Question de M. MOUILLER Philippe (Deux-Sèvres - Les Républicains) publiée le 13/06/2019

M. Philippe Mouiller attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les vives inquiétudes exprimées par les associations représentatives des personnes handicapées quant au droit au travail des personnes en situation de handicap. Par lettre de mission du 28 mars 2019, l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales ont été mandatées pour mener une mission relative aux établissements et services d'aide par le travail (ESAT) qui forment le secteur protégé et qui permettent à des personnes lourdement handicapées d'exercer une activité professionnelle dans des conditions de travail aménagées. Les représentants des personnes en situation de handicap s'opposent à ce que la réforme en cours des entreprises adaptées et la future réforme des ESAT ne viennent fragiliser l'accès au travail des plus vulnérables. Elles estiment que les réformes envisagées doivent au contraire sécuriser les parcours des personnes en situation de handicap.Dans le cadre de la refonte du système de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH), les associations représentatives des personnes handicapées s'inquiètent des effets pervers d'une réforme qui vise à favoriser l'emploi direct des personnes handicapées. Alors que la réforme a été présentée comme neutre pour le secteur protégé et adapté ainsi que pour les travailleurs indépendants, on constate que certains donneurs d'ordre privés et publics gèlent leurs relations, reportent des décisions, voire envisagent de cesser à court terme leur recours à la sous-traitance auprès des ESAT. Les associations demandent à ce que la mission centrale des établissements de service et d'aide par le travail soit préservée afin d'accompagner des personnes handicapées dont les capacités de travail ne leur permettent pas, momentanément ou durablement, de travailler dans une entreprise ordinaire ou dans une entreprise adaptée. La quête de l'inclusion professionnelle dans le monde ordinaire ne doit pas faire oublier le remarquable outil d'inclusion sociale que représentent les ESAT.
Il lui demande de bien vouloir lui indiquer sa vision pour le secteur protégé dans les années à venir.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, chargé des personnes handicapées


Réponse du Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, chargé des personnes handicapées publiée le 22/07/2021

