Question de M. COLLOMBAT Pierre-Yves (Var - CRCE-R) publiée le 23/01/2020

M. Pierre-Yves Collombat interroge Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé sur les intentions du Gouvernement concernant les ordonnances - issues de l'article 50 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance - traitant des modes d'accueil de la petite enfance afin d'adapter la réglementation aux besoins et aux spécificités locales.
En effet, de nombreux élus ruraux et responsables locaux attendent impatiemment les moyens de répondre aux demandes des familles, et tout particulièrement de celles dont les deux parents travaillent, de place de garde d'enfant au sein des structures d'accueil de la petite enfance,
Sont particulièrement attendues les possibilités évoquées lors des consultations de déroger à l'obligation générale d'un espace minimum de 7,5 mètres carrés par enfant et d'assouplissement des modalités d'accueil en surnombre, la même qualité d'accueil étant par ailleurs garantie.
Il lui demande donc de lui confirmer si les dispositions évoquées ont quelque chance d'être retenues et, si non, quelles seront les mesures prises.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé publiée le 04/03/2020

Réponse apportée en séance publique le 03/03/2020

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 1091, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé.

M. Pierre-Yves Collombat. La rapidité d'exécution est la justification habituelle des entorses au principe républicain selon lequel la loi est élaborée par le Parlement. Les gouvernements nous la servent régulièrement lorsqu'ils présentent une demande d'habilitation à légiférer par ordonnances. S'agissant de celles qui sont prévues à l'article 50 de la loi du 10 août 2018 – promulguée voilà bientôt dix-neuf mois ! –, à l'évidence, l'argument ne tient pas ! Encore moins si l'article 36 du projet de loi ASAP, en cours de discussion, est voté, puisqu'il prévoit d'allonger encore d'un an le délai d'habilitation établi par la loi de 2018. C'est une vraie course de lenteur !

En attendant, les problèmes que ces ordonnances sont censées régler demeurent, notamment ceux que pose aux élus des petites communes l'inadaptation de la législation et de la réglementation relatives aux crèches et à leur manque de moyens. Ces élus sont dans l'impossibilité de répondre aux attentes des parents, particulièrement de ceux qui travaillent.

Sont très attendues les possibilités, évoquées lors des consultations ayant précédé la demande d'habilitation, de dérogation à l'obligation générale d'un espace minimum de 7,5 mètres carrés par enfant et d'assouplissement des modalités d'accueil en surnombre, la même qualité d'accueil étant par ailleurs garantie.

Monsieur le secrétaire d'État, peut-on espérer que les élus et les parents des petites collectivités ne seront pas déçus ? Si oui, peuvent-ils, en attendant le texte définitif – j'insiste particulièrement sur ce point –, bénéficier de dérogations qui leur permettraient de mettre en route leurs projets en toute sécurité juridique ? Comme vous le savez, entre le moment où l'on projette et celui où l'on réalise, il peut se passer un certain temps… Je vous remercie de bien vouloir m'apporter une réponse positive.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé. Je vous remercie de cette question, monsieur le sénateur Pierre-Yves Collombat, qui me permettra de répondre à certaines interrogations s'exprimant sur le sujet depuis plusieurs mois. Je ne doute pas que vous vous joindrez à moi pour saluer le souhait qui est le nôtre de continuer à discuter avec l'ensemble des parties prenantes, afin d'élaborer des dispositions susceptibles de convenir à tout le monde – à commencer par nos enfants, au regard de leur sécurité et de leur épanouissement.

Comme vous l'avez rappelé, lors de l'examen de la loi pour un État au service d'une société de confiance, les parlementaires ont habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances toutes les mesures d'ordre législatif pouvant concourir au développement et au maintien de l'offre d'accueil du jeune enfant.

Une concertation s'est tenue, de septembre 2018 à septembre 2019, avec l'ensemble des parties prenantes. Elle a fait l'objet d'un rapport rendu public en décembre 2019, rapport que vous avez parcouru, j'imagine.

Il s'agit pour nous de simplifier le cadre pour renforcer l'offre d'accueil, mieux l'adapter aux besoins des parents et améliorer le quotidien des professionnels. Cette réforme nous permettra d'atteindre l'objectif ambitieux que nous nous sommes fixé de 30 000 places de crèche créées d'ici à 2022.

Parmi les mesures envisagées, se trouvent la simplification du pilotage local de la politique d'accueil du jeune enfant et la transformation des relais d'assistants maternels en relais petite enfance. Ils deviendraient ainsi de véritables lieux de référence pour les parents recherchant un mode d'accueil et des lieux ressources pour les assistants maternels, leur permettant d'échanger autour de leurs pratiques, d'accéder à la formation continue et de sortir d'un isolement qu'ils connaissent parfois – l'isolement pouvant constituer, dans certains cas, le premier pas vers la maltraitance.

Citons également l'introduction d'un référentiel national définissant les exigences en matière de locaux pour les établissements, opposable partout en France, pour faciliter les démarches des porteurs de projets.

Enfin, le ministère des solidarités et de la santé a souhaité que cette réforme permette de refonder l'accompagnement des équipes en matière de santé du jeune enfant, afin de permettre davantage de prévention en matière de santé et d'encourager un accueil plus inclusif pour les enfants en situation de handicap ou atteints de maladies chroniques.

Conformément au souhait du Parlement, la réforme favorise les expérimentations. Il est par exemple proposé d'expérimenter partout en France une obligation d'organisation de temps d'analyse de pratiques dans les établissements – c'est une demande des professionnels. De même, sera expérimenté un assouplissement des règles d'encadrement permettant qu'un seul professionnel accueille seul jusqu'à trois enfants entre dix-huit heures et six heures, afin de développer l'offre d'accueil en horaires atypiques pour les parents travaillant en horaires décalés ou ceux dont les temps de trajet nécessitent de laisser leur enfant un peu plus tôt le matin.

La consultation précédemment évoquée a permis de conclure à un besoin d'élargissement du périmètre de l'habilitation octroyée, afin de permettre la refondation nécessaire du pilotage local de la politique d'accueil du jeune enfant. Cette réforme devra également inclure des mesures découlant des travaux de la commission, présidée par Boris Cyrulnik, sur les 1 000 premiers jours de l'enfant. Ce projet, que je suis tout particulièrement, devrait déboucher sur des annonces avant l'été.

Voilà pourquoi une nouvelle demande d'habilitation a été intégrée au projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique, à son article 36. Cela nous permettra de finaliser la réforme en liaison avec l'ensemble des parties prenantes.

M. le président. Vous avez de nouveau dépassé votre temps de parole, monsieur le secrétaire d'État.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour la réplique.

M. Pierre-Yves Collombat. Je me demande, monsieur le secrétaire d'État, si vous avez entendu ce que j'ai dit… Vous répondez complètement à côté ! Vous ne me répondez pas en fait ! Je le sais, les intentions du Gouvernement sont d'une pureté totale ; il obtient des résultats parfaits… Mais les réalités sont là ! En plus de construire une société de confiance, vous feriez bien de nourrir la confiance avec le Parlement ! Une telle réponse n'est pas acceptable !

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. Vous exagérez !

M. Pierre-Yves Collombat. C'est se moquer du monde ! Mais le Gouvernement passe son temps à se moquer du monde…

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