Question de Mme MICOULEAU Brigitte (Haute-Garonne - Les Républicains) publiée le 12/12/2019
Mme Brigitte Micouleau attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences de la très récente offre publique d'achat (OPA) du fonds d'investissement américain « Searchlight Capital Partners » sur le groupe Latécoère, fleuron de l'industrie française implanté historiquement à Toulouse.
Spécialiste en aérostructures et systèmes d'interconnexion, mais surtout en équipements aéronautiques stratégiques, et leader sur la technologie de « Lifi » (internet par la lumière), les technologies sensibles de l'entreprise Latécoère - au travers de ses centres d'excellence - sont menacées. Le risque d'une perte de souveraineté sur nos technologies les plus innovantes est une réalité.
Le 21 novembre 2019, le conseil de Toulouse métropole avait ainsi demandé au Gouvernement, à l'occasion d'un vœu unanimement voté, d'étudier la possibilité pour BPI France d'acquérir 10 % du capital de Latécoère et une méthodologie permettant d'écarter tout risque industriel lié à cette OPA.
Cette prise de contrôle d'un groupe industriel aux technologies novatrices et de pointe souligne, une fois de plus, l'absence de doctrine de la France sur sa souveraineté économique, sur sa sécurité et l'absence de réflexion stratégique.
L'avenir de Latécoère constitue un enjeu aussi bien industriel qu'en termes d'emplois. La préservation de notre industrie nécessite une approche souveraine.
Elle lui demande donc quelles dispositions peuvent encore être envisagées pour permettre à BPI France d'acquérir 10 % du capital de Latécoère et comment le Gouvernement pourra assurer un droit de regard sur l'avenir industriel de Latécoère et celui de ses salariés.
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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 27/02/2020
Le contrôle des investissements étrangers en France constitue l'une des préoccupations les plus essentielles du ministère de l'économie et des finances, qui poursuit l'objectif de protéger les intérêts nationaux de la façon la plus rigoureuse et la plus efficace tout en étant soucieux d'améliorer l'attractivité de l'économie auprès des investisseurs étrangers. Les projets d'investissements étrangers concernant des sociétés françaises, notamment la société Latécoère, font l'objet d'un contrôle particulièrement attentif de la part des services du ministère de l'économie et des finances. Le respect de la confidentialité des informations liées à l'opération, comme de toutes les opérations soumises à la procédure de contrôle des investissements étrangers, constitue cependant une condition fondamentale de son succès et de son efficacité. Outre la protection nécessaire du secret des affaires et du secret de la défense nationale, cette procédure repose en effet avant tout sur la confiance des parties prenantes dans le traitement, par l'administration, des informations qu'elles fournissent dans ce cadre. Le ministère ne communique donc jamais sur des dossiers individuels et les conditions édictées par le ministre dans le cadre d'investissements étrangers ne sont jamais rendues publiques, hormis dans les cas très rares où d'autres réglementations l'imposent. À l'occasion de l'acquisition de la société Latécoère, l'une des conditions exigées à l'égard de l'investisseur a été exceptionnellement rendue publique afin de respecter la réglementation applicable en matière de transparence des marchés financiers en période d'offre publique d'acquisition. Cette condition, bien que ne pouvant être séparée de l'ensemble des éléments du dossier auquel elle se rattache, illustre le souci du Gouvernement de protéger les intérêts nationaux dans le cadre de cet investissement, mais ne le résume pas. Les autres conditions édictées par le ministre font l'objet de la confidentialité exigée par les enjeux mentionnés ci-dessus. Le Gouvernement ne pourrait révéler publiquement des éléments qui relèvent de l'instruction de ces décisions sans méconnaitre la loi. En effet, l'article L. 151-6 du code monétaire et financier encadre de manière particulièrement stricte la communication au public d'informations relatives à ce contrôle, précisant que ne peuvent être communiquées que des données statistiques garantissant l'anonymat des personnes physiques et morales concernées par la procédure d'autorisation préalable des investissements étrangers dans une activité en France. L'article L. 151-7 organise également un cadre dans lequel le Gouvernement peut tenir le Parlement informé de son action dans cette matière. Ces précautions sont indispensables pour assurer la nécessaire préservation des informations relatives aux activités sensibles des entreprises françaises concernées. La question posée permet cependant de rappeler le sens et les moyens de l'action du Gouvernement en la matière. Le contrôle de l'opération concernant la société Latécoère s'effectue selon la procédure prévue et encadrée par le code monétaire et financier, et s'applique lorsque trois critères cumulatifs sont réunis : un critère relatif à la nature étrangère de l'investisseur, un critère relatif à l'importance de la participation qu'il est envisagé d'acquérir dans la société, et un critère relatif à la nature susceptible ou non de porter atteinte aux intérêts nationaux de l'activité réalisée par la société. Lorsque ces trois critères sont réunis, le ministre chargé de l'économie n'autorise l'investissement que dans des conditions permettant d'assurer que celui-ci ne portera pas atteinte aux intérêts nationaux concernés. Ces conditions sont adaptées à l'investissement et visent à garantir la pérennité des activités sensibles en France. Les dizaines de dossiers de contrôle des investissements traités chaque année font ainsi l'objet d'une égale vigilance, et toutes les mesures sont prises pour garantir la pérennité, sur le territoire français, des activités sensibles des entreprises concernées. Cet objectif d'une protection rigoureuse et efficace ne peut cependant être mise en uvre que s'il est adapté aux réalités économiques des investissements internationaux et à l'évolution permanente des technologies clés. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a opéré une profonde réforme du dispositif de contrôle français, qui s'est déroulée en deux temps : dans un premier temps, la loi PACTE du 22 mai 2019 a permis de renforcer les pouvoirs d'injonction et de sanction du ministre chargé de l'économie, tout en améliorant la transparence du contrôle, à la fois par l'exigence d'un rapport annuel transmis au Parlement et par l'ouverture de la faculté, encadrée, de certains parlementaires d'entendre les ministres et administrations compétentes et de procéder à des investigations ; dans un second temps, le décret en Conseil d'État 2019-1590 du 31 décembre 2019 a notamment permis de couvrir des activités jusqu'ici absentes de cette procédure, en tirant les conséquences de l'adoption du règlement européen 2019/452 du 19 mars 2019, d'abaisser à 25% le seuil de participation susceptible de permettre au contrôle de se déclencher, de permettre aux investisseurs et aux sociétés françaises de contacter la Direction générale du Trésor plus rapidement dans le processus d'investissement, de mieux protéger nos technologies clés en listant par arrêté les secteurs de recherche et développement soumis au contrôle.
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