Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - Les Républicains) publiée le 27/02/2020
M. Antoine Lefèvre attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'avenir de la filière betteravière. Suite à la fin des quotas en 2013, cette filière a connu des aléas, et le marché a besoin de signes forts. La filière souhaite un développement à l'international, mais aussi de nouveaux débouchés dans l'énergie et la chimie verte. La valorisation des déchets et résidus est en effet plus que jamais essentielle pour renforcer la compétitivité de son modèle sucrier et préserver son activité alimentaire en France. Or, la restructuration de l'industrie sucrière européenne n'est pas arrivée à son terme, et des mesures de soutien à la compétitivité des installations dans l'hexagone apparaissent nécessaires : sectorielles dans le cadre de la politique agricole commune et de non-distorsion de concurrence, valorisation des débouchés agricoles par le développement de l'éthanol et des aides à la méthanisation. Il lui demande les mesures qu'il envisage pour intensifier de manière significative le développement et la distribution des biocarburants, ainsi que son action dans le cadre de la nouvelle politique agricole commune (PAC) pour préserver le marché français du sucre.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 25/06/2020
Deux ans après la fin des quotas sucriers, la baisse importante des cours sur le marché mondial et européen a durement impacté les résultats des fabricants français, avec pour conséquence des restructurations et la fermeture de quatre sucreries. Alors que les perspectives s'amélioraient en début d'année 2020, la crise sanitaire et la baisse des cours du pétrole ont fait replonger les cours mondiaux du sucre avec pour effet une nouvelle incertitude sur le marché européen du sucre et un impact immédiat sur le débouché du bioéthanol en France. Afin de soutenir le secteur dans cette période difficile, le Gouvernement porte des propositions aux niveaux national et européen destinées à améliorer la compétitivité du secteur sucrier français. Au niveau européen, le Gouvernement porte l'exigence d'établir et de respecter des règles du jeu équitables pour tous les États membres. Il exige un encadrement plus strict des dérogations accordées pour l'utilisation de certains produits phytosanitaires (néonicotinoïdes) afin de limiter toute distorsion de traitement au sein de l'Union européenne (UE), sujet particulièrement important au moment où le marché européen se restructure. C'est également dans cet esprit que le Gouvernement a demandé à la Commission européenne d'adopter une position plus offensive vis-à-vis de certains pays-tiers qui, en adoptant des mesures de soutien à leur secteur sucrier, ne respectent pas leurs engagements vis-à-vis de l'organisation mondiale du commerce (OMC), ce qui a un impact réel sur l'offre en sucre sur le marché mondial, donc sur les cours mondiaux, et en conséquence sur la situation du secteur européen. Au-delà des positions portées au niveau de l'UE pour garantir l'absence de distorsion, le Gouvernement a ouvert une concertation au niveau national sur l'avenir de la filière betterave-sucre qui est confrontée à des défis majeurs, qu'il s'agisse de la transition écologique, du nouvel environnement économique post-quotas ou de la concurrence internationale. Cette concertation a abouti à l'élaboration par l'interprofession d'un plan stratégique ayant pour objectif de construire une vision et une ambition partagées pour l'avenir de la filière en France autour de cinq axes : la compétitivité de l'amont agricole, la compétitivité de la transformation industrielle, la diversification des débouchés, les aspects internationaux et l'image du sucre. Ce plan stratégique doit dorénavant être mis en uvre par l'ensemble des acteurs de la filière avec l'appui des pouvoirs publics lorsque cela sera possible et nécessaire. Par ailleurs, le Gouvernement soutient les mesures de diversification des débouchés susceptibles de renforcer l'équilibre de la filière betterave-sucre. La taxe incitative relative à l'incorporation des biocarburants (TIRIB) constitue à cet égard un levier majeur d'incorporation du bioéthanol dans l'essence. Les trajectoires sont désormais fixées sur une durée de deux ans, afin de donner davantage de visibilité aux professionnels. La part de l'éthanol augmente régulièrement (de 7 % en 2016 à 8,6 % prévus pour 2021). Cette progression significative a notamment été permise par l'intégration des résidus sucriers dans les matières premières éligibles à la TIRIB, dont la part est passée de 0,2 % en 2019 à 0,4 % en 2020, puis 0,8 % en 2021. Ce soutien à la filière bioéthanol s'inscrit pleinement dans le cadre européen et répond à l'obligation communautaire d'atteindre 14 % d'énergies renouvelables dans les transports en 2030. La réalisation de cet objectif ambitieux impose de poursuivre l'accroissement de l'incorporation de bioéthanol dans l'essence, ce qui est possible grâce à la forte progression des carburants SP95-E10 et du super-éthanol E85, dont les volumes mis à la consommation ont crû respectivement de 20 % et 85 % en 2019. Afin de soutenir la croissance de l'E85, le Gouvernement a pris l'arrêté du 30 novembre 2017 relatif à l'homologation des boîtiers de conversion « flex-fuel », qui permettent d'adapter les moteurs essences classiques à ce nouveau biocarburant. Depuis lors, quatre fabricants ont été homologués, ce qui a permis de multiplier le nombre d'installateurs affiliés. En outre, la très faible fiscalité de l'E85 pour le consommateur permet d'amortir rapidement le coût d'installation de ces boîtiers homologués. Par ailleurs, près de 20 % des stations-service sont désormais équipées de pompes délivrant de l'E85. Certes, du fait de la crise actuelle, les prévisions de consommation d'essence ont dû être revues à la baisse, mais les parts dans ce marché de l'E10 (50 %) et de l'E85 (4 %) demeurent structurellement orientées à la hausse, ce qui garantit un débouché énergétique à la filière de la betterave sucrière. De surcroît, la feuille de route du Gouvernement relative au développement des biocarburants aéronautiques reconnaît les résidus sucriers comme l'une des matières premières entrant dans la fabrication d'isobutène biosourcé. Le Gouvernement est pleinement mobilisé au côté des régions, des élus et des acteurs de la filière pour garantir la compétitivité et la viabilité de la filière betterave-sucre française, qui dispose de nombreux atouts pour traverser les difficultés actuelles.
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