Question de M. BONNECARRÈRE Philippe (Tarn - UC) publiée le 12/03/2020

M. Philippe Bonnecarrère interroge M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur l'application de l'article L. 213-9 du code de la sécurité sociale aux enseignants.

Au titre du premier alinéa de cet article « les employeurs sont tenus de laisser aux salariés de leur entreprise membres d'un conseil ou d'un conseil d'administration, d'un organisme de sécurité sociale, le temps nécessaire pour se rendre et participer aux séances ».
Cette disposition est considérée comme ayant vocation à s'appliquer tant aux salariés de droit privé qu'aux agents de droit public conformément à la jurisprudence du Conseil d'État du 16 décembre 1994 (requête numéro 99459).

Le présent parlementaire a constaté que malgré ces dispositions et leur interprétation jurisprudentielle, un enseignant de l'enseignement privé se voyait refuser le bénéfice d'autorisation d'absence qu'il sollicite comme président d'un organisme social dans tel département ou comme membre du conseil d'administration d'un organisme social sur le plan national.

La directrice de la sécurité sociale sous timbre du ministère des solidarités et de la santé a rappelé que la désignation des membres des conseils de sécurité sociale avait pour mission principale de régler les affaires de chaque organisme et qu'à ce titre les dispositions de l'article L. 231-9 du code de la sécurité sociale devaient être applicables.

Néanmoins, les services centraux du ministère continuent à soutenir que l'article L. 213-9 du code de la sécurité sociale ne serait pas applicable aux maîtres de l'enseignement privé au motif de l'absence de dispositions réglementaires, ce qui est un argument assez curieux alors que la disposition législative existe.

Les autorisations d'absence continuent en conséquence à relever du droit commun pour une caisse primaire d'assurance maladie ou une caisse d'allocations familiales. Ce refus d'appliquer les dispositions de l'article L. 231-9 premier alinéa du code de la sécurité sociale est d'autant plus surprenant qu'en application de l'article R. 914-105 du code de l'éducation, les maîtres contractuels des établissements d'enseignements privés sous contrat bénéficient du régime des autorisations d'absence dans les mêmes conditions que les enseignants titulaires de l'enseignement public.

Il lui demande de lui préciser comment il entend faire appliquer par ses services les dispositions précitées et mettre également fin à la différence d'interprétation entre les services de l'éducation nationale et la direction de la sécurité sociale pour le ministère des solidarités et de la santé.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé publiée le 27/05/2020

Réponse apportée en séance publique le 26/05/2020

M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, auteur de la question n° 1169, transmise à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Philippe Bonnecarrère. Je souhaite vous interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur les moyens de faciliter l'exercice des mandats électifs – un sujet d'actualité ! Il peut s'agir de mandats électifs exercés au sein de collectivités locales, mais aussi de mandats dans d'autres domaines : je pense au droit du travail, avec tout ce qui relève des conseils de prud'hommes, ou aux matières sociales, avec la représentation dans les conseils d'administration des caisses d'assurance maladie ou des caisses d'allocations familiales.

La règle actuelle veut que tous les salariés soient placés dans les mêmes conditions et que tous les employeurs aient vocation à faciliter l'exercice de ces mandats. Or le ministère de l'éducation nationale, ou du moins celle de ses directions centrales qui est concernée, a adopté une position différente. Il y a donc clairement une harmonisation à trouver avec le ministère de la santé, qui, lui, a normalement la tutelle des organismes à vocation sociale.

Très concrètement, sous l'angle du ministère de la santé, l'article L. 231-9 du code de la sécurité sociale impose aux employeurs de « laisser aux salariés de leur entreprise, membres d'un conseil ou d'un conseil d'administration d'un organisme de sécurité sociale, le temps nécessaire pour se rendre et participer aux séances […] ». Sans vouloir à l'excès jouer les savants, j'ajoute qu'un arrêt du Conseil d'État de 1994 a porté extension de cette disposition à tous les agents de droit public.

À l'instant présent, nous rencontrons une difficulté pour les maîtres de l'enseignement privé, auxquels le ministère de l'éducation nationale n'accorde pas les dérogations correspondantes. De ce fait, ils ne sont pas en mesure d'assurer la présidence d'une caisse primaire d'assurance maladie ou d'une caisse d'allocations familiales. Le motif invoqué est celui d'une absence de dispositions réglementaires, ce qui est tout de même assez curieux alors que la base législative existe.

Je souhaite donc avoir confirmation, de votre part, que le ministère de l'éducation nationale voudra bien respecter les dispositions de notre code de la sécurité sociale.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé. Je vais répondre très précisément à votre question, monsieur le sénateur Philippe Bonnecarrère, mais permettez-moi auparavant de revenir sur le cadre, en dépit de votre exposé on ne peut plus clair.

Comme vous l'avez mentionné, malgré le rappel du dispositif légal en vigueur par la direction de la sécurité sociale, certains employeurs relevant du champ de compétences du ministère de l'éducation nationale continuent de refuser, en pratique, de fournir des autorisations d'absence avec maintien du traitement pour des participations à divers conseils – conseils d'administration, commissions ou représentations liées aux fonctions d'administrateur –, notamment dans le cadre d'organismes de sécurité sociale.

Les conseils de ces organismes de sécurité sociale ont pour mission principale de régler les affaires de chacun d'entre eux. À ce titre, la désignation de leurs membres et leur fonctionnement sont régis par les dispositions législatives du code de la sécurité sociale, notamment par ses articles L. 231-1 et suivants.

Effectivement, le premier alinéa de l'article L. 231-9 de ce même code dispose très explicitement que « les employeurs sont tenus de laisser aux salariés de leur entreprise, membres d'un conseil ou d'un conseil d'administration d'un organisme de sécurité sociale, le temps nécessaire pour se rendre et participer aux séances […] ».

Cette disposition législative a vocation à s'appliquer tant aux salariés de droit privé qu'aux agents de droit public, conformément à une jurisprudence du Conseil d'État, que vous avez rappelée, datant de 1994. Celle-ci précise que ladite disposition « a pour objet et pour effet de créer au profit de tous les membres des conseils d'administration des organismes de sécurité sociale le droit de bénéficier des autorisations d'absence nécessaires à l'accomplissement de leur mandat, que ces membres soient des salariés de droit privé ou des agents publics ».

L'application aux enseignants de l'éducation nationale, indépendamment de leur statut, s'impose donc.

Un autre article du code de la sécurité sociale spécifie par ailleurs que, en contrepartie, les organismes de sécurité sociale « remboursent également aux employeurs des membres du conseil ou administrateurs salariés les salaires maintenus pour leur permettre d'exercer leurs fonctions pendant le temps de travail […] ». L'éducation nationale peut évidemment prétendre à cette compensation monétaire.

L'ensemble de ce dispositif, qui garantit à chacun la possibilité de participer aux instances de la sécurité sociale, est d'application directe. Mon collègue Jean-Michel Blanquer m'a fait savoir, à l'occasion de votre question, qu'il rappellera, à la fois aux académies et aux établissements d'enseignement, publics et privés, les dispositions législatives, la jurisprudence applicable, ainsi que les enjeux d'une libre participation des assurés à l'administration des organismes de sécurité sociale.

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