Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 26/03/2020

M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur le démantèlement des installations nucléaires.
Dans son rapport « L'arrêt et le démantèlement des installations nucléaires » de février 2020, la Cour des comptes établit, à l'aune du protocole d'indemnisation passé entre l'État et Électricité de France (EDF), que les dispositions prévues par celui-ci sont « favorables à l'entreprise » et présentent « un risque financier pour l'État ». Elle estime que l'État doit mieux se prémunir des risques futurs d'indemnisation et qu'il conviendrait d'en définir par voie d'avenant les modalités d'application. Elle indique également que le paiement dans les plus brefs délais de l'intégralité de l'indemnité initiale à EDF permettrait l'économie de plusieurs dizaines de millions d'euros.
Concernant de futurs démantèlements, la Cour des comptes recommande que l'horizon prescriptif de la programmation pluriannuelle de l'énergie soit porté à 15 ans et que la stratégie nationale bas carbone permette une visibilité sur l'évolution à plus long terme du mix énergétique.
La Cour des comptes constate de « fortes augmentations » des coûts prévisionnels pour les démantèlements en cours. Les opérateurs du démantèlement allongent les délais des opérations avec pour conséquence une baisse des charges et provisions à court terme mais une augmentation du montant final du démantèlement. La Cour des comptes estime qu'il conviendrait de davantage prendre en compte l'obligation de démantèlement « dans un délai aussi court que possible » prévue par la loi.
Dans son rapport, la Cour des comptes estime également que les autorités compétentes ne sont pas en mesure d'arbitrer entre les objectifs de délais et de coûts fixés par la loi et de veiller au respect de ces objectifs.
S'agissant des provisions pour démantèlement, la Cour des comptes considère que les évaluations par les opérateurs des charges futures ne prennent pas assez en compte les incertitudes et les aléas attachés aux estimations de coûts prévisionnels. Elle préconise davantage de prudence dans ces évaluations, et une modification du cadre règlementaire afin de mieux prendre en compte l'ensemble des dépenses liées au démantèlement sur la base d'un calendrier réaliste.
Aussi, il souhaite connaître les suites qu'elle compte donner aux recommandations de la Cour des comptes.

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Transmise au Ministère de la transition écologique


Réponse du Ministère de la transition écologique publiée le 10/09/2020

Le protocole d'indemnisation de la fermeture de la centrale de Fessenheim au titre de la responsabilité sans faute de l'État a été préparé avec l'appui de différents conseils et a fait l'objet de plusieurs examens contradictoires, notamment par le comité ministériel des transactions, qui n'ont pas remis en cause le principe et le montant de l'indemnité, y compris en ce qui concerne les paramètres que la Cour des Comptes estime comme étant « particulièrement favorables à EDF ». S'agissant de la possibilité de paiement dans les plus brefs délais de l'intégralité de l'indemnité initiale à EDF, elle fait actuellement l'objet d'un examen par le Gouvernement en regard des enjeux budgétaires afférents. Le Gouvernement examine également la possibilité de réaliser un avenant au protocole afin de clarifier certaines modalités d'application du protocole. S'agissant de l'horizon prescriptif de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), les perspectives de fermeture de centrales ont justement été données par la PPE, sur le plan quantitatif et en calendrier, à horizon 2035 afin de donner la visibilité à la filière nucléaire. De plus, les perspectives énergétiques que le Gouvernement est susceptible de donner à l'horizon 2050 sont examinées et rendues publiques dans le cadre de la stratégie nationale bas carbone, dont la préparation se fait conjointement avec celle de la PPE. Elles doivent prendre en compte un niveau d'incertitudes supérieur à celui de la PPE compte tenu de l'horizon retenu. Enfin, la loi énergie-climat a introduit le principe d'une loi de programmation quinquennale à partir de 2023 et qui fixera tous les cinq ans les objectifs et priorités d'action de la politique énergétique nationale pour répondre à l'urgence écologique et climatique. L'ensemble de ces dispositions vont dans le sens des préconisations de la Cour quant à l'enjeu d'une planification énergétique sur le temps long. S'agissant du respect de l'obligation de démantèlement « dans un délai aussi court que possible » prévue à l'article L. 593-25 du code de l'environnement, elle donne lieu à un contrôle par le Gouvernement après l'arrêt définitif de chaque installation. En effet, le démantèlement de chaque installation est, au vu d'un dossier de démantèlement fourni par l'exploitant au plus tard deux ans après la déclaration d'arrêt définitif, prescrit par décret pris après avis de l'Autorité de sûreté nucléaire et après l'accomplissement d'une enquête publique. Ce décret fixe notamment le délai de réalisation du démantèlement (article L. 593-28 du code de l'environnement). S'agissant des coûts prévisionnels de démantèlement des installations nucléaires et des provisions pour démantèlement, le code de l'environnement prévoit que les coûts prévisionnels fassent l'objet d'une évaluation prudente par les exploitants nucléaires (article L. 594-1) et que leur financement soit sécurisé par la constitution de portefeuilles d'actifs dédiés à la couverture des provisions afférentes (article L. 594-2). Un contrôle rigoureux de ce dispositif est indispensable afin d'éviter que ces charges de long terme ne soient reportées sur les générations futures. Il est exercé à ce jour par le ministère de la transition écologique et par le ministère de l'économie, des finances et de la relance et porte en particulier sur l'évaluation de ces charges, leur provisionnement et la gestion des actifs dédiés. À ce titre, une modification du cadre réglementaire relatif à la sécurisation du financement des charges nucléaires a été réalisée le 1er juillet 2020. Cette modification permettra entre autres d'entériner le renforcement d'exigences relatives à la gestion des risques et des incertitudes et d'exigences relatives à l'arbitrage entre les objectifs de délais et de coûts des opérations. Les exploitants devront ainsi justifier du degré de connaissance et de maitrise de l'état initial ainsi que des principaux enjeux relatifs à l'incidence d'une éventuelle indisponibilité de ressources techniques ou humaines. Au moins tous les trois ans, ils devront réexaminer de manière approfondie les risques susceptibles d'affecter le montant ou l'échéancier des charges nucléaires. Ils devront également formaliser leur analyse de l'acceptabilité des conditions économiques associées aux différentes options raisonnablement envisageables pour conduire les opérations de démantèlement en regard de l'obligation de démantèlement « dans un délai aussi court que possible » prévue à l'article L. 593-25 du code de l'environnement.

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