Question de Mme ROSSIGNOL Laurence (Oise - SOCR) publiée le 13/06/2019

Mme Laurence Rossignol attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la situation préoccupante de disparition des haies et des bosquets en France, menaçant la biodiversité.

Depuis 1950, 70 % des haies ont disparu des bocages français. L'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONFCS), devenu l'office français de la biodiversité (OFB), recensait la disparition de 750 000 km de haies vives, arrachées sous l'effet conjoint du remembrement agricole et du déclin de l'activité d'élevage au profit de la céréaliculture intensive. Aussi, une étude Agreste de 2014 montre que la surface en haies et alignements d'arbres en France métropolitaine est en constante diminution, avec une baisse de 6 % depuis 2006. Même si aujourd'hui la destruction d'une haie pour des besoins agricoles est soumise à conditions, ces dernières ne suffisent pas à enrayer leur déclin.

Le 6 mai 2019, le groupe d'experts des Nations unies sur la biodiversité (IPBES) a dévoilé les conclusions de son rapport sur l'état de la planète : 75 % de l'environnement terrestre a été « gravement altéré » par les activités humaines et cette anthropisation accélérée entraîne une disparition significative de la biodiversité. Une espèce animale ou végétale sur huit est menacée dans les prochaines décennies : un bilan alarmant dont les premiers responsables sont les modes intensifs de production agricole et la déforestation.

Dans ce contexte de crise écologique sans précédent, les haies bocagères et bosquets sont un formidable réservoir de biodiversité. Elles servent de couvert et de gîte pour de nombreux oiseaux et pour les animaux non fouisseurs qui ont drastiquement diminué des plaines françaises avec la destruction de leurs habitats. Elles accueillent des auxiliaires de culture, comme les pollinisateurs et prédateurs des ravageurs. Elles participent aussi à la régulation du régime des eaux, luttent contre l'érosion et le ruissellement. De plus, en associant les arbustes buissonnants à des arbres de haut jet, une haie bocagère peut devenir productive et fournir du bois d'œuvre ou énergie. Une production fruitière peut également y être valorisée. Enfin, une haie haute et dense est un véritable brise-vent et parasol pour les animaux d'élevage.

Les haies bocagères constituent donc un corridor écologique à l'intérêt cynégétique indéniable, essentiel pour maintenir une diversité d'espèces animales dans les campagnes. De nombreuses associations, fédérations de chasse et collectivités territoriales financent désormais des programmes de replantation dans un but de conservation pérenne de ce maillage bocager.

À l'heure où sauver une biodiversité gravement menacée est devenu un problème public majeur, elle lui demande quels dispositifs seront mis en place à l'échelle nationale pour favoriser un repeuplement massif et durable des haies et bosquets.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 25/07/2019

Les ministères chargés de l'agriculture et de la transition écologique accordent une attention toute particulière au bocage, paysage qui présente de multiples enjeux tels que la préservation de la biodiversité, la séquestration du carbone et l'adaptation au changement climatique, mais aussi la limitation du ruissellement, la lutte contre l'érosion, la préservation des paysages, etc. Dans le cadre du projet agro-écologique pour la France, le ministère chargé de l'agriculture a lancé, le 17 décembre 2015, le plan de développement de l'agroforesterie qui comporte plusieurs mesures relatives aux haies. L'agroforesterie étant définie comme l'ensemble des systèmes associant l'arbre à l'agriculture, les parcelles entourées de haies sont considérées comme constituant la première catégorie de paysages agroforestiers, en surface comme en importance pour les nombreux services rendus. Parmi ces mesures, le dispositif de suivi des bocages (inscrit dans le cadre de l'action 1.1 du plan de développement de l'agroforesterie) est un projet porté par l'institut national de l'information géographique et forestière et l'office national de la chasse et de la faune sauvage, co-financés par les ministères chargés de l'agriculture et de l'écologie. Il était en effet devenu nécessaire de se doter d'outils fiables, permettant d'avoir une vision précise du bocage et de son évolution, à la fois en termes de superficie et en termes qualitatifs. C'est ce que propose ce projet, né en 2017 et qui devrait donner, dès le début de l'année 2020, ses premiers résultats. Une autre action du plan de développement de l'agroforesterie (action 4.3) concerne la reconnaissance du bois bocager géré durablement et la mise en place d'un dispositif harmonisé de plans de gestion durable. L'association française arbres champêtres et agroforesteries et l'assemblée permanente des chambres d'agriculture participent activement à ce travail qui portera ses fruits dès 2020. Concernant la formation agricole, l'action 3.1. du plan de développement de l'agroforesterie a permis de coordonner la mise en place d'actions dédiées aux haies dans de très nombreux établissements d'enseignement agricole : aujourd'hui, plus de soixante-dix établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole sur les 189 couvrant le territoire possède au moins une activité d'agroforesterie, que ce soit au travers de formations dédiées ou bien sur les exploitations associées, dans des ateliers technologiques ou sur des parties de domaines de ces établissements. Leurs apprenants sont en effet les futurs agriculteurs de France, et les former sur de tels sujets est essentiel. Par exemple, le groupe de travail « multifonctionnalité des haies » regroupe aujourd'hui une vingtaine de lycées, et est animé par les animateurs des réseaux « biodiversité » et « énergie » du ministère chargé de l'agriculture. Le plan de développement de l'agroforesterie a aussi permis de mettre en place un concours national qui, après une phase expérimentale en 2018, va intégrer le concours général agricole dans la catégorie « concours de pratiques agro-écologiques ». Il s'agit d'une reconnaissance d'importance majeure, car permettant de valoriser des conceptions de systèmes ou des modes de gestion particulièrement performants, et d'en faire des modèles, portés par des agriculteurs qui peuvent apparaître comme pionniers ou garants d'un savoir-faire fondamental pour l'avenir de l'agriculture. Beaucoup d'autres mesures et actions concrètes, provenant directement du plan de développement de l'agroforesterie, pourraient être citées, telles que la rédaction d'un guide « agroforesterie et baux ruraux », répondant aux interrogations à caractère juridique que peuvent se poser les porteurs de haies. Plusieurs mesures du second pilier de la politique agricole commune (PAC) sont également directement dédiées aux haies (mesure agroenvironnementale et climatique « Linéa » visant à financer l'entretien des haies, mesure 4.4 visant à financer l'implantation de haies, mesure 8.2 permettant de financer les systèmes agro-forestiers interparcellaire…). Le premier pilier permet également de protéger le bocage, au travers de la mesure de bonne conditionnalité agro-environnementale n° 7 et du maintien des infrastructures écologiques. Pour la PAC post 2020, les discussions sont en cours sur les différentes mesures à visée environnementale qui seront mises en place. La préservation et le développement des haies font partie des éléments de réflexion dans cette perspective. Le Gouvernement a lancé le plan biodiversité le 4 juillet 2018. Il comporte différentes mesures dans lesquelles la haie trouve toute sa place, telle que l'action 24 qui propose des financements portant sur les paiements pour services environnementaux, et mentionnant explicitement l'importance de la haie. Le Gouvernement œuvre à ce que les haies soient préservées, qu'elles soient valorisées et que leur potentiel soit maintenu et développé compte-tenu des services rendus par ces éléments bocagers.

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