Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOCR) publiée le 30/04/2020
M. Roland Courteau attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation de très nombreuses entreprises de bâtiment et travaux publics (BTP) de l'Aude, qui - si rien n'était fait - pourraient se trouver en situation de faillite dans quelques semaines, en dépit du redémarrage des chantiers.
Il lui indique que depuis plusieurs jours, ce secteur a établi un guide de préconisations, validé par le ministère des solidarités et de la santé, permettant une reprise progressive des chantiers en assurant la sécurité de nos salariés. Cependant, ces mesures, qui demeurent à l'appréciation de chaque entrepreneur ne pourront pas s'appliquer partout et lorsqu'elles le pourront, se traduiront par un surcoût important pour les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME) du département.
Outre l'achat - souvent difficile - des équipements nécessaires (gel, masques, lunettes), s'ajoute l'impact de ces mesures et de la distanciation sociale sur le rythme de production. À cette baisse de productivité, il convient d'ajouter les coûts majorés pour certains matériaux en raison des difficultés d'approvisionnement.
Cette situation pose une question immédiate. Elle tient aux chantiers en cours ou aux marchés signés. En temps normal, la rentabilité moyenne d'une entreprise de bâtiment avoisine les 2 % et les réserves restent faibles, avec des trésoreries correspondant à quelques mois d'un chiffre d'affaires normal.
Les mesures prises en urgence par les pouvoirs publics (fonds de solidarité pour les TPE, accompagnement de Bpifrance) constituent un indispensable soutien aux trésoreries. Mais, dans le BTP, elles ne résoudront pas le problème des comptes d'exploitations fortement dégradés, sur tous les chantiers avec à terme un nombre de faillites considérable. Si l'on veut maintenir la capacité de production du BTP dans tous les territoires, il n'y a qu'une solution : il faut que l'ensemble de la filière construction participe à l'effort général.
Cela implique que le surcoût indiscutable engendré par les mesures sanitaires soit équitablement réparti entre les fournisseurs, les entreprises de BTP et les maîtres d'ouvrages.
Il lui fait remarquer qu'en matière de marché public, l'ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 prévoit plusieurs mesures pour assurer ce rééquilibrage : notamment l'adaptation des marchés à la période de confinement, la neutralisation des pénalités de retard et l'indemnisation de l'entreprise pour le surcoût.
Il est donc demandé un rééquilibrage équivalent soit prévu en matière de marchés privés, c'est-à-dire pour l'écrasante majorité des contrats dont dépend l'activité du bâtiment.
C'est pourquoi, il est suggéré que des dispositions « marchés privés » soient prises en vue d'établir des dispositions équivalentes s'appliquant aux marchés privés conclus jusqu'à la fin de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 (et augmentée d'une durée de deux mois) ainsi qu'aux marchés en cours.
Il est évident que cette profession ne peut pas, à elle seule, supporter le fardeau : dans une période comme celle que nous traversons, il importe que tout le monde joue le jeu, maîtres d'œuvre comme maîtres d'ouvrage, fournisseurs comme négociants.
Les pouvoirs publics se doivent de rappeler cette exigence. C'est d'elle dont dépendra la capacité de nos entreprises à tenir bon et à préserver les emplois. Cela implique une surcote de 20 % sur le poste main d'œuvre. C'est le prix collectif à payer pour la santé des salariés du BTP dont personne ne doit se déresponsabiliser.
Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer quelles mesures, il compte prendre pour aider ce secteur, très menacé par cette crise.
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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance
Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 27/08/2020
Les entreprises du bâtiment et des travaux publics sont essentielles à la vie économique du pays et à son fonctionnement, en contribuant à des besoins du quotidien des Français tels que le logement, l'eau ou les infrastructures de transport. Le Gouvernement mesure les difficultés que peuvent rencontrer ces professions face à la crise sanitaire du Covid-19 : mise en place des gestes barrières, dépenses supplémentaires engendrées par l'achat d'équipements de protection individuelle et contraintes pour s'approvisionner en matériaux et matériels. Mais il est nécessaire d'uvrer à la poursuite de leur activité dans des conditions de sécurité optimale, pour éviter une mise à l'arrêt totale des chantiers, qui déstabiliserait non seulement les entreprises concernées mais aussi l'ensemble de la chaîne économique. Afin d'éviter que les entreprises du bâtiment et des travaux publics ne soient trop impactées par la situation, le Gouvernement a adopté l'ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 portant diverses mesures d'adaptation des règles de passation, de procédure ou d'exécution des contrats soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n'en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de Covid-19 qui prévoit plusieurs mesures permettant un rééquilibrage du surcoût engendré par les mesures sanitaires entre les fournisseurs, les entreprises du bâtiment et les maîtres d'ouvrage publics pendant l'état d'urgence sanitaire. Pour l'instant, il n'est pas envisagé d'adopter une nouvelle ordonnance qui intégrerait des dispositions équivalentes à l'ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020, s'appliquant aux marchés privés. Dans le cas des relations entre personnes privées, les difficultés liées à l'épidémie de Covid-19 pourraient dans certains cas, sous le contrôle du juge civil, relever du régime de la force majeure, qui exonère les parties au contrat de toute faute contractuelle en cas de suspension ou annulation de contrat. Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue par la force majeure à moins que le retard qui en résulterait justifie la résolution du marché. Si l'empêchement est définitif, la reconnaissance de la force majeure autorise la résolution de plein droit du contrat et les parties sont libérées de leurs obligations. Sous réserve de stipulations contractuelles aménageant les cas de force majeure, ceux-ci se constatent au cas par cas dès lors que les trois conditions cumulatives suivantes sont réunies : évènement imprévisible, évènement extérieur aux parties et prestataire ou acheteur public dans l'impossibilité absolue de poursuivre l'exécution de tout ou partie du marché public. Toutefois, il n'est pas assuré que la force majeure pourra être retenue et il est particulièrement important de bien examiner les clauses du contrat. Pour pouvoir valablement invoquer la force majeure, le titulaire devra démontrer qu'il ne dispose d'aucun autre moyen pour exécuter la prestation (adaptation des conditions de travail, source d'approvisionnement alternative, etc.) et qu'il existe un lien de causalité entre l'inexécution et l'épidémie. Il convient donc de documenter de manière approfondie une éventuelle demande (arrêts de travail des salariés, déclarations de défaillance des fournisseurs, constats contradictoires, inventaires, attestations diverses, etc.) en vue de la phase indemnitaire qui s'ouvrira à l'issue de la crise. Il est particulièrement recommandé de privilégier, dès la survenance des difficultés supposées liées à l'épidémie, une négociation à l'amiable entre les parties. En complément, les professionnels peuvent faire valoir la garantie « perte d'exploitation sans dommage matériel » ou « carence de fournisseurs » lorsque leur contrat d'assurance en dispose seule clause capable à ce jour de couvrir les pertes liées à l'épidémie de Coronavirus. Le 15 avril 2020, la présidente de la Fédération Française de l'Assurance (FFA) a annoncé que près de 3,2 Mds ont été débloqués dont 1,75 Md de mesures de solidarité en faveur des entreprises et des assurés les plus fragiles. Des discussions se poursuivent entre le Gouvernement et la FFA afin d'améliorer la protection dont pourront bénéficier les entreprises les plus touchées.
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