Question de M. KANNER Patrick (Nord - SOCR) publiée le 16/04/2020
M. Patrick Kanner attire l'attention de M. le Premier ministre sur gestion des communes dont la majorité municipale a changé lors de l'élection du 15 mars 2020.
30 125 communes ont élu leur conseil municipal au complet dès le premier tour. Pour leur grande majorité, ce sont les élus sortants qui ont été réélus et la période transitoire que la crise sanitaire a imposée se déroule sans difficultés. Mais, dans quelques cas, la majorité sortante a été désavouée, et la période de transition soulève des difficultés.
Les récentes ordonnances du 25 mars et du 1er avril 2020 ont conféré une plus grande liberté d'action aux maires qui assurent aujourd'hui la gestion de leurs collectivités. Ces assouplissements concernent donc aussi les maires qui ont été désavoués par leurs électeurs, mais qui n'ont aucun compte à rendre aux nouveaux élus. En effet, la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 prévoit simplement que : « Les candidats élus au premier tour dont l'entrée en fonction est différée sont destinataires de la copie de l'ensemble des décisions prises sur le fondement de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales ».
Ainsi, paradoxalement, ces maires peuvent prendre des décisions importantes, comme engager la totalité des dépenses d'investissement de l'année précédente sans vote du budget et sans contrôle du conseil municipal. Ils peuvent par exemple engager les projets qui, justement, ont été rejetés par les électeurs de la ville, en contradiction avec les résultats du vote. Pour ces maires désavoués mais au mandat prorogé, le seul devoir est d'informer les nouveaux élus, a posteriori, de leurs décisions. De même l'ordonnance du 1er avril 2020 permet de réunir par visioconférence ou audioconférence le conseil municipal désavoué, sans que les nouveaux élus n'aient droit à la parole, en violation du principe de souveraineté du peuple inscrit à l'article 3 de la Constitution.
Dans ce contexte, il faut instaurer des garde-fous. Il lui demande si le Gouvernement est disposé à compléter les ordonnances adoptées en précisant que : les maires des villes de moins de 1 000 habitants éliminés au premier tour ou les maires des villes de plus de 1 000 habitants dont la liste a été battue dès le premier tour ne peuvent gérer que les affaires courantes pendant cette période de transition, c'est-à-dire les actes de pure administration conservatoire et urgente au sens de l'article L. 2121-35 du code général des collectivités territoriales ; pour la gestion de ces affaires courantes, une structure paritaire réunit le maire battu et deux anciens adjoints d'une part et un nombre égal de membres de la liste élue au premier tour choisis dans l'ordre de présentation de la liste d'autre part, qui délibère par vidéoconférence ou audioconférence dans les conditions définies à l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 « visant à assurer la continuité du fonctionnement des institutions locales et de l'exercice des compétences des collectivités territoriales et des établissements publics locaux ». Les décisions, soumises au contrôle de légalité, sont adoptées à la majorité des voix exprimées ; le maire battu ne peut prendre de décisions relevant normalement des pouvoirs du conseil, qu'ils relèvent des pouvoirs délégués ou non, sans l'approbation des candidats élus au premier tour dont l'entrée en fonction est différée, approbation recueillie lors d'une visioconférence ou à défaut une audioconférence organisée dans les conditions fixées à l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 susvisé, dans le respect de l'article 3 de la Constitution.
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Transmise au Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales
Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée le 01/10/2020
L'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 dispose que, dans les communes pour lesquelles le conseil municipal a été élu au complet au premier tour qui s'est déroulé le 15 mars 2020, les conseillers municipaux en exercice avant ce premier tour conservaient leur mandat jusqu'à l'entrée en fonction des conseillers municipaux élus le 15 mars dernier. Cette entrée en fonction a eu lieu le 18 mai 2020 en application du décret n° 2020-571 du 14 mai 2020 et la première réunion du conseil municipal s'est tenue au plus tôt cinq jours et au plus tard dix jours après cette entrée en fonction. Aussi, afin d'assurer la continuité du fonctionnement des institutions locales et de l'exercice des compétences des collectivités territoriales, l'ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020, prise en application de l'article 11 de la loi du 23 mars 2020, confiait-elle, en son article 1er, aux maires alors en exercice les attributions qui pouvaient normalement leur être déléguées par le conseil municipal sur le fondement de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales (CGCT). En prorogeant les mandats des conseillers municipaux en exercice et en renforçant les pouvoirs dévolus aux maires, la loi du 23 mars 2020 et l'ordonnance du 1er avril 2020, qui édictent un droit dérogatoire rendu nécessaire par la crise sanitaire actuelle, n'ont pas entendu restreindre les pouvoirs des autorités communales alors en exercice, ni limiter leur action à la seule gestion des affaires courantes. Les maires et les conseils municipaux exerçaient donc pleinement les attributions qui leur sont dévolues. Toutefois, les larges délégations d'attributions confiées aux maires directement par la loi s'accompagnaient de dispositions destinées à encadrer leur exercice. En premier lieu, l'information des élus, s'agissant tant des conseillers municipaux en exercice que des nouveaux élus, a été organisée par la loi. Ainsi, conformément aux dispositions du XIV de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020, les décisions prises sur le fondement de l'article L. 2122-22 du CGCT devaient être transmises aux candidats élus au premier tour et qui ont pris leurs fonctions le 18 mai 2020. Le deuxième alinéa du I de l'article 1er de l'ordonnance du 1er avril 2020 prévoyait par ailleurs que les décisions prises par le maire dans le cadre de ses délégations étaient transmises sans délai et par tout moyen aux conseillers municipaux en exercice et faisaient l'objet d'un compte-rendu au conseil municipal lorsqu'il se réunissait par téléconférence dans les conditions prévues à l'article 6 de cette même ordonnance. En second lieu, les conseils municipaux en exercice pouvaient modifier la délégation aux maires, par exemple pour fixer des conditions ou des limites à l'exercice de certaines attributions, ou y mettre fin. Dans ce dernier cas, ils avaient la possibilité de modifier les décisions prises par les maires dans le cadre des délégations. La modification pouvait intervenir au cours de la première réunion du conseil municipal suivant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 1er avril 2020 ou à tout autre moment, y compris lorsque l'assemblée municipale se réunissait à la demande du cinquième de ses membres en application de l'article 3 de cette même ordonnance. En tout état de cause, en cas d'illégalité, toute décision prise par un maire dans le contexte de l'état d'urgence sanitaire reste susceptible de recours dans les conditions de droit commun. Ainsi, les dispositions de l'ordonnance du 1er avril 2020 ont permis d'assurer la continuité de l'action et du fonctionnement des autorités communales en exercice pendant l'état d'urgence sanitaire, notamment en simplifiant et facilitant la prise des mesures qu'impose la crise actuelle, tout en fixant des règles encadrant les pouvoirs renforcés des maires. En outre, conformément aux dispositions de l'article 11 de l'ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 modifiées par l'article 6 de la loi n° 2020-760 du 22 juin 2020 tendant à sécuriser l'organisation du second tour des élections municipales et communautaires de juin 2020 et à reporter les élections consulaires, les délégations prévues au I de l'article 1er de cette même ordonnance ne sont accordées au maire que pour une période limitée. En effet, elles ont pris fin le 18 mai 2020, date d'entrée en fonction des conseillers municipaux et communautaires, dans les communes où le conseil municipal a été élu au complet au premier tour de l'élection des conseillers municipaux et communautaires organisé le 15 mars 2020, et le lendemain du second tour, qui a été fixé au 28 juin 2020 par le décret n° 2020-642, dans les autres communes.
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