Question de M. TISSOT Jean-Claude (Loire - SOCR) publiée le 09/04/2020
Question posée en séance publique le 08/04/2020
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Jean-Claude Tissot. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, la situation dans les Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) est particulièrement critique. Les résidents de ces établissements représentent désormais plus d'un quart des personnes décédées du Covid-19 en France.
Je tenais tout d'abord à saluer le courage et l'engagement des personnels, qui, depuis le début de l'épidémie, sont allés travailler, parfois avec « la peur au ventre ». Trop longtemps, en effet, ils ont manqué des moyens de protection nécessaires.
Alors que ces professionnels sont, depuis plusieurs années, confrontés à des difficultés structurelles, dues au manque de moyens financiers et humains, ils ont su trouver les ressources pour faire face de manière admirable à cette crise. J'espère sincèrement que, lorsque viendra « le jour d'après », on ne s'empressera pas de les oublier !
Vous avez annoncé le lundi 6 avril dernier le lancement d'une « vaste opération de dépistage » dans ces établissements. C'est une mesure que je salue : elle permettra de mieux gérer la situation.
L'un des problèmes à traiter en priorité est celui de l'accompagnement des personnes en fin de vie.
Je reprendrai les mots du psychiatre Michel Debout, professeur émérite de médecine légale, qui explique que la présence des membres de la famille dans les derniers instants d'un proche est tout à la fois « la condition psychologique, affective et émotionnelle, pour permettre à la personne âgée de mourir dans la sérénité » et la condition pour « la famille de ne pas ressentir qu'elle a abandonné une dernière fois son parent ».
Il redoute ainsi que « beaucoup de ces familles ne présentent, une fois la crise sanitaire passée, des états de deuil pathologique, qui viendront pour une longue période dégrader leur vie psychique et relationnelle ».
Se pose de la même manière la question de la prise en charge des soignants, au lendemain de la crise.
Je voudrais aussi dire un mot des agents des services mortuaires, derniers maillons de la chaîne du soin. Ils doivent à ce titre pouvoir, comme tous les soignants, bénéficier de toutes les protections face au virus.
Comme le souligne très justement le professeur Debout, « notre humaine condition se construit, depuis la nuit des temps, sur le fait que nous soyons la seule espèce vivante qui enterre ses morts ; cette place donnée aux morts permet de les relier aux vivants et de construire avec eux la chaîne ininterrompue de l'humanité ».
Monsieur le ministre, envisagez-vous de rendre rapidement possible la présence d'au moins un membre de la famille aux côtés du mourant,
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. C'est déjà le cas !
M. Jean-Claude Tissot.
en fournissant, bien sûr, les moyens de protection nécessaires face au risque infectieux.
M. Bruno Retailleau. Bonne question !
Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 09/04/2020
Réponse apportée en séance publique le 08/04/2020
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Jean-Claude Tissot, votre question traite de l'humanité avec laquelle on affronte la fin de vie dans des conditions déjà difficiles, puisque près de 100 000 personnes décèdent chaque année en Ehpad, soit environ 300 personnes par jour. Ces établissements sont donc, bien souvent, la dernière demeure des personnes qui y résident.
Ce que vous demandez aujourd'hui est déjà rendu possible. Nous avons autorisé la visite d'un proche dans les derniers instants de la vie d'un résident en Ehpad, comme cela se pratique d'ailleurs également dans les établissements hospitaliers.
Pour ce faire, nous avons fixé, comme vous l'avez esquissé vous-même dans votre question, un certain nombre de conditions en termes d'équipement adéquat, afin de ne pas faire entrer le virus dans l'établissement. Nous avons également décidé d'un parcours spécifique au sein de l'établissement, avec une chambre particulière lorsque c'est possible, également pour éviter tout risque de contamination.
De telles visites sont donc autorisées, et c'est normal. Je ne dis pas qu'elles sont simples à mettre en uvre, mais les directeurs d'établissement peuvent, en l'état du droit, les permettre.
J'imagine que vous avez été informé d'un problème par rapport à une situation particulière. Dans ce cas, je vous invite à vous tourner vers mon cabinet : je m'engage à faire contacter chaque Ehpad où la situation serait difficile.
Je travaille énormément en lien avec les fédérations d'Ehpad et de services à domicile. Je les remercie d'ailleurs de leur action déterminée. Quoi qu'il en soit, encore une fois, il n'existe pas de blocage d'ordre législatif ou réglementaire au niveau national sur ces questions.
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