Question de M. JACQUIN Olivier (Meurthe-et-Moselle - SOCR) publiée le 14/11/2019
Question posée en séance publique le 13/11/2019
M. Olivier Jacquin. Monsieur le ministre, le nord lorrain est voisin du Luxembourg : c'est une chance pour les 105 000 frontaliers qui y travaillent chaque jour. Cependant, je souhaite vous interpeller sur une injustice notable ; j'associe à ma démarche mon collègue Jean-Marc Todeschini.
Vous connaissez les conditions fiscales qui prévalent au Grand-Duché, puisqu'une convention fiscale, au demeurant insuffisante, vient d'être actualisée. Le Luxembourg développe une politique économique offensive et les entreprises y sont soumises à des impôts et à des cotisations très faibles. C'est en partie pour ces raisons que des entreprises françaises s'y installent, asséchant de ce fait les ressources de nos collectivités, qui doivent néanmoins répondre aux demandes légitimes des frontaliers en matière de services, sans parler des difficultés de recrutement en France ou des problèmes de transport.
La France dispose d'accords bilatéraux avec la Belgique, l'Allemagne et la Suisse. Cette dernière, par exemple, reverse un pourcentage des salaires bruts à nos collectivités. En revanche, la France n'a pas d'accord de ce type avec le Luxembourg. Le Grand-Duché perçoit l'intégralité de l'impôt sur le revenu des travailleurs frontaliers, sans reverser de compensation ou presque à leurs territoires de résidence.
Lors de la trente-septième session du Congrès des pouvoirs locaux du Conseil de l'Europe, qui s'est tenue à Strasbourg il y a dix jours, l'affaire a enfin été clairement mise sur la table. Une résolution pour une répartition équitable de l'impôt dans les zones transfrontalières a été adoptée à une très large majorité. Toutefois, le Premier ministre luxembourgeois vient de déclarer qu'il n'envisageait pas de signer un tel chèque.
Monsieur le ministre, le Gouvernement suivra-t-il les recommandations du Conseil de l'Europe ? Allons-nous enfin nous doter d'une véritable politique, financée, d'accompagnement économique et social de tous nos territoires transfrontaliers ? (Applaudissements sur des travées du groupe SOCR. M. Alain Cazabonne applaudit également.)
Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics publiée le 14/11/2019
Réponse apportée en séance publique le 13/11/2019
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le sénateur Jacquin, je sais l'engagement qui est le vôtre pour tenter de rétablir une forme d'équité, notamment fiscale, entre le Luxembourg et la France sur les différents points que vous avez mentionnés. Vous l'avez dit, quelque 105 000 Français frontaliers travaillent quotidiennement au Luxembourg.
Vous avez évoqué nos accords fiscaux avec la Belgique, la Suisse ou l'Allemagne. À l'exception de celui qui nous lie au canton de Genève, ces accords présentent la particularité de contrevenir aux standards internationaux, qui prévoient que ce sont les États dans lesquels travaillent les personnes qui perçoivent l'impôt. Ainsi, dans le cadre des accords avec les pays que je viens de citer, c'est la France qui perçoit l'impôt sur le revenu des travailleurs frontaliers et elle indemnise, à due concurrence, les États dans lesquels ils travaillent.
Nous n'avons pas d'accord de ce type avec le Luxembourg. Nous avons essayé de trouver d'autres solutions, notamment un financement partagé des infrastructures et des programmes de développement économique. Le 20 mars 2018, un séminaire intergouvernemental a débouché sur l'adoption d'un protocole d'accord qui, il faut le souligner, a été approuvé par une loi promulguée le 29 octobre dernier, ce qui permettra de l'appliquer avec plus de force.
Ce protocole prévoit le financement d'infrastructures de transport dans le nord lorrain à hauteur de 240 millions d'euros, dont 120 millions d'euros par le Luxembourg. Nous veillons en particulier à ce que ce protocole vise à financer non pas une opération parmi d'autres, comme cela a pu être le cas précédemment avec la ligne à grande vitesse, mais bien un ensemble d'aménagements structurants, y compris dans le domaine du transport ferroviaire, pour le nord lorrain.
Outre ce protocole de financement d'un programme d'infrastructures, nous voulons développer une véritable coopération économique. Ainsi, il y a quelques jours, Amélie de Montchalin, secrétaire d'État chargée des affaires européennes, et Jacqueline Gourault ont entamé des discussions en vue de la conclusion d'un protocole de coopération, avec l'appui de l'Agence nationale de la cohésion des territoires. Nous entendons instaurer un partenariat en matière de financement des infrastructures et de développement économique, afin d'établir un équilibre et une coopération au bon niveau entre la France et le Luxembourg. (Applaudissements sur des travées du groupe LaREM.)
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