Question de M. CABANEL Henri (Hérault - RDSE) publiée le 02/04/2020
M. Henri Cabanel rappelle l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre de l'action et des comptes publics sur les détournements de la possibilité qu'ont les employeurs publics de recruter des agents contractuels afin de faire face à des besoins non permanents, ne justifiant donc pas la création d'un emploi budgétaire. Cette facilité d'embauche est en effet parfois détournée. De nombreux agents contractuels (notamment de catégorie C) voient alors leur contrat à durée déterminée être renouvelé, à de nombreuses reprises, pour des courtes périodes, et ce pendant plusieurs années. Ils se trouvent alors exposés à une grande précarité dans les domaines du logement, du prêt bancaire ou de la stabilité de la vie familiale. Or, le droit français ne prévoit pas la requalification en contrat à durée indéterminée pour ces agents contractuels, même en cas de recours abusif pourtant fréquents. Cette pratique n'est pas sanctionnée efficacement contre les employeurs publics qui utilisent ces personnes comme des variables d'ajustement à leurs besoins. Le recours abusif à des contrats précaires donne seulement lieu, devant la juridiction administrative, à une indemnisation dérisoire au regard du préjudice subi par ces agents contractuels, au terme d'une procédure contentieuse de plusieurs années. Ainsi, le Conseil d'État considère, en effet, que le renouvellement de contrats à durée déterminée afin de pourvoir au remplacement temporaire d'agents indisponibles répond, en principe, à une raison objective au sens de la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, « y compris lorsque l'employeur est conduit à procéder à des remplacements temporaires de manière récurrente, voire permanente, et alors même que les besoins en personnel de remplacement pourraient être couverts par le recrutement d'agents sous contrats à durée indéterminée » (CE, 20 mars 2015, n° 371664). Le Conseil d'État a ainsi considéré que « les dispositions des articles 9 et 9-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ne font pas obstacle à ce qu'un renouvellement abusif de contrats à durée déterminée ouvre à l'agent concerné un droit à l'indemnisation du préjudice qu'il subit lors de l'interruption de la relation d'emploi, évalué en fonction des avantages financiers auxquels il aurait pu prétendre en cas de licenciement s'il avait été employé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée. » Dans ce cas d'espèce, l'agent concerné était une personne ayant exercé des fonctions d'agent d'entretien au sein d'un institut médico-éducatif entre 2001 et 2009. Ces fonctions avaient été exercées en remplacement d'agents indisponibles ou autorisés à travailler à temps partiel. Elles avaient donné lieu à vingt-huit contrats et avenants successifs. Dans ces conditions, alors qu'il avait bien recouru abusivement à une succession de contrats à durée déterminée et qu'un besoin en réalité permanent était reconnu, l'employeur n'a ni été sanctionné ni contraint à engager l'agent en contrat à durée indéterminée. Finalement, cet agent n'a été indemnisé qu'à hauteur de 6 500 euros, au terme de la procédure par la cour administrative d'appel de Lyon, en octobre 2015. Il résulte de ce qui précède qu'il n'existe pas de dispositif vraiment dissuasif contraignant les employeurs publics à respecter les principes régissant l'utilisation des contrats temporaires, conformément à l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée annexé à la directive précitée du 28 juin 1999. Ces agents contractuels ne bénéficient ainsi que de très peu de protection, ni celle du droit du travail, ni celle des fonctionnaires. Aussi, il souhaite connaître les mesures envisagées par le Gouvernement pour remédier à cette situation.
