Question de M. JACQUIN Olivier (Meurthe-et-Moselle - SOCR) publiée le 23/04/2020
M. Olivier Jacquin interroge M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports sur la réponse du Gouvernement aux difficultés du transport routier de marchandises dans le contexte de la crise sanitaire liée au Covid-19.
Les enquêtes menées par les organisations professionnelles du transport routier font clairement apparaître que 20 à 25 % des entreprises sont en forte activité dans certains secteurs, notamment la filière agro-alimentaire. Cependant, du fait de la désorganisation totale des flux, les véhicules partent à plein et reviennent souvent à vide. Les secteurs clients ayant demandé des dérogations pour étendre le temps de conduite, circuler le dimanche et les jours fériés, les personnels sont en heures supplémentaires majorées de 25 % ou 50 %. Les coûts salariaux sont importants. Le transport se fait à perte ou sans réelle marge. Tous ces éléments ont été objectivés par le comité national routier.
La réalité est encore plus difficile pour le reste des entreprises, celles qui travaillent notamment pour l'industrie, les travaux publics, l'automobile... 75 % à 80 % d'entre elles sont en arrêt total ou en très forte baisse d'activité, c'est-à-dire travaillant à - 70 % de leur activité normale. Entre 52 et 59 % des véhicules de transport sont à l'arrêt.
Le transport routier s'exerce dans une perspective européenne. Il serait invraisemblable qu'on puisse imaginer de déréglementer le cabotage comme certains pays le souhaiteraient (c'est-à-dire le droit donné à des véhicules étrangers venus sur le territoire national dans le cadre d'un transport international, d'effectuer trois opérations de transport franco-français sur une durée de sept jours), alors que des entreprises françaises sont aujourd'hui à l'arrêt.
La relance de l'activité économique sera lente et progressive. Dès lors, il est crucial pour la survie des 36 000 entreprises employant plus de 500 000 salariés pour un chiffre d'affaires de 53 milliards d'euros, de leur garantir une activité minimale pour leur permettre de maintenir une activité suffisante vitale, sans que cette activité puisse être capter des pavillons étrangers pratiquant pour certains le dumping social.
Par ailleurs, une inquiétude certaine se fait connaître depuis plusieurs semaines quant aux conditions sanitaires dans lesquelles exercent les conducteurs étrangers. La branche des transports routier et de la logistique vient de publier un guide des bonnes pratiques, approuvé par le ministère du travail et celui des transports, qui acte des règles sanitaires strictes visant à éviter la propagation du Covid-19 au-delà de la période de confinement. Il n'existe aucune garantie que les entreprises étrangères appliquent les mêmes règles notamment sur tous les lieux de chargement et de déchargement, les aires de repos et de services, d'autant plus qu'il n'y a pas de véritable coordination des politiques sanitaires entre pays européens dans cette période de pandémie.
Le règlement européen n° 93-3118 du 25 octobre 1993 relatif à l'accès au marché du transport routier prévoit, en cas de perturbation grave du marché intérieur, la possibilité pour un État de demander l'application de la clause de sauvegarde. Une telle clause permettrait de prendre des mesures restrictives concernant le cabotage.
Aussi, dans ce contexte de crise sanitaire qui perturbe gravement le marché intérieur et fragilise fortement les nombreuses très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) du transport routier français, implantées sur tout le territoire, il lui demande comment le Gouvernement compte agir au niveau européen pour faire valoir la clause de sauvegarde et demander la suspension du cabotage pour une période de six mois.
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Transmise au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Transports
Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Transports publiée le 05/11/2020
La crise sanitaire liée au coronavirus nous place dans une situation totalement inédite. La désorganisation de l'économie qui a accompagné la propagation de l'épidémie atteint la plupart des activités parmi lesquelles celle du transport routier de marchandises. À ce titre, l'engagement des entreprises et des salariés du secteur pour assurer la continuité des approvisionnements de la population et de l'économie françaises doit absolument être souligné. Dès le début de la crise, le Gouvernement a engagé un dialogue très soutenu avec les représentants des organisations professionnelles de transporteurs et un dispositif spécifique de suivi a été mis en place afin de mesurer l'évolution de la situation et prendre les mesures appropriées. Un plan ambitieux de mesures d'urgence de soutien aux entreprises décline des dispositions de plusieurs natures : report de cotisations sociales et de charges fiscales, voire annulations de charges pour les entreprises les plus fragilisées, élargissement sans précédent du dispositif d'activité partielle avec adaptations spécifiques au secteur des transports routiers, engagement de la Banque publique d'investissement en matière de soutien à la trésorerie et de garantie pour des prêts bancaires, aides directes via notamment le déblocage d'un fonds de solidarité pour aider les petites entreprises les plus touchées par la crise. En outre, des mesures spécifiques, venant s'ajouter à ce plan, ont été décidées en destination du secteur du transport routier de marchandises. Ces dispositions visent à améliorer rapidement la trésorerie des entreprises, ce qui est une des premières préoccupations des transporteurs. La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), partiellement remboursée aux opérateurs du transport routier de marchandises chaque semestre, leur est reversée tous les trimestres. Cette mesure permet un gain de trésorerie immédiat potentiel de près de 300 millions d'euros pour l'ensemble de la filière. L'échéance 2020 de la taxe sur les véhicules routiers (TSVR), qui doit être payée au plus tard le 1er septembre, sera reportée de trois mois. Ce report soulagera la trésorerie des entreprises du secteur de 90 millions d'euros au total. S'agissant du cabotage pratiqué par les entreprises établies dans d'autres États membres, ce sont les pratiques irrégulières qui posent problème. C'est pour cette raison que les autorités françaises ont défendu l'adoption rapide des volets « social » et « accès à la profession et au marché » du Paquet mobilité I pour le transport routier, car ils renforceront l'équilibre de la concurrence au sein du marché communautaire. Ils ont été votés par le Parlement européen l'été dernier. L'ensemble des textes que forme le Paquet de mesures dit « Paquet mobilité » apporte des réponses ambitieuses dans la lutte contre ces pratiques, notamment en matière de cabotage dont les règles sont renforcées et qui pourront être mieux contrôlées. Le Gouvernement demeure très attentif au respect des règles en matière de cabotage. Des instructions ont été données aux services de contrôle, pour que la reprise de l'activité économique ne se fasse pas au détriment des transporteurs établis en France. La lutte contre les fraudes au cabotage illégal fait ainsi partie de leur priorité d'action. La vigilance des donneurs d'ordre doit également être appelée sur le nécessaire respect des règles.
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