Question de Mme DELATTRE Nathalie (Gironde - RDSE) publiée le 19/12/2019

Mme Nathalie Delattre attire l'attention de Mme la ministre des armées sur la problématique des militaires décédés accidentellement au cours d'une mission de préparation opérationnelle avant projection pour une opération extérieure. Lors de ces missions de préparation, techniques et exigeantes, nos militaires sont testés jusqu'à l'extrême, et s'exposent à ce titre d'une façon non négligeable. Parfois, des accidents mortels surviennent lors de ces préparations par le fait des armes, du matériel utilisé, ou de mises en situation.

Dans de telles conditions, il lui apparaît que le décès d'un serviteur de la Nation dans les conditions du service, et dans ce contexte de préparation à la guerre et de situations opérationnelles requiert la solidarité nationale, la reconnaissance et le soutien de l'État. Comme le demandent les familles des victimes, elle considère que la France devrait reconnaître la mention « mort pour le service de la Nation ». Cette reconnaissance est aujourd'hui sujette à interprétations à géométrie variable.

En effet, la loi n° 2012-1432 du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme reconnait cette mention de « mort pour le service de la nation », mais la difficulté d'interprétation réside dans le décret n° 2016-331 du 18 mars 2016 relatif à la mention « mort pour le service de la Nation ».

Aussi, elle lui demande de bien vouloir envisager la possibilité de réécrire les termes de ce décret afin que les militaires morts dans des circonstances de préparation opérationnelle pour notre pays soient enfin reconnus comme morts pour le service de la Nation.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès de la ministre des armées


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des armées publiée le 26/03/2020

La mention « Mort pour le service de la Nation » (MPSN) a été créée par l'article 12 de la loi n° 2012-1432 du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme et codifiée à l'article L. 513-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG). Cet article dispose que : « Le ministre compétent peut décider que la mention " Mort pour le service de la Nation " est portée sur l'acte de décès : 1° D'un militaire tué en service ou en raison de sa qualité de militaire ; 2° D'un autre agent public tué en raison de ses fonctions ou de sa qualité ». Issu du décret n° 2016-331 du 18 mars 2016 relatif à la mention « mort pour le service de la Nation », l'article R. 513-1 du CPMIVG complète l'article L. 513-1, précité, en indiquant que « Les personnes mentionnées aux 1° et 2° de l'article L. 513-1 du présent code peuvent bénéficier de la mention " Mort pour le service de la Nation " si elles sont décédées des suites de l'acte volontaire d'un tiers ». Le deuxième alinéa de cet article précise également que peut être reconnu mort pour le service de la Nation « un militaire ou un agent public décédé du fait de l'accomplissement de ses fonctions dans des circonstances exceptionnelles  ». Aussi, l'instruction du dossier relatif à l'attribution de la mention « Mort pour le service de la Nation » est effectuée par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) après demande de toute personne ayant intérêt à agir au profit de la personne décédée. Elle a pour effet de rendre obligatoire l'inscription du nom du défunt sur un monument de sa commune de naissance ou de son dernier domicile. Les enfants du défunt âgés de moins de 21 ans ont de plus vocation à se voir reconnaitre la qualité de pupille de la Nation. Malheureusement, des accidents mortels surviennent parfois lors d'exercices de préparation opérationnelle exercés par des militaires. Ces décès, qui rappellent cruellement les exigences du métier militaire, n'entrent pas dans les conditions ouvrant droit à la mention honorifique « Mort pour le service de la Nation ». Celle-ci concerne en effet les soldats tués en service ou en raison de leur qualité de militaires, du fait de l'acte volontaire d'un tiers. Ces décès ne répondent pas non plus aux conditions, purement réglementaires, fondées sur l'accomplissement des fonctions dans des circonstances exceptionnelles évoquées au deuxième alinéa de l'article R. 513-1 du CPMIVG. L'accomplissement des fonctions renvoie à l'action, au comportement de l'agent ou du militaire décédé lors de l'événement. En créant la mention « Mort pour le service de la Nation », le législateur a entendu rendre un hommage national aux personnes qui ont fait le choix de s'engager au service de la collectivité d'une manière si forte qu'ils en ont payé le prix de leur vie. Dès lors, le comportement du militaire ou de l'agent, doit relever d'actes qui n'entrent pas dans le cadre de l'accomplissement normal du service, comme la constance face à l'adversité, le courage, ou encore le sacrifice consenti. Il est à noter que les circonstances exceptionnelles, sont appréciées par les juges comme des situations présentant les caractères suivants : gravité particulière ou anormalité (guerres, émeutes, cataclysmes naturels), imprévisibilité, irrésistibilité, tant dans leur survenance, que dans leurs effets, insurmontables, qui s'assimilent à des cas de force majeure. S'agissant des circonstances exceptionnelles, celles-ci sont appréciées de manière discrétionnaire par l'autorité administrative. Sans méconnaître les mérites des militaires qui s'entraînent si durement, parfois au péril de leur vie, il n'apparaît pas que ces décès, survenus au cours d'exercices usuels et planifiés dans des centres d'entrainement habituellement dévolus aux exercices tout terrain, répondent à la formulation du deuxième alinéa de l'article R. 513-1 du CPMIVG. Il est cependant précisé qu'en application des dispositions du CPMIVG, du code des pensions civiles et militaires de retraite et du code de la défense, les conjoints survivants des militaires décédés peuvent prétendre au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité, ainsi qu'à celui d'une allocation du fonds de prévoyance en fonction de leur situation familiale, et d'une pension de réversion en fonction de leur situation familiale et du nombre d'années de services accomplis par le militaire décédé. Il convient de rappeler également que le code de la défense prévoit en ses articles L. 4123-13 à L. 4123-18 un régime de protection particulière en faveur des enfants mineurs des militaires décédés ou blessés accidentellement, dans l'exécution, sur ordre, en temps de paix, de missions, services, ou tâches comportant des risques particuliers ou au cours de manœuvres ou d'exercices préparant au combat. Cette protection est très proche de la celle accordée par l'Etat aux pupilles de la Nation. Les enfants bénéficiaires de cette protection, prononcée par un jugement du tribunal judiciaire territorialement compétent, relèvent de l'action sociale des armées. Au regard des ressources effectives de la famille, une aide à l'éducation et/ou une allocation d'entretien, d'un an renouvelable, peuvent ainsi être attribuées, jusqu'à la majorité de l'enfant, à son père, à sa mère ou à son représentant légal. Des bourses et exonérations diverses peuvent en outre être accordées par l'État aux enfants protégés, même au-delà de leur majorité, en vue de faciliter leur instruction.Enfin, les mentions de « mort en service » ou « mort en service (aérien) commandé » sont déjà usitées en pratique dans le monde militaire. Même si elles ne sont pas inscrites dans les textes réglementaires et/ou législatifs, elles permettent d'ériger dans les enceintes militaires des petits monuments commémoratifs (plaques, stèles…) devant lesquels les familles peuvent venir se recueillir. La reconnaissance se fait à l'intérieur des enceintes militaires, ou est réalisée par des associations, et non sur des monuments communaux, à la différence des mentions « Mort pour la France » et « Mort pour le service de la nation » définies dans le CPMIVG. Dès lors, le Gouvernement ne prévoit pas de modifier la législation en vigueur.

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