec les prescriptions sanitaires.

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