Question de M. COURTIAL Édouard (Oise - Les Républicains) publiée le 23/01/2020
M. Édouard Courtial appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la nécessaire lutte contre la désertification médicale. Comme de nombreux territoires ruraux, l'Oise est confrontée à ce phénomène qui ne cesse de prendre de l'ampleur. Si des mesures de bon sens ont été prises, notamment, dans le cadre de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, leur mise en œuvre tardive a conduit de nombreuses collectivités à intervenir directement. C'est le cas du conseil départemental de l'Oise mais aussi de nombreuses communes. Ces dernières, au prix d'efforts financiers parfois très conséquents dans le contexte budgétaire actuel, rénovent ou construisent des locaux propres à accueillir des pôles de santé. Or malgré cette volonté de répondre à cet enjeu majeur de santé publique, elles peinent à trouver des candidats pour s'y installer, malgré les nombreuses incitations existantes. Pour y faire face, certaines d'entre elles proposent de salarier les praticiens mais ce dispositif représente une charge extrêmement lourde pour les finances communales et rares sont celles qui peuvent durablement l'envisager. Ainsi, dans le contexte de pénurie extrême que nous connaissons et qui remet en cause la liberté d'installation des Français tout en créant une rupture d'égalité disproportionnée devant le service public de santé, il semble souhaitable que l'État puisse, sous certaines conditions, prendre en charge une partie de ce coût car si certaines aides à l'installation sont prévues, elles démontrent leurs limites. Aussi, il lui demande si elle envisage une telle mesure.
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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé
Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé publiée le 19/02/2020
Réponse apportée en séance publique le 18/02/2020
M. Édouard Courtial. Madame la secrétaire d'État, la désertification médicale est un fléau qui touche tous les territoires, et plus particulièrement la ruralité. Cette désertification fragilise notre pacte républicain en remettant en cause la liberté de choix des Français de vivre à la ville ou à la campagne.
Confronté à un phénomène sous-estimé, trop peu anticipé et qui s'accélère, l'État a commencé, mais sans doute trop tardivement, à prendre des mesures. Ainsi, certaines dispositions qu'il met en uvre vont indéniablement dans le bon sens, à commencer par le renforcement de la télémédecine et l'allégement des charges administratives.
Mais, pour pallier ce retard dans la prise de conscience du problème, les collectivités territoriales se sont organisées, avec les moyens qui sont les leurs, pour répondre à un enjeu majeur de santé publique. Si elles ne peuvent agir sur le premier levier, via l'augmentation significative du nombre de médecins par la nécessaire suppression du numerus clausus, elles actionnent le second en mettant en place des mesures incitatives fortes pour attirer les jeunes médecins.
C'est le cas du conseil départemental de l'Oise que j'ai eu l'honneur de présider , qui a lancé le plan « Oise santé » en 2018 et obtenu des résultats très encourageants. Plus localement encore, de nombreuses intercommunalités et communes s'engagent dans la bataille. Mais, une fois les locaux rénovés et prêts à recevoir les praticiens, les candidats sont encore trop peu nombreux. De ce fait, certaines collectivités proposent aux médecins d'être salariés. Cette formule séduit de plus en plus et peut être envisagée comme une offre complémentaire de la médecine libérale. Cependant, le salariat coûte très cher et peu de communes en ont, en vérité, les moyens. Pourtant, compte tenu des retours très positifs et de l'engorgement des services d'urgence dans les hôpitaux de proximité lorsqu'il en reste ! , il semble aujourd'hui indispensable de l'encourager pour toutes les collectivités, y compris les plus modestes, qui choisiraient cette voie.
Pour ce faire, le Gouvernement doit systématiser des mesures destinées directement aux communes, notamment pour les aider à assumer le coût de cette solution en dépit du contexte budgétaire actuel. Il y va de la survie de nos villages et de nos campagnes. Sur ce sujet comme sur d'autres, il y a les « diseux » et les « faiseux ». Nos collectivités appartiennent à la seconde catégorie, mais elles ne peuvent faire face seules.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, je vous rejoins sur le fait que le défi démographique que nous avons à relever aujourd'hui est grand : le nombre de médecins généralistes ou spécialistes en accès direct exerçant en libéral est en baisse régulière depuis 2010, et cette baisse est susceptible de se poursuivre jusqu'en 2025.
Dès 2017, nous avons pris des dispositions pour proposer des solutions adaptables à chaque contexte local, car la réponse aux difficultés démographiques n'est pas unique.
Depuis, des dynamiques de mobilisation et de coopération se sont nouées localement et ont permis d'enregistrer les premiers progrès sur le terrain.
Le plan Ma Santé 2022, annoncé par le Président de la République en septembre dernier, est venu donner un nouvel élan à cette démarche en proposant des leviers supplémentaires, comme le déploiement de 400 postes de médecin généraliste en exercice partagé entre une structure hospitalière et une structure ambulatoire ou salarié d'un centre de santé ou d'un établissement de santé.
Sur le volet du dispositif relatif au salariat, qui vous intéresse tout particulièrement, sachez que nous soutenons financièrement les créations de postes en apportant aux structures qui emploient les médecins une garantie financière pendant les deux premières années suivant le recrutement, soit le temps de constitution de la patientèle : en 2019, treize recrutements ont ainsi été réalisés dans ce cadre dans les Hauts-de-France.
Je terminerai en rappelant l'effort consenti depuis plusieurs années pour conforter les centres de santé, que ce soit au travers de l'accord conventionnel interprofessionnel valorisant l'exercice coordonné ou des aides financières importantes versées pour aider les centres qui s'ouvrent dans des territoires en tension à faire face aux frais d'investissement qu'implique le début d'activité ou les inciter à maintenir leur activité.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, nous sommes nous aussi des « faiseux », et pas seulement des « causeux » ! (Sourires.) Travaillons tous ensemble : l'État, par le biais des ARS et des moyens financiers qu'il accorde, sera toujours aux côtés des collectivités territoriales qui se saisissent de cette problématique, car c'est à partir des territoires que l'on peut mener à bien les projets.
Mme la présidente. La parole est à M. Édouard Courtial, pour la réplique.
M. Édouard Courtial. Madame la secrétaire d'État, je n'ai jamais prétendu que vous faisiez partie des « diseux » ! (Sourires.) Je constate que le Gouvernement fait preuve de volontarisme. Allons ensemble encore plus vite, plus loin : c'est à ce prix que l'on réduira la fracture territoriale en matière d'accès aux soins.
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