La crise économique et sociale a conduit le gouvernement à mettre en œuvre des mesures conjoncturelles d'urgence s'articulant avec des mesures structurelles visant à poursuivre la stratégie d'accompagnement de la modernisation et de la mutation des ESAT. Nous devons renforcer leur rôle dans les territoires d'accompagnement vers le marché du travail des personnes qu'ils accompagnent et maintenir leur capacité à proposer des parcours d'accès à l'emploi qui constituent autant de barrières contre le chômage de longue durée et la précarité. L'objectif est triple : ? Consolider la mission d'accompagnement vers l'emploi des ESAT en faisant évoluer d'une part leur modèle économique pour davantage de souplesse, mais aussi leur offre d'accompagnement aux travailleurs, afin qu'ils puissent pleinement participer à l'objectif d'une société du travail pour tous et plus inclusive ; ? Répondre à la demande de reconnaissance des travailleurs d'ESAT et à leurs revendications sociales en faisant évoluer leurs droits et leur capacité à participer à la gouvernance des établissements ; ? Accompagner les professionnels des établissements via des actions de formation adaptés aux enjeux actuels : management, spécialisation TSA. Afin de répondre à ces objectifs et dans la continuité du rapport de l'inspection général des affaires sociales d'octobre 2019 que vous mentionnez, j'ai souhaité lancer une démarche de transformation des ESAT par une concertation inaugurée le 10 janvier dernier. Cette démarche a abouti début juillet à un plan global comportant des mesures pour aider les établissements à pouvoir proposer une diversité d'accompagnements et de parcours vers l'emploi dans un contexte économique bouleversé La concertation qui a conduit à ce plan s'est organisée autour de 5 groupes de travail représentatifs associant des personnes en situation de handicap, des professionnels du médico-social, des associations ayant expérimenté des partenariats nouveaux avec des ESAT, des institutionnels et des entreprises. Les thèmes abordés étaient le modèle économique des établissements, le parcours d'accès vers l'emploi et les trajectoires professionnelles des personnes, l'adaptabilité aux nouveaux enjeux inclusifs es professionnels et le renforcement des droits des travailleurs. Début juillet, une présentation a été faite aux contributeurs s'agissant des résultats des arbitrages interministériels sur les propositions issues de la concertation. Le secteur professionnel comme les personnes en ESAT, expriment unanimement leur satisfaction et saluent la méthode en co-construction qui a été privilégiée et l'esprit de confiance qui a animé la démarche. Ce plan global issu de la concertation constitue les orientations pour les années à venir du modèle attendu des ESAT. Le gouvernement réaffirme le soutien au modèle des 1 500 ESAT, structures médico-sociales au sein desquelles évoluent près de 120 000 personnes en situation de handicap et dont le rôle est reconnu, d'autant plus à la sortie de la crise sanitaire, économique et sociale. L'enjeu est néanmoins d'impulser une nouvelle dynamique en confortant la mission des ESAT d'accompagnement des personnes dans une trajectoire professionnelle. Cette démarche de transformation s'inscrit dans la continuité du rapport de l'IGAS, publié fin 2019, sur les ESAT. La majeure partie des 31 mesures issues des 17 engagements du plan seront opérationnelles dès le 1er janvier 2022 dans le cadre d'une instruction ou d'un décret ; d'autres mesures nécessiteront la mobilisation d'une loi, PLF et du PLFSS, pour une mise en œuvre également au 1er janvier 2022 ; enfin, certaines mesures s'intègrent dans des sujets au périmètre plus étendu et devront faire l'objet de discussions dans le cadre de travaux déjà existants ou à lancer. Parmi les mesures les plus transformatrices : – S'agissant de la garantie des droits des personnes handicapées en ESAT : Le statut spécifique de la personne est conservé : l'ESAT n'est pas une entreprise ordinaire, la personne n'a pas un statut de salarié ; pour autant, la personne est reconnue comme sujet de droits, qui produit une valeur ajoutée par son travail en ESAT et des droits nouveaux qui se rapprochent de ceux des salariés sont octroyés, tels que les droits aux congés exceptionnels ou l'accès à la formation professionnelle. Les ESAT sont également incités à proposer une complémentaire santé. – S'agissant du renforcement de l'accompagnement et de la fluidification des parcours professionnels : ? L'acronyme ESAT évolue symboliquement et devient « Etablissements et Services d'Accompagnement par le Travail » au lieu de « aide par le travail », afin d'affirmer la mission des ESAT d'accompagner le projet professionnel des personnes. ? Les parcours professionnels des personnes sont dynamisés et sécurisés : l'orientation en ESAT devient « parcours renforcé en emploi » et permet à la personne d'évoluer librement en ESAT, en EA et en entreprise ordinaire « classique ». ? Les trajectoires sont sécurisées avec l'instauration d'un droit aux allers-retours, sans nouvelle décision administrative de la MDPH. Concrètement, la personne pourra faire des insertions en milieu ordinaire en ayant l'assurance, en cas de rupture durant la période d'orientation en ESAT, de pouvoir retrouver sa place en établissement. La personne pourra par ailleurs intégrer progressivement le milieu ordinaire, avec une possibilité de cumuler une activité professionnelle à temps partiel en ESAT et un contrat de travail à temps partiel auprès d'un employeur ordinaire. – S'agissant des établissements : ? Pour garantir cette fluidité de parcours, le cadre de gestion des établissements est assoupli : l'aide au poste versée par l'ASP aux établissements est désormais calculée sur une base annualisée. ? 15 millions d'euros sont mobilisés au titre du plan France Relance pour permettre aux établissements de moderniser leur équipement qui peut avoir un taux de vétusté important, mais aussi de recourir à des expertises conseil pour se positionner sur de nouvelles activités. C'est une condition nécessaire pour la formation professionnelle des personnes en situation de handicap, mais aussi pour donner de meilleures conditions de travail aux professionnels et aux moniteurs en particulier.

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