Question de M. MARIE Didier (Seine-Maritime - SOCR) publiée le 07/11/2019

M. Didier Marie attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse au sujet de la situation que vivent de nombreux accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), dans l'académie de Rouen comme ailleurs en France, qui travaillent sans contrat, sans salaire, ou les deux à la fois depuis la rentrée de septembre 2019.

- page 5577


Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 13/11/2019

Réponse apportée en séance publique le 12/11/2019

M. Didier Marie. Monsieur le ministre, ma question porte sur la situation de nombreux accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) dans l'académie de Rouen, comme vraisemblablement ailleurs en France.

Ces personnels de l'éducation nationale, agents contractuels de l'État, sont là pour accompagner, guider, sécuriser des enfants et adolescents en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire et pour participer à leur autonomie.

Sur les 12,4 millions d'élèves scolarisés de la maternelle au lycée, environ 400 000 se trouvent en situation de handicap : enfants avec trouble du spectre autistique, trouble du déficit de l'attention, avec ou sans hyperactivité, adolescents dyspraxiques ou dyslexiques… Tout élève reconnu handicapé et ayant besoin d'un accompagnateur doit avoir à ses côtés un AESH pour lui permettre de mener sa scolarité le mieux possible.

Chaque rentrée scolaire apporte toutefois son lot de problèmes : enfants sans accompagnants, accompagnants sans affectation, établissements scolaires non prévenus de l'arrivée d'un AESH…

La dernière rentrée ne fait pas exception puisque, depuis le mois de septembre dernier, plus de 200 AESH, dans la seule académie de Rouen, travaillent sans contrat de travail ou sans salaire, voire les deux à la fois. Certains accompagnants n'ont, à ce jour, toujours pas reçu leur affectation.

Cette situation plonge les accompagnants d'élèves handicapés dans une grande précarité. Le travail qu'ils réalisent auprès des enfants et adolescents en situation de handicap est pourtant essentiel. Il est incompréhensible que ces professionnels, dont le rôle est d'assurer l'inclusion de toutes et tous au sein de l'école de la République, travaillent bénévolement ou soient empêchés de remplir leur mission, alors que les enfants et adolescents en situation de handicap ont besoin d'eux.

Notre système est capable d'assurer, chaque année, la rentrée scolaire de 12 millions d'élèves. Il est inacceptable qu'il ne sache assurer celle des 400 000 élèves en situation de handicap et qu'il contrevienne ainsi au principe selon lequel le service public de l'éducation veille à l'inclusion scolaire de tous les enfants, sans distinction.

Monsieur le ministre, à l'heure où l'inclusion de personnes en situation de handicap a été érigée comme l'une des priorités du quinquennat du Président de la République, comment expliquez-vous ces graves dysfonctionnements ? Sont-ils liés à la mise en place, à la rentrée, des pôles inclusifs d'accompagnement localisés, dont l'un des objectifs était pourtant de professionnaliser les accompagnants et d'améliorer leurs conditions de travail ?

Quelles mesures votre ministère entend-il prendre pour remédier à ces problèmes et éviter qu'ils ne se reproduisent à la rentrée prochaine ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Didier Marie, comme vous l'avez rappelé, la dernière rentrée s'est caractérisée par un plus grand nombre d'élèves accueillis, 365 000 enfants en situation de handicap étant désormais scolarisés, et par un plus grand nombre d'embauches d'AESH. Ainsi, 4 500 AESH supplémentaires ont été recrutés dans toute la France, sur la base de contrats de trois ans et parfois même de CDI, en lieu et place des contrats aidés qui étaient conclus voilà encore deux ans.

Bien évidemment, ce que nous appelons « le service public de l'école inclusive » a permis, globalement, une amélioration très significative de la situation.

Quelques dysfonctionnements ont été enregistrés dans l'académie de Rouen.

La rentrée a vu la création d'un service de gestion dédié aux accompagnants dans les directions départementales des services de l'éducation nationale et dans les rectorats, de façon justement à déprécariser les personnels en charge de l'accompagnement des élèves handicapés.

De nombreux accompagnants supplémentaires ont été recrutés pour que nous puissions nous ajuster aux notifications des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), et la transformation des contrats aidés en AESH s'est poursuivie. Les volumétries de prise en charge des AESH ont été particulièrement importantes du fait de ce mouvement de recrutement et de déprécarisation.

Compte tenu des règles de la comptabilité publique, les agents qui ont été recrutés au début du mois de septembre n'ont pas tous pu bénéficier d'une rémunération complète au titre du mois de septembre dès la fin dudit mois : la paie de septembre étant clôturée, en vertu du calendrier national, à la fin du mois d'août, la totalité des documents nécessaires au versement de leur rémunération n'était pas parvenue.

Pour pallier les conséquences de ce calendrier anticipé, l'académie de Rouen a demandé le versement d'acomptes, ce qui a permis de payer entre 80 % et 90 % des rémunérations nettes dues au titre du mois de septembre. La mise en œuvre d'un tel mécanisme a permis qu'une très grande majorité des AESH bénéficient d'un acompte à la fin du mois de septembre et à la fin du mois d'octobre.

Pour les dossiers qui n'étaient pas complets aux échéances de transmission, il n'a pas été possible de s'appuyer sur cette procédure. Il s'en est ensuivi que certains AESH n'ont pas pu percevoir de rémunération, ce qui est évidemment tout à fait anormal.

Saisi de ces situations, le ministère s'est rapproché des services de la direction générale des finances publiques pour permettre que soient transmises au comptable, dès lors que les dossiers de prise en charge étaient complets, des demandes d'acompte en dehors des dates fixées par le calendrier national. Ainsi, pour l'académie de Rouen, le versement d'acomptes s'est poursuivi sur les mois d'octobre et de novembre.

Un pilotage renforcé permettra de parvenir à une régularisation de ces situations dans les meilleurs délais. Bien entendu, chacun sera désormais payé en temps et en heure.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.

M. Didier Marie. Vous conviendrez, monsieur le ministre, que cette situation est peu satisfaisante et que les dispositions prises doivent produire leur plein effet rapidement et régler toutes les situations.

Cela m'amène à une réflexion plus large : certes, la signature de contrats à durée déterminée de trois ans a permis des progrès, mais il faut aller vers une professionnalisation encore plus grande de ces agents de la fonction publique et leur offrir, à terme, des contrats à durée indéterminée.

- page 15084

Page mise à jour le