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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics publiée le 18/06/2020
Les lois portant dispositions statutaires à chaque versant de la fonction publique permettent de recourir à des agents contractuels pour notamment répondre à des besoins non permanents. Ces cas de recours visent d'une part, les emplois permanents occupés à titre temporaire et les emplois temporaires occupés à titre temporaire. Ces cas de recours sont utilisés dans le cadre d'un remplacement momentané d'un agent absent ou d'une vacance temporaire d'emploi. Ils sont prévus aux articles 6 quater et 6 quinquies de la loi du 11 janvier 1984, 3-1 de la loi du 26 janvier 1984, aux I et II de l'article 9-1 de la loi du 9 janvier 1986. La loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique a aligné les règles de recours à des agents contractuels dans la fonction publique d'État sur celles prévues dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière. Les articles 6 quater et 6 quinquies permettent aux administrations de l'État, de faire appel à des agents contractuels pour remplacer des fonctionnaires momentanément absents (congés de maladie, maternité, parental, réserves, service civil ou national, etc.) ou pour pourvoir aux vacances d'emploi dans la limite d'une durée d'un an. La loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique a également étendu le recours prévu à l'article 6 quater pour remplacer un agent contractuel momentanément absent. La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a ouvert dans les trois versants de la fonction publique la possibilité de recruter un agent contractuel en remplacement d'un agent en congé pour invalidité temporaire imputable au service. Dans le versant territorial, cette possibilité est étendue pour remplacer des agents en détachement ou en disponibilité de courte durée, en détachement pour l'accomplissement d'un stage ou d'une période de scolarité préalable à la titularisation. Des contractuels peuvent également être recrutés pour faire face à un accroissement temporaire ou saisonnier de l'activité ou dans le cadre d'un contrat de projet conformément aux articles 6 sexies et 7 bis de la loi du 11 janvier 1984, 3 de la loi du 26 janvier 1984, au III de l'article 9-1 et de l'article 9-4 de la loi du 9 janvier 1986. Plusieurs mesures ont été mises en place afin de réduire les situations de précarité dans la fonction publique. En premier lieu, les dispositions relatives aux agents contractuels, prévues par la loi du 3 août 2009, ont permis de préciser les besoins temporaires justifiant le recours à des agents non titulaires en contrat à durée déterminée (CDD) remplacement d'un fonctionnaire absent ou vacance temporaire d'emploi. La loi oblige ainsi l'administration à préciser dans le contrat les motifs du recours au CDD et vise à prévenir les situations de renouvellement abusif des contrats temporaires pour pourvoir un besoin permanent. En deuxième lieu, la loi du 12 mars 2012 a clarifié les dispositions relatives aux durées et aux conditions de renouvellement des contrats conclus pour répondre à des besoins temporaires ce qui doit permettre de prévenir les situations de renouvellements abusifs de contrats à durée déterminée et de sécuriser les parcours professionnels des agents, dont les conditions d'emplois sont les plus précaires. La loi du 12 mars 2012 a également créé les conditions d'un plus large accès au contrat à durée indéterminée (CDI) pour les agents occupant un emploi permanent de l'administration. Elle permet de garantir à un agent recruté pour répondre à un emploi permanent d'une administration la prise en compte d'une expérience antérieurement acquise au titre d'une vacance temporaire d'emploi, d'un remplacement ou sur un emploi temporaire pour le calcul de l'ancienneté exigée pour l'obtention d'un CDI, dès lors que l'ensemble de ces expériences aurait été acquises sur des fonctions de même catégorie hiérarchique auprès du même employeur. En dernier lieu, la loi de transformation de la fonction publique a créé dans les trois versants, une indemnité de fin de contrat au bénéfice des agents recrutés pour une durée égale ou inférieure d'un an et lorsque la rémunération brute globale de l'agent est inférieure à un plafond fixé par décret en Conseil d'État. Due au titre des contrats conclus à compter du 1er janvier 2021, cette indemnité sera égale à 10 % de cette rémunération brute globale. En seront néanmoins exclus certaines catégories d'agents contractuels, dont ceux recrutés sur des emplois de direction ou par le biais d'un contrat de projet. Par ailleurs, la loi de transformation de la fonction publique a introduit d'autres mesures destinées à lutter contre la précarité dans la fonction publique. Elle a étendu, d'une part, la possibilité, au sein de la fonction publique de l'État, d'effectuer un primo-recrutement de contractuel en CDI lorsqu'ils sont recrutés pour occuper à titre permanent un emploi permanent, c'est-à-dire en application de l'ensemble des motifs énumérés à l'article 4 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 dans sa nouvelle rédaction et non plus en application du seul critère tiré de l'absence de corps de fonctionnaires. D'autre part, elle a étendu la portabilité du CDI entre les trois versants de la fonction publique afin d'améliorer les perspectives de carrière des contractuels.
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