Question de Mme DELATTRE Nathalie (Gironde - RDSE) publiée le 23/04/2020

Mme Nathalie Delattre interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'engagement du Gouvernement pour une loi sur le foncier agricole. Nos terres agricoles sont de plus en plus convoitées. Cette convoitise se traduit par une volonté accrue de la part de nombreux acteurs de les transformer en sol à bâtir pour en faire des zones commerciales ou résidentielles. Preuve en est, en 2016, 30 000 hectares de foncier agricole ont été consommés par l'urbanisation. Chaque année, la Gironde enregistre une perte de 1 800 hectares de foncier agricole. Pour contrer ce phénomène, le monde agricole réclame depuis des années un meilleur encadrement législatif de l'urbanisation et de l'artificialisation des terres agricoles. Ces dernières ne cessent de menacer d'année en année le potentiel alimentaire de la France.

Depuis le début de la législature actuelle, la majorité présidentielle et parlementaire a annoncé sa volonté de voter une nouvelle loi foncière. Dès 2018, une mission d'information sur le foncier agricole a été mise en place à l'Assemblée nationale mais celle-ci s'est conclue sur un désaccord entre les rapporteurs. Elle a toutefois révélé l'insuffisance de l'arsenal juridique basé sur le principe d'une gestion économe des sols et la fiscalité dont l'objet est de dissuader le changement d'usage des terres. De fait, elle a insisté sur la nécessité de prendre des mesures plus contraignantes, passant ainsi d'une gestion concurrente à une gestion complémentaire du foncier. Depuis, la loi sur le foncier promise par le Gouvernement et tant attendue par le monde agricole est reportée d'année en année. Or, la préservation des terres agricoles est une priorité pour le secteur agricole, et en particulier viticole. Le monde agricole est unanime ; cette loi est nécessaire si l'on veut assurer le renouvellement des générations, garantir la souveraineté alimentaire et assurer la préservation de la biodiversité et des captages d'eau. La crise sanitaire actuelle montre qu'il est nécessaire de donner des moyens à nos agriculteurs afin de mettre en place une véritable autosuffisance alimentaire sur notre territoire, répondant ainsi aux souhaits de nombreux Français. Preuve en est, un récent sondage a révélé que plus de neuf Français sur dix souhaitent que l'État puisse garantir l'autonomie agricole de la France. Cette crise révèle donc plus que jamais le caractère vital de notre agriculture.

Le 6 février 2020, au Sénat, M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a rouvert la porte, évoquant un projet de loi qui pourrait être rédigé après consultation des parlementaires. À travers la voix de son représentant, le Gouvernement s'est joint au monde agricole pour rappeler sa volonté d'un « zéro artificialisation net ». Elle souhaite donc savoir quel est l'état d'avancement des travaux préparatoires à ce projet de loi, et à quel horizon celui-ci sera présenté en conseil des ministres.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 06/08/2020

L'artificialisation des sols concerne l'ensemble du territoire et constitue un enjeu désormais largement partagé. Parmi de multiples conséquences, ce phénomène conduit à l'érosion du potentiel de production agricole et, à terme, pourrait avoir pour effet d'affaiblir l'autonomie alimentaire de la France, dans un contexte ou, plus que jamais, il est nécessaire de renforcer l'indépendance agricole. Plus largement, il contribue à la dégradation de la biodiversité, et hypothèque les possibilités de lutte contre le changement climatique. Ces différents enjeux, étroitement liés, sont placés au cœur des politiques prioritaires du Gouvernement. Parmi ces politiques peuvent être soulignées celles devant conduire à l'objectif de « zéro artificialisation nette », portées par le plan biodiversité publié le 4 juillet 2018. Dans ce cadre, plusieurs actions concrètes sont déjà mises en œuvre. En premier lieu, pour faciliter l'appropriation par les élus locaux et les citoyens du phénomène d'artificialisation, l'État a déployé le 4 juillet 2019 l'observatoire de l'artificialisation. Cette plate-forme, en accès gratuit sur internet et régulièrement mise à jour, publie à destination des territoires et des citoyens un état annuel de la consommation d'espaces sur la base de données fiables et comparables à tous les échelons territoriaux. . En deuxième lieu, par son instruction relative à l'engagement de l'État en faveur d'une gestion économe de l'espace du 29 juillet 2019, le Gouvernement a demandé que l'ambition soit portée par l'ensemble des échelons de l'État, en premier lieu par le préfet de département, principal interlocuteur des collectivités territoriales prescriptrices des documents d'urbanisme et des porteurs de projets d'aménagement. En troisième lieu, le Gouvernement a installé, le 23 juillet 2019, un groupe de travail partenarial composé de parlementaires, d'élus, de représentants de la société civile, du monde agricole, du secteur de l'aménagement et d'organisations non gouvernementales, pour engager la société vers le « zéro artificialisation nette ». Il est également demandé à ce groupe de travail de proposer des mesures opérationnelles dans différents domaines (contractualisation, accompagnement, ingénierie, communication, planification, compensation…). Ces mesures concordent d'ailleurs très largement avec celles proposées par la convention citoyenne pour le climat. Les questions préalables de la définition en corrélation avec l'observation de l'artificialisation sont actuellement étudiées et seront ultérieurement mises en débat. La crise sanitaire actuelle a bousculé le calendrier initial de remise des propositions et d'annonces du Gouvernement en la matière. Le chantier artificialisation, dans son approche plus globale et partenariale, est reporté au second semestre, faute de ne pouvoir réunir les différents groupes de travail animés par des parlementaires. Il n'en reste pas moins que le droit existant, avec à disposition de nombreux outils, permet d'ores et déjà de réduire fortement la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers, tel que demandé pour les documents d'urbanisme.

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